Je me sentais assez invincible hier samedi, et riche après la visite en prison ! En plus j'avais reçu un petit sms avant dans la journée de vendredi... De quoi me faire pousser des ailes vers le firmament...

Cosmos, mon espèce de supérieur auto-proclamé au KFC, était infect hier soir :
- COSMOS : Bon maintenant, que t'as plus d'excuse, de bébé, de nausée, de fausse couche, ben tu vas pouvoir te remettre au travail...
- MOI : C'est sexiste ta remarque !
- COSMOS : Moi sexy ? Tu crois que je te drague ? Un boudin comme toi ?
- MOI : Sexiste tu sais ce que ça veut dire ?
- COSMOS : Joue pas à la grande avec moi, c'est moi le chef...
- MOI : Chef de pacotille !!!
- COSMOS : T'es en train de devenir vulgaire là !!!
- MOI : Tu sais pas non plus ce que ça veut dire pacotille ?
- COSMOS : Ferme-la, t'es un moulin à paroles comme toutes les gonzesses...
- MOI : Toi t'es jamais allé à l'école, et tu te prends pour Napoléon !
- COSMOS : Qu'est-ce qu'on en a à chier de l'école ? Ça sert à rien l'école...
- MOI : Je compte bien avoir mon bac moi...
- COSMOS : Ça t'apprendra pas à obéir... Je vais faire un rapport au manager, entre mecs on se comprend !
- MANAGER : C'est quoi ce bordel ????????????????????????

Effectivement le ton est monté pendant cette profonde conversation entre un macho idiot et une grosse-moche toujours attaquée sur son physique... La cuisine s'est arrêtée de fonctionner, les clients se sont figés, un spectacle pathétique se déroule devant un public attentif et circonspect... Pas sûr que KFC aime montrer cette image...

- MANAGER : Bon Sarah, mets-toi au travail et t'auras un avertissement...
- MOI : Et Cosmos il aura pas un avertissement ?
- MANAGER : Ça te regarde pas...
- MOI : Mais c'est quoi cet endroit où les hommes ont tous les privilèges...
- MANAGER : Tais-toi Sarah ou t'es virée sur le champ !
- COSMOS : Ah voilà on veut faire son intéressante, on se croit supérieur comme toutes les nénettes...
- MANAGER : Cosmos, tais-toi !
- COSMOS : Moi je dis ça, je dis rien...

Les clients nous regardaient médusés, il y avait même les deux types habituels qui n'arrêtent pas de râler à cause des ruptures de stock et des erreurs de produit... J'ai croisé leur regard et j'ai senti qu'ils m'encourageaient, leurs yeux pétillaient... Ils veulent de la fight, ils vont en avoir...
- COSMOS : Sarah, mets-toi au travail, espèce de tire-au-flanc !
- MOI : Je vais pas te faire ce plaisir espèce de macho décérébré...
- MANAGER : Va-t-en alors...
- SARAH : Justement j'allais foutre le camp, et vous laisser mariner dans votre friture... Je sais pas qui va faire la caisse ou récurer les toilettes, sachant que personne ne veut faire ces tâches-là ! Tout le monde est en train de glander en cuisine et Cosmos raconte des pauv' blagues sexistes, pendant qu'on trime en caisse... C'est pour ça qu'Ursule, elle vous a plantés...
- COSMOS : Elle peut pointer au chômage cette conne...
- SARAH : Elle est chef d'équipe au Burger King maintenant...

Les tronches du manager et de Cosmos se sont alors décomposées...
- COSMOS : N'importe quoi, ils embauchent plus, y'a trop de demande...
- MOI : T'as l'air bien au courant... T'as tenté ta chance ?
- COSMOS : Moi ? Mais non, euh non !
- MOI : Peut-être qu'ils embauchent que les meilleurs... De toute façon, ils ont des clients eux...
- MANAGER : Ça suffit !
- MOI : Oui ça suffit, j'en ai marre d'être maltraitée par Cosmos et ses copains ! Ici on vend du poulet, pas du boudin !

Hi-la-ri-té générale chez les clients, les deux types râleurs ont même applaudi...
- COSMOS : Qu'on te revoie pas venir quémander du travail ici...
- MOI : De toute façon, y'en a plus ! Moi je vais là où il y en a...
Je commence à sortir de la caisse, et le manager m'accompagne...
- COSMOS, continuant à m'insulter : Menteuse comme toutes les nanas...
- MOI : Tu veux que je te montre le SMS d'Ursule, tiens...

Le manager qui était en train de me pousser vers la sortie a alors ravalé sa salive et s'est figé, sa curiosité l'emportant sur sa colère. J'ai sorti mon téléphone et j'ai montré le SMS d'Ursule que j'avais reçu vendredi en le lisant à haute-voix: « Salut Sarah, c'est Ursule. Je suis chef d'équipe chez BK maintenant, et il y a plein d'opportunités là-bas pour des gens comme toi et pas de macho à l'horizon... Si un jour tu cherches du boulot, alors appelle-moi ! »

Cosmos et le manager en ont eu le bec cloué. Le manager est alors devenu poli :
- MANAGER : Bon Sarah, réfléchis hein, mais on te validera la journée de travail d'aujourd'hui quelle que soit ta décision...
- MOI : J'avais l'impression que c'était vous qui me mettiez dehors ! Bizarre ! Mais j'ai tout réfléchi, je veux plus qu'on me traite de boudin, ou de fainéante... Je veux plus subir les remarques de machos de Cosmos, je vous laisse entre mecs...

