J'ai comme l'impression que le monde du textile ne veut pas de moi... Quand j'ai fait le tour de ce qui me plait, j'ai pensé aux vêtements en premier. Ce n'est pas pour la garde-robe que je possède mais plutôt pour le rêve que tout ça m'évoque. Basta je ne vais pas m'entêter.

Je pense que ce qui revient souvent, c'est ma gourmandise : le pain au chocolat, le Nutella, les canettes de coca. En passant devant la boulangerie ce soir j'ai eu l'idée de devenir vendeuse en boulangerie. Ce qui est sûr c'est que dans cet univers que je connais bien en tant que consommatrice, les vendeuses ne sont pas recrutées sur leur physique. C'est tentant non ? J'aurai peut-être des gâteaux gratos ?

En attendant je suis frustrée, l'odeur du levain titille mes narines mais je n'ai plus un sou et je suis condamnée à rentrer chez moi.

Je tenterai demain...

On n'est jamais satisfait de ce qu'on a.

Quand j'étais en seconde je rêvais d'avoir des amis ou en tout cas des gens à qui parler. J'ai été exaucée dans le quartier qui m'a adoptée il y a un an. C'est pas parfait mais mieux qu'avant.

Quand j'étais en première, je rêvais de ne plus être adolescente, de grandir très très vite et de foutre le camp.

Tout ce qui m'est arrivé cet été m'a fait grandir et m'a donné l'occasion (un peu forcée certes) de mettre les voiles. Mais une fois « animatrice pour enfant en cavale », j'ai rêvé de retrouver la sérénité de mon ancienne vie de première.

Maintenant que j'y suis revenue, la liberté que je ressentais cet été me manque beaucoup. Je rêve de m'évader. Et je rêve aussi de devenir indépendante financièrement, de voler de mes propres ailes. Mais après deux refus douteux de mini-job, je commence à douter. Je suis impatiente donc frustrée.

Mais le pire dans tout ça c'est qu'en plus de fantasmer le futur avec impatience, je regrette des morceaux du passé. Ma prof d'arts plastoc de l'année dernière et son grain de folie me manquent. Paola le « Monstre » de la cantine me manque. Mon ancien ami David me manque... en classe, à la cantine, dans la rue. La sympathie du Vieux me manque. L'acharnement de la Vieille me manque. Mon atelier « décors » pour le spectacle de fin d'année me manque... Je baigne dans la nostalgie de ma Première. Plus rien n'est pareil et tout me semble terne.

Courir sans cesse après quelque chose qu'on n'a pas ou plus ce n'est sûrement pas la clé du bonheur. Mais qu'y faire ? Je ne contrôle pas mes envies et mes regrets.

Décidément les cours de philo se ressemblent un peu chaque semaine avec une attention décroissante au fil du temps, et visiblement je ne suis pas la seule à décrocher à cette heure-là.

Ça bavarde dans tous les coins. Et le prof continue son monologue incessant sans prêter garde au brouhaha. Un monologue parfois incohérent. Si on l'écoute bien, on réalise qu'il dit des trucs qui n'ont ni queue ni tête. Il saute du coq à l'âne. Malgré tous les efforts du monde, l'assemblée finit par lâcher. Ça, pour rendre la philo monotone et bordélique, ce prof sait y faire.

J'ai comme l'impression que la messe est dite et que chaque jeudi matin ressemblera au précédent jusqu'au bac où nous aurons tous 7/20. Je commence à comprendre pourquoi personne n'a de mention Très Bien dans ce lycée en Terminale L... La philo pour nous c'est coeff 7 : sept fois plus d'occasion de sombrer dans l'ennui avant de sombrer dans l'échec...

Et bizarrement je me dis quand même qu'il y avait de quoi faire quelque chose de pas inintéressant...

Ah mon moment préféré de la semaine : le nouveau cours de sport où on n'a pas besoin de se mettre en tenue de sport. C'est de la marche, c'est pas du sport...

Enfin gérer les deux boulets qui m'ont accueillie dans leur groupe, ça c'est du sport.

Le prof a commencé à nous faire un cours théorique sur la boussole : d'où ça vient, à quoi ça sert, comment ça marche... Puis nous a donné une feuille de route par groupe avec des degrés d'orientation par rapport au nord à chaque carrefour ainsi qu'une boussole en plastique et le fameux GPS qui permet de valider qu'on a suivi le bon chemin.

