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16 ans, grosse & moche!
13 septembre 2012

JEUDI 13 SEPTEMBRE 7h30

Alors que je n'avais pas fait MON rêve depuis plusieurs semaines, il est revenu me hanter cette nuit. Un couple me tient la main, tendrement. J'essaie de voir leur visage mais je n'y arrive pas. Un chien tout gentil sautille autour de nous. Le chien se met à grogner comme si le danger approchait. Et soudainement je réalise qu'on ne me tient plus la main. Je cherche la présence de cette tendresse. Le chien aboie, me regarde bizarrement puis me saute dessus et me mord au visage.

Je me réveille ensuite. Je suis folle sûrement. Je devrais faire une thérapie ou être internée. Ce rêve commence tellement bien et se finit en cauchemar.

Peut-être que mon subconscient a entendu le chien des Vieux qui grattait à ma porte, comme il aime faire de temps en temps, et a remis mon rêve habituel sur le devant de la scène nocturne de mon cerveau torturé.

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12 septembre 2012

MERCREDI 12 SEPTEMBRE 21h30 : TARTINAGE...

J'aime rêvasser par la fenêtre de ce quartier. Je les vois, sans être vue, j'imagine leur vie et parfois je m'imagine dans leur vie. Je suis une observatrice, je suis faite pour contempler. Mais je n'aime pas agir. C'est trop brutal d'agir dans ce monde.

Je viens juste de scotcher sur deux passants : j'ai reconnu mon coupable du jour, le beau garçon qui s'est acharné sur moi à la cantine. Avec sa beauté, on dirait un ange. Et quelques secondes plus tard une fille s'est jetée dans ses bras. Et cher blog, je te le donne en mille, la fille c'est une des deux pestes. Voilà pourquoi il s'est défoulé sur moi, c'est un pantin aux mains d'une de mes nouvelles ennemies.

Ils s'embrassent comme des porcs depuis cinq minutes. Rien de romantique comme on pourrait voir dans les séries. Non, c'est du tartinage mécanique comme s'ils participaient à un jeu où il faut étaler du nutella sur la langue de l'autre jusqu'à la couvrir totalement. Puis ils se sont quittés, il a eu l'air de quitter mon quartier et elle d'y rester. J'ai ouvert la fenêtre et me suis penchée en avant. Alors qu'il me manquait quelques secondes pour voir où elle allait entrer, la Vieille est entrée dans ma chambre et a cru que je voulais sauter par la fenêtre!!! Elle était hystérique, elle m'a dit qu'elle allait en faire part aux services sociaux, qu'elle ne pouvait pas se permettre de s'occuper d'une suicidaire. Quelle vieille peau de vache. Et puis elle m'a dit qu'elle y réfléchirait, qu'on pourrait peut-être s'arranger.

La Vieille a aussi tilté sur mes chaussures gothiques déballées :
- Tu vas pas te balader à l'école avec ce déguisement? C'est hors de question.
- C'est pas un déguisement, c'est classe!
- N'oublie pas que si tu ne te tiens pas à carreau, j'appelle ton assistante sociale.

Ça m'a glacée cette conversation. Je dois trouver un moyen de porter mon armure à l'école.

12 septembre 2012

MERCREDI 12 SEPTEMBRE 18h05 : PATATE DONC JE SUIS!

Pas de chaise qui cède sous mon poids, ni de cours de sport qui tue ma réputation. Mais l'heure de la cantine s'est transformée en cauchemar.

Les deux premiers jours j'avais commencé à prendre des habitudes confortables. J'évite la cohue en passant dix minutes après tout le monde. Bon les meilleurs plats sont pris d'assaut. Parfait ça m'oblige à prendre des immondices (macédoine de légumes, ou purée radioactive verte fluo) et comme j'ai faim, je mange tout. Il n'y a plus de frites et plus de steak haché. Bon sur le dessert, et l'entrée, il reste toujours le plus sucré et le plus gras. Faut bien se faire un peu plaisir. De ce côté là, pas de problème.

