C'est sûr que là j'ai la pêche après avoir dormi 15 heures... Je suis allée voir sur Internet, c'est généralement les bébés qui dorment 15 heures. A 6 mois ils dorment tout le temps, à 1 an, ils n'ont plus besoin que de 14h... J'ai donc entre 6 mois et 1 an, areuh !

Bon j'en vois déjà certains qui m'imaginent avoir raté le début de l'épreuve...

Non ! C'était l'après-midi... et toc !

Mais j'étais suffisamment dans le brouillard pour avoir cru que j'avais dormi 24 heures... Et puis il m'a fallu deux heures pour me réveiller en finissant par engloutir tout ce qui restait dans les placards et dans le frigo...

Il me restait alors plus qu'1h30 de révision...

Mes plus fidèles ont pu remarquer que mon prof d'arts plastoc de Terminale était le plus académique du monde, surtout si on le compare avec ma prof barrée de 1ère... Alors on est restés 6 mois sur Gustave Courbet, le classique des classiques... et puis 2 mois sur Duchamp, et puis quinze jours sur le 3ème artiste (un inconnu japonais) qui n'intéressait pas du tout le prof... Un choix dangereux...

Ben tiens... au sujet du bac... Courbet et Duchamp. A croire qu'il connaissait les sujets. Faut dire qu'il n'avait pas trop le choix... Au programme, il n'y avait que ces 3 artistes... Hé oui ! C'était comme en littérature... En fait on étudie le sujet du bac toute l'année... On peut même plus faire d'impasse !

Encore que... si le sujet était tombé sur le Japonais, j'aurais fini en sushi et ma note en sashimi !

Du coup j'étais tellement inspirée que j'ai perdu 20 minutes à choisir... entre Courbet et Duchamp. Courbet, la facilité, le souvenir fébrile de l'enthousiasme inébranlable du prof, du par cœur à tour de bras...

Ou bien cette drôle de « Broyeuse de chocolat » sans âme un peu risquée, une peinture à l'huile de Duchamp...

Alors le sujet passe-partout sécurisé ? Ou le sujet casse-gueule tellement bizarroïde qu'on se demande où on va arriver après un tel voyage ?

Évidemment, ma nature bien pensante m'a conduite malgré moi à dire fuck au prof et à son Courbet... et à partir sur la planète Mars...

En vérité, j'ai adoré ce voyage plein de libertés, d'inspirations contemporaines, de Nuits Blanches parisiennes... En résumé, comment l'Art détourne des bases non artistiques... Pourtant, cet horrible prof était toujours là sur mon chemin. Avec sa technique, avec ses airs supérieurs. Alors je l'ai cité... pour mieux le contredire ensuite !

Voilà où vous trouverez ma broyeuse de chocolat qui a déversé dans ma bouche pendant trois heures un délicieux chocolat fondu sucré et onctueux... Un régal !

http://www.google.fr/imgres?imgurl=http://www.friendsofart.net/static/images/art2/marcel-duchamp-chocolate-grinder-no2_broyeuse-de-chocolat-no2-.jpg&imgrefurl=http://www.friendsofart.net/en/art/marcel-duchamp/chocolate-grinder-no2_broyeuse-de-chocolat-no2-&h=725&w=601&tbnid=hG0v4mIWTgKGmM:&zoom=

A un moment, j'ai même salivé sur ma copie en imaginant la fondue chocolatée... Et un surveillant ébahi a détourné son regard de gêne quand je l'ai surpris en plein voyeurisme... Non mais ! Si on peut plus baver sur sa copie tranquillement...

Oui oui, je parle bien d'une épreuve du bac...

Avec le recul, je sais que j'ai pris des risques, je suis la seule à avoir pris ce sujet quand j'entendais les jeunes en parler autour de moi, notamment cette Gothique précieuse !

Mais le jeu a du bon parfois... et je suis née avec le goût du risque dans la peau !

Je me suis endormie hier vers 18h... et je viens de me réveiller...

C'est la catastrophe...

Et mon épreuve d'arts plastoc ????????????????????????

Après mon insomnie et l'épreuve de littérature de ce matin, je suis rincée...