« Essayez tous d'arriver avant 16h45, moi je pars, j'attends pas les retardataires qui vont faire du shopping »

- TINA : Hé l'autre il parle pour nous ou quoi ?
- FATIMA : Du shopping !!! N'importe nawak... On en a chié hein Tina ?
- TINA : Ben ouais on fait notre max !
- FATIMA : Tu vois c'est encore du racisme anti-grosses !
- TINA : Ouais trop la loose... J'aimerais bien moi faire du shopping...zyva !
- FATIMA : Et puis c'est la faute de l'autre là...
- TINA : Ouais elle est encore plus nulle que nous, elle a rien dans la cheutron.
- FATIMA : Wesh Tina, elle a le chiro dans les Nike !
- MOI : Hé là, je suis là !
- TINA : D'où que tu crois qu'on te cause...
- MOI : Bon on y va les dondons !
- FATIMA : Fais gaffe à toi, c'est pas parce que t'es moins grosse que tu peux te permettre de nous traiter ! Elle est chanmé la meuf...
- MOI : Je le prends comme un compliment.
Véridique, le fait qu'elle me dise que j'étais moins bouboule qu'elles deux, ça a enchanté le reste de ma journée.

C'était amusant de faire joujou avec la boussole, même si j'étais vraiment la seule à jouer. L'un des mes boulets a quand même eu une illumination :
- TINA : Je me demande si la boussole de mon tél donne le même résultat !
- FATIMA : Ouais meuf ramène ta boussole qu'on checke...
Voilà 10 minutes de perdues..., elles ont fait joujou, téléchargé des appli, comparé si tout ça donnait le même Nord... :
- TINA : Hé meuf ta solebou elle déconne...
- FATIMA : Y'a plusieurs Nord...
- TINA : Et pourquoi elle indique pas le Sud la solebou ?
- FATIMA : T'es grave ma cops, si t'as le Nord t'as le Sud...
- TINA : Ah ouais, t'es déclassée, pas comme la meuf là...
Ce que j'ai compris c'est que mon surnom c'est « meuf » et qu'elles ont l'art de parler devant moi comme si j'étais pas là... Peut-être qu'elles croient que je comprends rien à leur langage de caillera.

Déjà qu'on était en retard :
- TINA : J'ai le boule qui me fait mal...
- FATIMA : Moi j'ai le genou qui grince...
- TINA : J'ai la dalle... j'veux grailler.
- FATIMA : Ah ouais... un Big Mac...
- TINA : Juteux wesh ma caille, j'ai l'estomac qui crie famine !
- FATIMA : Hé meuf, on se fait une pause là...
Ben ouais y'avait un Mac Do en chemin.

2 Big Mac plus tard (et un cookie pas encore dégelé pour moi)...

A notre arrivée, le prof pliait bagage : « Félicitations, quel progrès... vous êtes... dernières ! »

Elles m'agacent les deux mammouths pour l'instant, elles n'arrêtent pas de se plaindre, elles s'écoutent.

Mais comme on fait partie de la même catégorie, je me demande si je suis pas comme elles... un boulet de la vie qui gémit sans arrêt. Est-ce que mon blog ne serait pas une grande complainte narcissique et pathétique ?

Berk j'arrête là pour aujourd'hui, je me dégoûte !

En fin de cours, mon duo était le seul à ne pas avoir fini la toile.

Le prof s'est adressé directement à Rosette la Gothique et moi devant notre chef d'œuvre inabouti :
« Vous deux c'est le pompon. Vous êtes en binôme par toile ça devrait aider. Mais non vous venez de démontrer que 1+1=0. Les maths avaient tort ! Je savais bien que cette matière servait à rien. Et quel gâchis de gouache ! Je devrais vous la faire payer...»

Je l'ai trouvé très vexant. Mais la Gothique jubilait :
- T'es démasquée ! T'es une usurpatrice ! L'année dernière c'était que du vent..., lance-t-elle en pleine extase.
- Pffff !
- Ouah la répartie !
Et voilà l'arroseur arrosé. Et elle s'est empressée de faire part de sa victoire sur les réseaux sociaux et tout le toutim.

Je suis sortie du lycée remontée comme une pendule. Après cet après-midi lamentable, je me suis dit que la foudre n'allait pas frapper deux fois au même endroit et que c'était le bon moment pour retenter ma chance dans une boutique de fringues.

Une que j'aime bien. Une qui indique « Recherche vendeuses à temps partiel. Débutantes bienvenues ». Super je me dis que c'est pour moi, « la reine des débutantes ».

Voilà le résultat :
- LA VENDEUSE : Vous cherchez quelque chose ?
- MOI : Oui je viens postuler, voilà mon CV.
- LA VENDEUSE : Oh vous savez comme on cherche des débutantes, le CV c'est pas très important.
Je me dis que c'est bien parti. Elle est souriante, agréable, commerciale quoi :
- LA VENDEUSE : Vous savez on cherche plutôt des garçons...
- MOI : Ah bon mais c'est pour les filles cette boutique ???
- LA VENDEUSE : Justement. Tout est dans la séduction.
- MOI : Et pourtant sur l'affiche...
- LA VENDEUSE : Et là je vois votre CV, vous manquez un peu d'expérience... Mais je suis sûre que vous allez trouver ailleurs.