Je me suis trouvé une table que personne ne veut, c'est celle à côté du tapis roulant destiné au plateau repas vide... vide c'est un grand mot, on y trouve plus de la moitié des ingrédients d'origine et quelques bonus comme des chewing-gums, des emballages de cosmétiques, et des cadavres de mots doux.

Ma petite table est mon havre de paix. C'est une table pour deux. Une île déserte. Ça pourrait vite devenir un chantier mais je me débrouille pour finir et m'enfuir avant la cohue de sortie. En effet ils arrivent et repartent tous en même temps. Les moutons de mon école aiment se goinfrer en troupeau, en se persuadant qu'ils sont dix à s'apprécier. Quel mensonge. Un instinct grégaire.

Bref! La guerre a commencé. Je n'en avais jamais vu dans mon ancien lycée. Mais j'en avais déjà entendu parler. Au début ça pouvait être drôle car je n'étais qu'une spectatrice. Mais évidemment le sort m'a choisie. Mais de quoi je parle? D'une guerre de purée!
C'est comme une tradition primitive presque animale, une rébellion de bébés capricieux contre l'autorité de leurs parents. J'étais tapie dans ma tanière, quand le match a commencé précédé de quelques ricanements. Des mecs évidemment! Mais les filles aiment ça sans participer, elles hurlent d'abord, faussement choquées, puis se protègent derrière les garçons, puis les encouragent, puis deviennent des furies insatiables. Tout en parole. J'assistais à un show surprenant, nouveau pour moi, digne d'une dissertation philosophique. Un plaisir voyeur. J'ai vite déchanté.

Je me suis d'abord pris un coup de purée sur le plateau qui a fait tomber ma canette de coca (oups un plaisir avoué). Le soda collant s'est répandu dans mon assiette de purée. Je me suis dit : pas mal je vais tester la purée au coca.
Puis un jet de purée est passé au dessus de ma tête et a atterri dans le tapis roulant qui s'est mis à sursauter. Un deuxième, un troisième. J'ai juste eu le temps de voir d'où provenait le projectile avant de me prendre le quatrième dans les cheveux. Dégoûtant. J'ai tenté de commencer à enlever le pâté avec mes doigts pendant que la guerre continuait sans moi. Le tapis roulant commençait à faire un bruit étrange, probablement saturé de purée. Et hop un coup de purée dans le visage, puis un deuxième, provenant du même coupable. Un mec que je ne connais pas. Mais pourquoi cet inconnu s'acharne-t-il sur moi?

J'ai alors abandonné mon plateau, mon dessert, ma purée verte et j'ai battu en retraite misérablement. En me faisant siffler et huer par une foule sans forme. Juste après mon départ les surveillants sont intervenus en sifflant avec autorité. Ouf, j'ai évité la punition collective!

Enfin dans le couloir, j'ai croisé un surveillant qui m'a regardé avec des gros yeux. Couverte de purée, je ne pouvais pas échapper à son courroux :
- au réfectoire comme les autres! Tu croyais échapper au nettoyage!

Il m'a pris par le bras, traînée comme une coupable à la cantine et mise à contribution. Il s'est alors étonné de voir aussi peu de gens de corvée. Il est allé discuter avec ses collègues surveillants pour comprendre comment la majorité des coupables avaient fui. Parmi les bagnards comme moi, il n'y avait bien sûr pas le type qui m'avait agressé. Ni mes amies les deux pestes. En revanche, j'ai vu au loin David le Putois avec une perruque de purée.

Je me suis posé la question tout le long du reste de la journée : pourquoi cet inconnu s'est déchaîné sur moi. Il avait l'air mignon. Pourquoi un mec mignon est toujours méchant? Pourquoi est-il condamné à harceler les gens moches comme moi? C'est comme un réflexe, une facilité? Encore un instinct sauvage?

Et pourquoi n'ai-je pas le réflexe de me défendre? Pourquoi je n'ai pas d'instinct sauvage moi? J'aimerais être moins humaine et plus animale. Finalement ce sont les moins humains qui sont les plus heureux. Et les plus humains sont malheureux, perdus.

Ce soir je dois réfléchir à mon armure. Du passé il ne me reste que mes Newrock, délicatement compensées. Je n'ai pas réussi à m'en séparer quand j'ai fait une croix sur le passé.