Il a fallu que ça tombe sur Lorenzaccio... Faut dire qu'il y avait une chance sur deux... Je me suis trituré le crâne sur la première question à 8 points sans arriver à rien : L'oeuvre de Musset, Lorenzaccio, a d'abord été publiée en 1834 au sein du recueil Un spectacle dans un fauteuil. En quoi ce choix de publication peut-il guider la lecture de la pièce ?????????????... Quoi ? Ben je sais pas, si la pièce est parue dans un livre c'est que personne ne voulait la mettre en scène ou la jouer ! C'était trop mauvais... Alors il a envoyé un SMS à sa copine George Sand qui lui a fait une petite place dans son Closer... Et là miracle, le bouche-à-oreille a fait son chemin, et c'est devenu un hit chez les ados ! Je divague... Ben oui d'ailleurs j'ai aussi divagué dans ma copie...

Je me suis mise à la deuxième question à 12 points dans les trente dernières minutes alors qu'elle était bien plus intéressante : Dans quelle mesure peut-on dire, avec un critique, que « ce drame romantique (...) est une pièce prodigieusement moderne » ? Vous fonderez votre propos sur votre lecture de la pièce et votre connaissance de ses mises en scène. Bon ben ça va, je vois où vous voulez en venir monsieur le créateur de questions et de sujets qui veut qu'on lui parle de tyrans à renverser...

N'importe quoi Sarah sur la répartition du temps, comme d'habitude...

Ressasser les échecs ne sert pas à grand chose, mais je m'attendais à mieux quand même...

C'est pas tout ça, mais... ma tête tombe, mes yeux louchent, ma pensée m'échappe... Mmmh je vais m'allonger devant ma télé... Je vais m'assoupir, me laisser aller quelques instants avant de repartir de plus belle sur mes dernières révisions...

Faut pas que je m'endorme !

Mmmh ça fait du bien de se poser trois secondes...

Courage ma grosse ! Il faut réviser les arts plas-TOC...

TOC...TOC... TIC... TOC... TIC ... TAC...

Zzzzzzzzzzzzzzz

Ce n'est pas le jour-même que l'air est différent... C'est le lendemain. Il m'enivre et me fait peur en même temps... Il trouble mon sommeil...

Il a un goût de futur, de surprise, d'infini...

Il me guide vers mon destin...

Je lève la tête et je vois celui qui tire les ficelles de ma vie, il sourit et me rassure... Je lui fais un signe de la main... Je me réveille en sursaut.

Je cherche mon Chien qui n'est plus là... Je me lève, je cherche quelqu'un qui n'existe pas.

Je me recouche, et l'air du nouvel âge vient m'enivrer de nouveau. Je me sens bien. Je retrouve la mémoire de la sensation du pelage tout chaud de mon vieux toutou... Je tente de faire durer ce sentiment le plus longtemps... Malheureusement il s'estompe...

Je suis confuse dans mes pensées... peut-être parce que je n'ai rien mangé ce soir.

En ce jour particulier, Mme Rondin ne m'a finalement pas oubliée... Un mail à 22h50... Je vous passe les formules habituelles...

« Ma chère Sarah
Je ne pouvais pas t'oublier aujourd'hui. Même si j'ai failli.

Je sais que la période n'est pas à la fête, enfin j'espère ! Mais c'est bientôt fini. Courage.

Je voulais te dire que je pense toujours bien à toi même si je ne suis plus responsable de toi.

Je sais que nous allons bientôt nous revoir pour ouvrir ton dossier. Sache que je serai toujours là.

Rien ne me ferait plus plaisir que ton bonheur et ta réussite désormais. Après tous ces tracas que nous avons connus depuis ta tendre enfance, je suis sûre que le meilleur est à venir pour toi, ma chère Sarah.

Je t'appellerai en fin de semaine pour savoir si tout s'est bien passé. Mais sache que je n'en doute plus.

Mme Rondin »

Je viens de trouver un petit message... ici... Une personne y a pensé, une... Une inconnue qui est la première à m'avoir suivie et à m'avoir écrit.

Du coup, que cette personne -que je connais presque pas- y pense a encore plus de valeur...

La petite fille qui est en moi est extrêmement touchée... et ne racontera pas en détail les conséquences de ce petit message sur mon visage... sur les fiches de révision, juste en dessous, écrites avec amour au stylo plume et à l'encre bleue... des fiches qui sont devenues totalement illisibles et le bleu qui est devenu très clair et très diffus !

Mais le pire c'est que cette personne y a pensé avant moi, ce matin à 10h23 alors que je dormais profondément ...