Elle m'a cloué le bec. « DEBUTANTES »... égal « GARCONS AVEC EXPERIENCE » ?

Pffff je suis pas idiote. C'était une façon commerciale de me dire que je n'avais pas « le profil » et surtout la silhouette...

Commerciale oui sans doute... mais surtout très bête avec toutes ses contradictions! Si devenir vendeuse signifie devenir aussi bête qu'elle, je rends mon tablier...

En attendant je rentre dépitée par ma journée. La foudre a bien frappé à deux endroits identiques aujourd'hui. Sur Moi !!!

Je suis en plein cours d'arts plastoc et ça tourne au vinaigre.

L'objectif est de représenter à la gouache une corbeille de fruits que le prof a ramenée de la cantine. Pas très intéressant.

« Je veux de la technique et une représentation fidèle. Regardez mes beaux fruits comme ils sont appétissants. »

Mais le pire est de travailler cette toile en binôme. La Gothique est ma partenaire de jeu malheureusement. Et elle ne semble pas très motivée, elle attend que je fasse tout ou quoi ? Elle ne dit rien, ne fait rien et passe son temps à envoyer des SMS en ricanant comme la semaine dernière. Soudainement elle ouvre la bouche : « Ben t'attends quoi ? Que je fasse tout ou quoi ? »

Ah ben au moins on a ça en commun. On pense strictement la même chose au même moment, au mot près ! Nos cerveaux sont connectés. Mais pas nos pinceaux.
De temps à autre le prof sort une phrase qui donne envie de se jeter par la fenêtre :
« Je veux que ça ressemble à une photo ».

Ah ben super ! C'est le grand écart cette année par rapport à l'année dernière. Voici l'année « Zéro créativité ». Ça promet.

« Bon les deux filles ça n'avance pas beaucoup ». La remarque du prof est évidemment pour la Gothique et moi.

Je tente alors de vider quelques tubes sur ma palette et je commence des mélanges. La Gothique écarquille les yeux en me voyant faire puis tape frénétiquement sur son smartphone avant de rire.

« T'es daltonienne ou quoi ? ». Euh il n'y a pas de rouge ni de vert dans la corbeille puisqu'on y voit des bananes et des oranges avec un kiwi. De quoi elle me parle celle-là ? On lui a sûrement soufflé la réplique par SMS.
« T'es mal partie avec tes couleurs ! Tu connais les couleurs primaires ? ». Elle est en train de me faire une leçon ou quoi ? Et je monte en pression pendant qu'elle ricane de ses SMS. Elle finit par faire déborder le vase :
- Pffff ça ressemble à rien comme prévu ! affirme-t-elle comme si elle détenait la vérité absolue.
- Dis donc toi le vautour tu vas arrêter de me mettre la tête sous l'eau alors que tu glandes rien !
- C'est pour aider, moi je dis ça, je dis rien...
- Ben dis rien et fais quelque chose !
- Si tu veux pas profiter de mon expérience...
- Ton expérience ? Tu parles t'as redoublé ! J'ai pas envie de finir comme toi !
Alors ça, ça l'a mouchée ! Elle a fermé sa bouche et s'est mise à bouder tout en s'épanchant sur son smartphone.

« Sarah et Rosette, mais ça ressemble à rien votre corbeille de fruits. On dirait qu'ils sont moisis et la corbeille trouée. C'est pas très appétissant !! »

Ben voilà il est d'accord avec elle ! « Ca ressemble à rien ».
Tiens au moins lui il connaît mon prénom. Bof je préférais m'appeler Marina, Vanina, Claudine...
Hein qu'est-ce qu'il a dit ? Rosette ??? La Gothique s'appelle Rosette ???
- Comme la Rosette de Lyon ? dis-je, pétée de rire.
- Très drôle ! Ouah l'humour !
- Ouah la répartie !
Elle a haussé les épaules.

J'ai passé un an dans la même option qu'elle et je n'ai jamais su son prénom. Ni celui du Tatoué, ni aucun autre en fait. Normal puisque ma prof préférée n'était pas capable de retenir un seul prénom.

Conclusion du prof avant la pause : « Je vois que les Terminales qui font partie de ce cours mixte n'ont rien appris l'année dernière. C'est comme si on redémarrait à zéro. Au moins ça me fait une classe homogène de débutants. »

Quelle ironie, et quel mépris ! Qu'est-ce qu'elle me manque la prof étourdie 2012-2013. Ses oreilles doivent siffler. Ce cours 2013-2014 est devenu un supplice en deux semaines.