11 septembre 2012

MARDI 11 SEPTEMBRE 21h : PODIUM DES GOURDES!

J'ai été à la hauteur de mes attentes. Calamiteuse. Je suis allée me changer aux toilettes des vestiaires, et les deux pestes sont venues frapper à ma porte.
- Dis donc toi, tu te crois où là, et si on a une grosse envie on fait comment?
- Change-toi devant tout le monde...
- Comme tout le monde!
- Laisse là, elle a trop honte
- Faut assumer quand on est comme ça
- Faut faire attention et pas se laisser aller
- Ça demande un minimum de volonté d'effort...
- Et ça c'est pas son fort...
- Elles ont arrêté en gloussant de concert.

J'avais déjà honte. J'ai attendu que tout le monde sorte du vestiaire pour m'extraire des toilettes. Et quand j'ai osé mettre un pied dehors, un mec m'a fait une remarque en me demandant si tous mes T-shirts étaient gris. Et un autre a sorti que je ne m'étais pas changé. Et il avait raison...

On a fait de l'endurance d'abord, j'ai pas tenu plus d'un tour. Je me suis fait doubler par tout le monde. Puis on s'est mis au volley que je redoute particulièrement. Comme d'habitude j'ai fui le ballon jusqu'à ce que mon équipe m'insulte. Justement une des deux pestes en faisait partie et ne s'est pas gênée, sans s'adresser à moi directement : « elle est pas vive la nouvelle », « on pourrait la confondre avec le ballon ».
Au bout de trente minutes d'extrême concentration à fuir la baballe, je commençais à m'ennuyer et j'ai regardé autre part, en me grattant le visage. Et pile à ce moment là, le ballon est tombé sur ma tronche de cake. Mon bras a été emporté et mon ongle a griffé toute ma joue droite, de l'œil jusqu'au menton. Évidemment les moqueries sont reparties de plus belle : « elle a trouvé le moyen de se blesser avec le ballon sans le toucher », « Madame y'en a une qui s'est écorché le visage ». La prof m'a proposé de me mettre du Mercurochrome et l'assemblée a ri. J'ai abandonné le terrain avant la fin. Je n'ai pas pris de douche et je suis allée pleurer dans les toilettes des filles.

Mais comment je vais surmonter tout ça? C'est pire que l'ancien lycée. Je voudrais devenir invisible ou rentrer dans une bulle. J'ai failli écrire disparaître, mais c'est faux. Je voudrais profiter de cette planète et tout ce qu'elle peut m'apporter mais sans les gens. Je n'ai aucun plaisir à « côtoyer mes semblables ». C'est vraiment une expression à la con. Je n'ai pas de semblable. Je suis seule dans mon corps, face à mon corps. Et seule dans mon cerveau.

J'ai demandé à la Vieille de m'acheter des affaires de sport correctes. Elle s'est étonnée que je sois si peu équipée. Elle m'a proposé de m'en acheter demain sur Internet...sur La Redoute...ou les 3 Suisses. Je me suis bloquée direct : hors de question qu'elle les achète pour moi, et encore moins sur des sites de grand-mère. Trop la honte, elle veut ma mort par ridiculisation, ou bien ridiculisme, ou bien par hontisation... bref si j'avais un ordi j'aurais pu trouver le mot français. Hey, mais je suis bête, si elle achète sur Internet, c'est qu'elle cache un ordi quelque part... Elle ne m'a pas proposé de l'utiliser jusqu'à maintenant.

Cette nervosité m'a épuisée, je suis une loque, j'aimerais me réveiller sur une autre planète. Ou alors un autre pays. Et si possible faire quelque chose d'intéressant demain, ou d'utile? S'il vous plaît là-haut, télé-transportez moi cette nuit.

11 septembre 2012

MARDI 11 SEPTEMBRE 13h15

Rien à l'horizon, Matinée barbante. Le seul problème c'est d'être devant alors que j'adore être au fond. Et je sens des regards de jugement dernier juste derrière moi. Je n'ose pas regarder. J'entends juste les deux mêmes filles glousser comme hier. Mais j'y pense les deux filles qui me massacraient hier aux toilettes c'est peut-être les mêmes. Tant de méchanceté dans deux monstres aussi belles.