Il a fallu que je lance Burger King pour que le manager se mette à me respecter. Pathétique...

Quand je suis sortie du resto, les clients ont à nouveau applaudi, incroyable !!! J'imagine que c'est la première fois que les clients râleurs n'ont pas vu le temps passer dans leur file d'attente...

La fin de cette histoire a aussi contribué à me libérer d'un poids... La fin d'un cycle assurément. Mais est-ce vraiment la naissance d'un nouveau ?

Que dire dans un post quand il ne se passe rien... ?

Hé bien, c'est synonyme de bonheur... Je me réveille après une nuit de douze heures, il est midi.

La Mamie m'a mitonné un délicieux brunch : une tarte, des œufs à la coque, du jus de fruits frais, une salade pleine de choses de toutes les couleurs dedans... Il ne me reste plus qu'à aller acheter du pain frais.

Comme souvent, elle me fait une petite liste de courses, elle sait parfaitement ce qu'elle veut, le cerveau turbine toujours très bien ! Encore plus en cuisine.

Même le Chien est de bonne humeur et vif comme un chiot !

Après le repas de fête -qui a lieu tous les jours, midi ou soir ou les deux- nous regardons un peu la télé en zappant. On commente, on rigole... mais la Mamie ne peut pas s'empêcher de revenir sur son Michel Drucker... C'est le moment pour moi de me mettre au travail, très studieusement... jusqu'à ce post.

Aujourd'hui, je me sens soulagée, légère comme une plume... A cela s'ajoute un événement qui a eu lieu hier soir... Un petit bouleversement dans le monde de la friture et de la junk-food... Je vous raconte ça dans mon prochain post...

Voilà, c'est fait je viens de signer un pacte avec le diable. Et je ne me sens pas trop traumatisée...

- LE VIEUX : Si tu es venue, c'est que tu es d'accord...
- MOI : Est-ce que j'ai le choix... Je peux vous faire confiance ? Vous allez pas me mettre dehors dans un mois ?
- LE VIEUX : Je crois que j'ai autant besoin de toi que tu as besoin de moi... Ma carte bancaire est dans mon bureau sous le clavier de l'ordinateur. Voici mon code... Tu vas pouvoir payer très vite toutes les factures urgentes et tu m'envoies un mandat cash raisonnable tous les mois. De toute façon, ça ne durera pas longtemps, je serai transféré en juillet et tu seras majeure...
- MOI : Je suis pas au bout de mes problèmes, mon assistante sociale souhaite vous parler...
- LE VIEUX : Aïe... je pourrai l'appeler... comme j'ai pu le faire avec toi... et lui faire croire que je suis toujours avec toi...
- MOI : Oui ça m'irait très bien...
- LE VIEUX : Qui est cette vieille dame qui semble vivre avec toi ?
- MOI : Une dame du quartier, qui est en détresse, une âme esseulée comme moi... Je crois que j'ai trouvé qui était Diane... C'était votre sœur ?
- LE VIEUX : Oui, bingo...
- MOI : Elle était malade... Vous avez tenté de l'aider avec du cannabis ?
- LE VIEUX : Ce n'est que très récemment qu'un médicament à base de cannabis a été autorisé en France, elle souffrait le martyr, alors j'ai commencé avec quelques pousses, ça ne l'a pas guérie de son cancer... mais j'ai amélioré son quotidien comme ça.
- MOI : Mais vous vous êtes pas arrêté là...
- LE VIEUX : Ma sœur avait des connaissances qui étaient en difficulté comme elle... De fil en aiguille, un petit réseau s'est créé. Je ne suis pas un trafiquant de drogue. J'ai ma conscience pour moi. Même si finalement, avec la crise, c'est devenu ma seule source de revenus...
- MOI : Est-ce que le cambriolage qui a eu lieu il y a plus d'un an avait un lien avec vos cultures ?
- LE VIEUX : Non... mais pourquoi tu veux savoir ça ?
- MOI : J'essaie de comprendre... c'était le fruit du hasard ?
- LE VIEUX : Oui le fruit du hasard comme tu dis. Ils ne sont pas partis avec la marchandise, mais ils savaient qu'elle était là puisque la porte a été forcée... Le jour où ils se sont fait choper, ils ont dû me balancer pour atténuer leur sentence... J'ai tout de suite enlevé la marchandise après le cambriolage en tout cas... mais le retour de bâton a tardé et j'ai baissé la garde...
- MOI : Oui je me souviens, la pièce était vide...
- LE VIEUX : Tu vois, t'es une petite fouineuse..., on peut rien te cacher...
- MOI : Je veux comprendre où je vis et avec qui je vis... Je voudrais savoir ce qui s'est passé pour votre fille...
- LE VIEUX : J'aurai pas mal de choses à te raconter le jour où je te ferai vraiment confiance, même des choses te concernant...
J'ai pas compris ce qu'il voulait dire par là... Mais je n'ai pas plus creusé. Sûrement un appât pour que je rentre dans son jeu.
- LE VIEUX : En tout cas tu peux compter sur moi, donne-moi le numéro de ton assistante sociale...