Je baladais mon Chien avant le dîner quand j'ai vu une réunion de famille au Rialto : Marco, Alyssa, la Mamie, la mère glaciale, le père patron du bar.

Je me suis assise sur mon banc... en les fixant !

De la curiosité, une petite pointe d'envie... Oui c'est une vraie famille, pleine de cohésion, et de complicité. La mère se détend, la Mamie plaisante avec Marco, le père taquine sa fille... Un beau tableau.

Mais Alyssa a l'air de mauvais poil. En partant elle a fait une bise à sa grand-mère, mais elle a snobé Marco complètement, ce qu'il n'a pas eu l'air d'apprécier du tout. Marco a continué a discuter avec la Mamie, une fois la peste partie. Il semblait inquiet, elle le rassurait, il se confiait.

Je devrais la cuisiner un peu la prochaine fois, la Mamie... Je suis toujours inquiète des dégâts familiaux que j'aurais pu causer...

En passant devant une boutique de vêtement que j'aime bien, j'ai vu une affiche : « Vendeuses recherchées à temps partiel ». Un signe du destin.

Je suis rentrée dans la boutique et on m'a vite coincée :
- Vous avez un CV mademoiselle ?
- Euh non...
- Vous avez de l'expérience ?
- Euh non...
- Vous avez quel âge ?
- 17 ans...
- Ah on prend que des majeurs... Au revoir !

Bel accueil, je suis pas près de racheter des fringues dans cette boutique.

Mais je pense que « Vendeuse en prêt à porter » pourrait me plaire surtout si j'aime ce que je vends. Et je pourrais peut-être avoir des fringues gratos ???

J'avoue que je me verrais bien dans une boutique de vêtements. Mais il va falloir que j'écrive un CV... un CV à 17 ans ?

Mais qu'est-ce que je vais mettre dedans ?
-mon adresse et mon âge en police 34
-mon brevet des collèges de 2011 en police 68
-mes passions... non je vais pas les mettre, ça ferait moche : Passionnée de Télé-réalité, Spécialiste en Pains au chocolat, Pratique régulière de la télévision, Collection de pots de Nutella... Je vais faire l'impasse.
-ma photo de grosse et moche en gros plan, boutons inclus !

Comment rivaliser avec des gens qui ont de l'expérience ? Je n'ai rien à mettre dans la partie « EXPERIENCE PROFFESSIONELLE » et en plus je fais une faute à PROFESSIONNELLE.

Je n'y vois plus très clair... et cette étape me paraît infranchissable.

Voilà le résultat de mon enquête qui n'a pas pris bien longtemps !

Le travail est autorisé à partir de 16 ans, parfois même à compter de 14 ans, lorsque le jeune effectue des travaux légers, notamment pendant les vacances scolaires. Cependant, jusqu'à l'âge de 18 ans, le jeune bénéficie de règles protectrices spécifiques qu'il soit salarié ou en stage d'initiation ou d'application en milieu professionnel effectué dans le cadre d'un enseignement alterné ou d'un cursus scolaire.

C'est pas mal non ? Travailler tout en étant sur-protégé !

Reste à savoir ce qui sera le mieux pour moi ! Oui car le but c'est quand même d'y trouver de l'intérêt, des avantages en nature, et des sous.

Mmmh je suis tout excitée. C'est parti.

Mais en regardant les petites annonces, je vois bien que les petits jobs ne sont pas très excitants, de quoi calmer mes ardeurs :
- Magasinier dans des grandes surfaces : j'ai pas les muscles pour... Porter des cartons toute la journée, très peu pour moi. D'ailleurs il y a bien écrit « magasinier » pas « magasinière » !
- Caissier / ère chez Monoprix : ben franchement passer au scanner des codes-barres toute la journée et demander « Vous avez la carte de fidélité ? » ça me motive pas du tout. En plus dans 2 ans toutes les caisses seront automatisées !
- Hôte / hôtesse d'accueil dans les foires et les grands événements : je vais pas me voiler la face... d'ailleurs on peut lire « très bonne présentation exigée ». Un job pour Alyssa et Ashley, ça c'est sûr !
- Distributeur / rice de flyers : pour se faire envoyer balader et retrouver les flyers dans le caniveau ? Démotivant et inutile.

Bon bah mon projet tombe vite à l'eau. Mais je ne suis pas en position de faire la difficile...

Je devrais peut-être interroger le CPE sur mon idée... je vais pas aller voir le Proviseur, lui il aurait trop peur de manquer sa mention TB.

Mais le CPE va-t-il vraiment pouvoir me renseigner ? Je devrais regarder sur Internet avant de m'enliser dans son bureau...