Justement, elles viennent de passer en chuchotant en me regardant. J'ai fait semblant de ne pas les voir en tournant mes yeux dans tous les sens. Mmmmh discret. Laquelle des deux est la plus stupide?

Le pire est à venir... le sport...

 

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11 septembre 2012

MARDI 11 SEPTEMBRE 2012 7h28

J'ai dû m'assoupir entre 3h et 7h. Et là j'en suis malade. Pourvu que je passe inaperçue. Et la Vieille qui va me reprocher de ne pas manger ses tartines rassises et light! Où est le beurre SVP?

10 septembre 2012

LUNDI 10 SEPTEMBRE 2012 23h20

Le néon clignote sur mon oreiller. Je pense que le Vieux et la Vieille se détestent mais jouent le jeu du foyer parfait auprès de moi. Qu'est ce qui peut bien amener deux personnes à se détester comme ça? Il vaut mieux être seul.

Je ne risque pas de tomber dans ce piège, vu mon allure personne ne s'intéressera jamais à moi. D'ailleurs pour demain j'hésite à ressortir la panoplie.

En parlant de panoplie... je viens de repenser à un truc horrible... j'ai cours de sport demain et je n'ai plus d'affaires de sport. Il faut dire que j'ai pris le strict minimum quand j'ai quitté l'ancienne famille, il fallait ne pas traîner, et j'avais besoin de laisser tous les souvenirs qui pouvaient me ramener en arrière.

Pour en revenir au sport, c'est ma hantise. Se changer devant une brochette de top models alors qu'on est plutôt une taupe modèle. Porter des vêtements de sport qui de toute façon mettront en valeur mes bourrelets. Faire des efforts physiques insoutenables devant un prof militaire. Prendre des positions ridicules lors des roulades avant-arrière et poirier. Sans parler de la corde ou des barres parallèles qui pourraient céder sous mon poids. Et de l'endurance qui se finira à l'infirmerie.

Je me demande si je vais réussir à dormir.

10 septembre 2012

LUNDI 10 SEPTEMBRE 2012 17h20 : THE BIG DAY!

Tout s'est très mal passé. Comme prévu. C'est toujours pareil. Je suis faite pour être ridicule.

J'avais opté pour la tenue sobre. Si je peux passer inaperçue le premier jour c'est déjà bien. Une journée neutre, sans émotion, comme un robot. C'est ce que je voulais. Une journée sans saveur, sans odeur, sans couleur.

Et bien non, le destin en a décidé autrement. Et comme je n'avais pas ma tenue de guerrière, de moi on n'a fait qu'une bouchée. Du coup la journée a une saveur amère, une odeur qui pue et une couleur de mauvais goût, criarde des années 70. Pourtant j'étais en noir et gris, presque transparente.

La journée a mal démarré. La Vieille s'est vexée car je n'ai pas voulu son petit-déj. J'étais nouée, la gerbe. Elle est presque devenue autoritaire : « ah non tu vas pas me faire le coup de l'anorexique-boulimique, j'ai déjà donné... et après tu vas te plaindre que je ne te nourris pas... allez mange! » Quand elle était à la cuisine, j'ai tout refilé au chien qui rodait autour de la table. Il a gobé mais ça fait une tache grasse et collante par terre. Pourvu que la Vieille ne voie rien.

Mon lycée est à 500 mètres. Comme ça c'est comme si je vivais dans le lycée! Le rêve, pas de coupure entre la maison et l'Enfer.

Pourquoi les directeurs d'école en font-ils des tonnes? Je devais me présenter avec 15 minutes d'avance, à 8h30 donc. Il a d'abord commenté mon dossier scolaire, expliqué plein de trucs administratifs qui m'ont fait décrocher. Et puis les avertissements d'usage pour asseoir son autorité. Il a bien laissé passer la sonnerie. J'ai commencé à stresser, me disant que j'allais arriver en retard dans la salle et que tout le monde allait me dévisager de haut en bas jusqu'à mes cellules graisseuses et mes fesses trop larges.