Je crois que je vais aller me balader, je vais respirer l'air d'un nouvel âge... Pour voir s'il est différent d'hier.

Oh mon Dieu...

Ce n'est pas une journée comme les autres... Et pourtant c'est tout comme... J'aurais dû me sentir différente... Mais rien à signaler...

Je suis dans mon bourbier du bac, et rien ne peut m'en sortir, même pas cette date...

Une date que j'ai attendue, que j'ai imaginée, que j'ai rêvée... Résultat : une montagne qui accouche d'une souris... Le pire c'est que ça m'est revenu en pleine épreuve d'anglais, au beau milieu de l'après-midi. Et ça m'a pas déconcentrée pour un sou...

Mais quelle idée quand même que cette date tombe en plein milieu du bac... C'est comme trouver une boîte de caviar dans les égouts, on ne pourrait en apprécier ni le goût, ni l'odeur, ni l'aspect...

Faut dire que j'ai jamais goûté au caviar... CQFD. Ça sera pas aujourd'hui. Et puis ça se déguste pas seul... Et là...

Ma seule consolation du jour : pouvoir regarder les Feux de l'Amour.

Ce matin, c'est officiel, j'ai ramé ! Et pourtant j'avais le tour du monde à faire : L'Europe, la Chine, le Brésil... Tout ça en bateau gonflable avec des rames pour enfants...

L'année d'une élection européenne et d'une coupe du monde de football, il y avait bien quelques sujets attendus... La Chine par contre, c'était totalement inattendu !!! Et malheureusement mes révisions totalement non exhaustives ne m'ont pas permis de prendre des risques...

J'ai donc pris l'Europe en vol low-cost avec escale dans toutes les villes d'Europe, « histoire » de bien diluer la « Grande Histoire »...

Et puis j'ai fini par une téléportation au Brésil... Mais j'avais oublié ma boussole et dans la forêt amazonienne, tous les chemins se ressemblent... J'ai fini dévorée par une bête sauvage qui ne correspondait à rien d'appris en SVT...

En résumé mon tour du monde s'est transformé en tour de table, 3 traits de crayon, de l'effaceur, des ratures, de l'hésitation, de l'interrogation, de la circonspection, des soupirs pas très discrets, de la mémoire vide et de la pensée morte... Difficile de retrouver la liberté qui s'est imposée à moi hier sans rien demander...

Cheer up ! Tomorrow, English is at stake ! Mon tailleur sera-t-il riche ? Mes fleurs seront-elles belles ? Mon frère sera-t-il malade ? Autant d'interrogations existentielles qui ont hâte de trouver une réponse et de passer à autre chose...

Au moins je vais pouvoir dormir... C'est l'après-midi...

Ce qui me rend triste, c'est la sensation qu'hier mon brave toutou était avec moi... et qu'aujourd'hui il est déjà parti loin. Ce qui me ferait du bien c'est une lettre de la Mamie... Mais ça fait 3-4 semaines que je n'ai plus de courrier. Ma boîte a été forcée ou bien cabossée par un déménagement, je ne sais pas... En tout cas elle a le ventre vide...

Mais peut-être que c'est une coïncidence et que personne ne m'écrit tout simplement.

Par la fenêtre, je vois bien les parents d'Alyssa qui la soutiennent, l'emmènent, la ramènent, la nourrissent. Elle a toute une équipe de coachs derrière elle et sa famille lui est dédiée intégralement ces derniers jours... Vous voyez où je veux en venir...

Bon je vais peut-être déjeuner... Nutella ou pop corn ou les deux... Mes deux coachs du jour...

Lors de mon épreuve de français l'année dernière j'ai paniqué pendant 3 heures avec une pause toilettes tous les quarts d'heure avant de me lancer pendant une heure.

Cette année, en philo, c'est l'inverse. Je n'ai pas hésité sur le sujet...
Sujet 1 : Les œuvres d'art éduquent-elles notre perception ? Sujet 2 : Doit-on tout faire pour être heureux ?
Parce que franchement, les œuvres d'art ça m'a dégoûtée cette année, les corbeilles de fruits ont tué ma perception !

J'ai écrit mon plan en 5 minutes et noté quelques auteurs... puis je me suis lancée dans le vide sans appréhension. Je n'ai plus pensé à rien, seulement à mon sujet...