Les minutes passaient, le directeur prenait son temps. Puis il me donne mon emploi du temps de première, je panique, ça déborde par tous les trous. J'ai droit aussi à une liste de livres à acheter. Il se lève. Je dois le suivre? Il m'annonce qu'il va me présenter à toute la classe. Les quelques mètres sont un supplice. J'ai envie de vomir. Il frappe, tout le monde se lève alors que la concentration n'avait pas l'air d'être au top. Tout le monde était en plein débrief studieux sur son week-end et la prof écrivait des trucs mécaniques au tableau. Il me pousse en avant comme un pion. Je rougis, je détourne le regard, je regarde le plafond et la fenêtre. Je n'entends ni ce que me dit la prof, ni le dirlo.

La prof me fait un signe de la main, je crois qu'elle m'indique une direction, une table vide au fond. J'adore le fond, c'est mon endroit préféré. Toute la classe se retourne vers moi et suis chaque centimètre de mes mouvements. Je sens que ça va être bon, pas de catastrophe en vue avant de devenir transparente. Le Dirlo met les voiles en demandant aux morveux de me « réserver le meilleur accueil » et de partager avec moi les cours perdus. Il est parti, encore dix secondes de supplice. La prof de Français reprend le cours. Je m'asseois délicatement sur la chaise. Mais un truc est louche. Les regards restent sur moi comme s'ils n'avaient rien d'autre à faire... J'enlève mon blouson gris... et là patatras. L'assise de ma chaise glisse et je tombe au sol comme une météorite de plusieurs tonnes. Dans ma chute j'entraîne toute la chaise avec moi. Passé le quart de seconde où l'assemblée vérifie que je n'ai rien de grave, le rire prend la foule à la gorge et ça ne s'arrête plus. Et les compliments fusent : « la baleine », « la truie », « le flop », « elle a cassé la chaise la grosse ».

A ce stade je suis rouge écarlate, j'ai des plaques de stress sur le visage et dans le cou. « T'as vu c'est une cocotte minute ». Deux filles, particulièrement jolies et bien fringuées, sont mdr devant moi. Elles sont au spectacle. La prof appelle au calme, mais cet événement les réveille, les anime. Ils n'attendaient que ça, c'est le scoop du jour. La grosse nouvelle qui a raté les premiers jours vient de s'écraser au sol dès sa première minute dans la classe.

Et là je réalise que je ne m'en remettrai jamais. Cette chute va donner la couleur de ma prochaine année dans ce lycée. Je suis désespérée.

Finalement, je me suis remise debout et j'ai cherché une autre place vide. Et j'étais paniquée, je me demandais si je n'allais pas aller pleurer aux toilettes ou m'enfuir à tout jamais. La prof m'a alors désigné une place devant à côté d'un type. Tout ce dont je me souviens ensuite c'est que le type sentait la sueur et était habillé en noir et gris comme moi.

A la cantine j'ai mangé toute seule, de toute façon mon appétit était indécent de frustration, je n'étais pas belle à voir et comme je n'avais rien mangé le matin, ce fut un ravage. Je pensais que la journée se terminerait comme ça et qu'on ne pouvait faire pire. Mais à la pause de 15h30, j'étais aux toilettes des filles, enfermée à double tour, et j'ai surpris une conversation entre deux filles :
-T'as vu la chose qu'on s'est coltinée!
-On dirait un blob
-C'est fou comme ce genre de looseuse attire toujours les problèmes
-Un vrai aimant
-C'est quoi un aimant... tu veux dire un amant?
-Et elle a fini par retrouver ses semblables
-Ah oui David le putois!
-Et quel goût...
-Le plus mauvais qui soit, on se croirait à l'hôpital
-C'est pas étonnant pour deux cadavres...
Elles ont ensuite gloussé. Je n'ai pas compris tout de suite, mais au dernier cours, j'ai demandé à mon voisin attitré qui pue comment il s'appelait et il a répondu David. Alors là ce fut la chute, les deux garces des toilettes parlaient de moi! La déchéance. Ce qui me console c'est qu'une des deux semble complètement idiote. C'est ma consolation.