Au bout de trois heures, j'avais épuisé mon nombre initial de copies plus une réclamée au surveillant, j'étais prête à écrire ma conclusion... Et là j'ai réalisé où j'étais et tout ce qui s'était passé ces dernières heures... Et mon cœur a débordé, en pleine épreuve... Pas discrètement, puisque tout le monde s'est retourné sur mes reniflements avant que j'aille me cacher aux toilettes...

Cette dernière heure a alors été terrible... Il fallait que je sorte respirer... Mais je ne voulais pas bâcler ma conclusion que j'ai mis une demi-heure à écrire. C'est comme si j'avais tout donné en 3 heures et qu'il ne me restait plus de souffle pour la dernière heure.

Et puis des pensées sombres sont revenues me hanter... L'idée que mon toutou ne serait plus là à mon retour...

Je suis touchée car Mme Rondin m'a appelée cet après-midi pour me demander si ça s'était bien passé, je l'ai rassurée en arrangeant un peu la réalité... Yunso m'a envoyé un petit SMS... Et enfin sa mère, Mme Phamvan l'extralucide, est passée vers 17h.

Quand elle a vu la litière vide, elle a compris.

« Je l'ai senti, et en te voyant j'en ai eu la confirmation, tu es à fleur de peau. »

Évidemment, on ne peut pas me dire ça sans en payer les conséquences, les grandes eaux ! Elle m'a prise dans ses bras, et j'ai pas pu m'arrêter.

« Toi tu as besoin de pleurer... Je t'ai ramené des petites potions d'herbes, y'en a pour se détendre le soir et puis y'en a pour la vitalité ».

Me voilà dopée ! Est-ce que ce sera suffisant pour refaire l'Histoire et maîtriser la Géographie ?

J'avais peur de toucher ce petit corps mort. Je sais qu'il n'est plus là. Ce n'est plus que de la matière qui dépérit depuis hier soir. Je me demande où il est...

Ça a été dur de mettre cette matière inerte dans la brouette. David a presque tout fait.

Évidemment j'avais les yeux tout gonflés sur le chemin du vétérinaire face à un quartier médusé voyant la brouette recouverte d'une couverture... Une étrange procession dans la vie parisienne.

David était là, avec moi. Sur le chemin il a tenté de me changer les idées...
- DAVID : Je me suis complètement planté en philo... Faut dire que je comptais commencer mes révisions ce week-end pour cette matière. Toute façon je m'en fous, le coeff est nul en S, j'ai de quoi me rattraper.
- MOI : Moi, j'ai gratté pendant trois heures d'affilée sans m'en rendre compte... et la dernière heure, j'ai réalisé où j'étais... et j'ai plus rien fait...
- DAVID : T'as pris quoi toi ?
- MOI : J'ai pris un sujet, un truc qui me parlait...
- DAVID : Moi je voulais prendre le texte, mais y'a un sujet qui était sympa, alors j'ai suivi mon instinct même si j'avais aucun auteur en tête...
- MOI : C'était quoi ton sujet ?
- DAVID : Un truc du style « Vivons-nous pour être heureux »... Et toi ?
- MOI : C'est bizarre c'était presque pareil pour moi... du genre « Doit-on tout faire pour être heureux ? »

Impossible de ne pas être émue... David m'a laissé renifler en respectant mon chagrin... Mais c'est les sujets de philo qui me touchent comme ça... Le fait que lui et moi, on ait pris le même chemin... C'est une prise de conscience que je ne suis pas seule, qu'il est là, que nous avançons dans la même direction sans le savoir...

Quand j'ai laissé le petit corps à la secrétaire du vétérinaire, je n'ai pas voulu le revoir. J'ai dû me précipiter aux toilettes pour laisser mes émotions couler à flots...

Nous avons ensuite mangé à la boulangerie sans se parler, mais tout en se comprenant. Je me suis goinfrée.

Et puis David a dû me laisser... :
- DAVID : C'est Physique-Chimie demain matin pour moi, c'est 50% de mon bac, alors...
- MOI : T'inquiète pas ça va aller...
- DAVID : Je t'envoie des SMS tout l'après-midi d'accord ?

Le choc une fois rentrée dans mon appartement... la litière du toutou encore là.

Il était là à chaque ligne écrite ce matin, derrière chaque mot. La mort c'est peut-être la clé de la vie... Et le bonheur la quête de la vie...

Je ne t'oublierai jamais... Je te remercie de tout mon cœur d'avoir pris soin de moi pendant ces deux années.