Je suis rentrée dévastée. Et j'ai mangé du nutella devant la télé avant de réaliser que le pot était périmé. Je ne me sens pas malade. Seulement grosse. Et puis je n'ai pas faim alors que la Vieille semble s'être mise aux fourneaux.

Mais qu'est ce que je vais devenir dans cet Enfer?

9 septembre 2012

DIMANCHE 9 SEPTEMBRE 2012 18h15 : NEW HOME, HOW LONG?

Je suis dans mon nouveau quartier et dans ma nouvelle famille. Enfin si on peut appeler ça une famille. La mère Rondin est passée me chercher vers 16 heures, m'a acheté 2 pains au chocolat sur la route sous un soleil de plomb. Je les ai gobés sur le trajet. Sûrement un peu de stress.

Nous sommes arrivés dans une rue piétonne, la nuit tombait, tous ces gens toutes ces boutiques c'était un peu éblouissant, même aveuglant. Pas très accueillant, un peu terrifiant. La mère Rondin parlait mais je n'écoutais rien. Je me disais qu'elle était vieille, qu'elle allait un jour prendre sa retraite, je ne la reverrais plus. Mon regard s'est attardé sur une bande de 3 jeunes de vingt ans qui avaient l'air très complices et qui faisaient du bruit sur le trottoir. Leur joie m'a gavée. Et cette foule dans la rue, c'était oppressant. Il y avait des gens qui nous regardaient Rondin et moi. On faisait tache visiblement

Après quelques minutes de marche nous sommes arrivées devant l'immeuble. Un immeuble parisien quoi, pas trop pourri : Rondin a dit « Ossmannien ». Une porte avec une peinture verte, enfin vert-bouteille, très brillante. Le hall est un peu décrépi quand même. Un ascenseur, en panne. Ça va me forcer à faire du sport. Une dizaine de boîtes aux lettres dont une toute cabossée. Deux étages à grimper qui m'ont paru une éternité. Un grand palier, 2 portes l'une en face de l'autre. Une vieille ouvre, souriante et polie, un peu coincée. Elle doit avoir le même âge que Rondin en fait. C'est vieux et feutré chez elle. Ça sent la moquette, et la naphtaline.

Une fois la mère Rondin envolée, c'est souvent la tombée des masques. On ne déroge pas à la règle. Le sourire disparaît, et c'est une desséchée glaciale qui apparaît. Son mari semble comme elle, une veille plante déshydratée, et terne. Ma chambre est un débarras transformé. Mais j'ai vue sur la rue piétonne et sur le néon clignotant d'une boutique, ce qui donne des ambiances de boîtes de nuit à ma chambre. Le premier dîner était pas dégueu, mais on verra sur la durée. J'ai un peu l'impression d'être à l'hôtel, il y a service mais c'est un peu robotique.

Je me suis calfeutrée dans ma chambre très tôt, avec le besoin de construire mon nid. J'ai déballé mon sac. Vite fait. C'est tout petit, j'ai peu d'affaires. Et pourtant c'est toute ma vie.

Je suis allée me balader aujourd'hui dans la rue et le quartier dans une chaleur étouffante et ma Vieille m'a fait la visite guidée, gentiment mais sans plus. Elle n'est pas très funky. La rue était quand même animée pour un dimanche. J'ai repéré un petit café, il y avait un sticker wifi sur la vitrine qui m'a tout de suite sauté aux yeux. Si je peux surfer gratos, on va se gêner. Reste l'ordinateur à trouver pour mettre tout ça. En attendant j'écris tout ce blabla dans un cahier inutilisé. Quand je me relis j'ai l'impression d'être une idiote, c'est creux, ça ne va intéresser personne, même pas moi en fait. Et le début on dirait une folle. Ou comme si j'étais la marionnette de quelqu'un d'autre!

Pendant quelques secondes je me dis que je vais tout jeter. Puis un détail me fait repartir. De toute façon personne ne me lira jamais alors on s'en fout. Quand je serai vieille, peut-être que je serai heureuse de relire tout cet arrachage de cheveux d'adolescente mal dans sa peau.

Dans mon nouveau quartier, ça sentait les lendemains de fête : des poubelles pleines, des bouteilles de vin à côté du bac à verre. Encore à moitié pleines. Je me dis que je me sens comme cette bouteille de vin. Pas vide mais déjà au rebut. Tiens j'entends un camion poubelle qui passe, je regarde, et hop la bouteille vient de se faire dévorer par la machine goulûment.

C'est exactement ce qui m'attend demain. Une grosse machine qui va me broyer. J'ai la boule au ventre rien que d'y penser, je déteste ça repartir dans un nouveau lycée, et en plus je débarque après tout le monde.

J'ai 2 options : la tenue sobre ou l'habit de guerre. Peut-être je pourrai me faire des amis cette fois alors j'aimerais bien tenter la tenue sobre. Allez hauts les cœurs.

La Vieille vient de m'appeler pour le dîner. Qu'est ce qu'on dîne tôt ici. Le Vieux de la Vieille se plaint que c'est trop chaud, je l'entends d'ici. Quel couple! Ça fait envie lol.

8 septembre 2012

SAMEDI 8 SEPTEMBRE 2012 11h30 : TAKE OFF!

Ça y est je m'y mets. Je commence l'exercice le plus narcissique au monde, un blog, journal intime du XXI siècle. Bon il me reste à trouver une connexion internet, un ordinateur, des choses à raconter, une vie trépidante...Encore que sur ce dernier point, je peux, peut-être, m'aligner.

Si c'est compliqué alors pourquoi se prendre la tête? Et bien c'est dur d'être lucide sur ce sujet. Justement être plus lucide sur soi-même? Tromper sa solitude aussi? Laisser une trace pour soi ou pour les autres. Je ne sais pas vraiment. Je serais gênée d'être lue et en même temps j'ai besoin de partager un tout petit bout de ma vie et de mon âme même avec des inconnus et dans un monde virtuel. Le monde réel est trop agressif. Et je n'y ai personne à qui me confier. En même temps je n'ai pas envie d'être jugée ou qu'on se moque de moi. Alors l'anonymat sur la toile c'est bien la meilleure solution. Peut-être les bloggeurs ou les lecteurs de passage comprendront ma démarche que je ne comprends pas bien moi-même.

Et pour mettre les choses au point, je n'ai aucun talent d'écriture particulier. Aucune prétention. C'est même l'inverse. De toute façon, je ne suis douée en rien. Peut-être même pas pour la vie en fait.

Qui suis-je? Et bien je m'appelle Sarah, j'ai 16 ans, je passe en 1ère. Je vais changer de lycée à nouveau à la rentrée. Pourquoi? Ce n'est pas de ma faute! En tout cas pas de problème ou presque avec mon précédent lycée, même si je n'ai aucun regret, je l'ai détesté. Non c'est parce que je suis orpheline et que je change de famille d'accueil aujourd'hui. Je ne préfère pas pour l'instant raconter ce qui s'est passé dans la famille précédente. En tout cas j'ai passé ces derniers jours au foyer. Que des mauvais souvenirs.

Comment me décrire? En toute sincérité je suis grosse, moche et petite. Pas gâtée par la nature! Mais ce n'est pas vraiment un problème, je n'ai jamais connu autre chose. C'est mon destin alors pas de problème. Au moins les filles ne me voient pas comme une rivale. Mais c'est bizarre normalement j'aurais dû dire que les garçons me voient comme un pote. Et bien non, non plus, ils ne me voient pas tout simplement. Du coup je suis assez tranquille dans ma bulle.

La mère Rondin – c'est mon assistante sociale attitrée, la classe - vient me chercher dans quelques heures pour faire le transfert. Elle ne travaille pas le samedi mais elle a fait une exception pour moi afin de faciliter mon installation et ne pas perdre de temps avec l'école -déjà trois jours manqués à cause du dernier désastre-. C'est un peu ma seule et vraie famille au fil des années. Elle est pète-sec mais je l'aime bien, elle ne m'a jamais trahie. C'est mon seul repère depuis mon enfance. Je suis contente de la revoir, ça faisait longtemps.

Là, tout de suite je me sens soulagée, mais aussi de plus en plus stressée.

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