Dès ma sortie de taule, je suis allée dans une agence EDF pour payer l'électricité immédiatement. Le courant est revenu deux heures plus tard, au grand soulagement de la Mamie.

J'ai appris énormément de choses encore aujourd'hui. Les Vieux dévoilent peu à peu tous leurs mystères, mais je pense que je ne suis qu'à mi-chemin. Notamment sur le destin tragique d'Émilie... qui a dû briser leur vie.

Tout ça est un répit provisoire... je le sais bien. Avec la photo de la Mamie placardée dans le quartier, sa famille qui la cherche, Rondin qui l'a rencontrée dans l'appartement... Quelqu'un va finir par découvrir le pot-aux-roses...

Mais pour l'instant je savoure...

Le Vieux doit vraiment être acculé. Je me souviens de la fin de notre conversation il y a 15 jours :
- MOI : Je me demande pourquoi vous faites appel à moi, je sais très bien que vous me croyez coupable d'avoir poussé votre femme...
- LE VIEUX : Ma femme m'a assuré que ce n'était pas toi, elle me l'a redit avant de partir loin, elle m'a assuré que je pouvais te faire confiance... Si elle le dit...
- MOI : ELLE A DIT CA ?

Ma pire ennemie a dit qu'on pouvait me faire confiance ??? Décidément, la vie est pleine de surprises, et les gens aussi...

En vérité, le Vieux ne me fait pas plus confiance que ça... Il n'a trouvé que moi ! Il doit être désespéré.

De mon côté, c'est un peu pareil... je n'ai trouvé que lui pour nous sortir de ce pétrin ! Même si mes blogués ne sont pas tout à fait d'accord...

Je ne lui fais pas du tout confiance, je le soupçonne même encore d'avoir poussé sa femme, lui-même, et de tenter de me faire porter le chapeau.

Voilà un pacte qui commence bien : deux partenaires forcés qui n'ont que des doutes l'un sur l'autre...

Pffffff... Je voudrais avoir une vie d'ado normale.

Un de mes fidèles blogués m'a écrit récemment : « je me demande si ce n'est pas un roman. :) ». Je me le demande aussi... Peut-être suis-je une héroïne de fiction sans le savoir, sans aucun contrôle sur mon destin ? Je maudis alors celui qui tire les ficelles de ma vie...

Je souffle sur ma bougie et je vais dormir. En espérant que « mon auteur » ne sera pas trop pervers avec moi...

Je me prépare à mon entretien de demain, « entre quatre murs ». L'issue est écrite d'avance...

Quand je suis rentrée ce soir vers 18h30, la Mamie était en train de boire un verre avec... Mme Rondin.

Hé oui, mon assistante sociale a mis ses menaces à exécution, elle s'est pointée à l'improviste. (cf post du DIMANCHE 30 MARS 2014 11H45)

Pourtant l'ambiance a l'air d'être bonne. Je ne sais pas trop ce que la Mamie lui a raconté, mais comme j'ai annoncé la couleur, il n'y a pas trop de danger... (cf post VENDREDI 21 MARS 2014 19H45 : TRONC ET RONDIN DE BOIS). En gros j'ai dit à Rondin que la Mamie n'avait pas toute sa tête...

Rondin m'a prise à part immédiatement :
- RONDIN : Bon elle n'est pas en si mauvaise forme cette dame... T'es sûre qu'elle est malade ? Bref ce n'est pas le sujet de ma visite. Mais où est donc ta famille d'accueil ? C'est comme s'ils avaient disparu !
- MOI : Ben la dame elle est partie voir sa sœur...
- RONDIN : Et monsieur B. ?
- MOI : Beaucoup de travail, mais je vous promets qu'il vous appelle demain...
- RONDIN : Lundi matin ! Moi aussi j'ai droit à un week-end... Tu as l'air en forme tu as minci..

C'est la première fois qu'on me dit ça depuis que je suis née... les soucis peut-être ? En plus la Mamie cuisine très bien et me nourrit comme une princesse...

- RONDIN : Je ne suis pas très contente de tes derniers résultats scolaires... Tes professeurs disent que tu peux mieux faire...
- MOI : J'ai eu plein de soucis... et puis j'ai un petit job...
- RONDIN : Tu devrais te concentrer sur le bac... Et puis tu ne m'as jamais communiqué tes notes de bac français... C'était pas trop catastrophique ?
- MOI : Juste assez...
- RONDIN : La moyenne quoi... pas d'avance ! Bon essaie d'avoir ton bac quand même la 1ère fois, s'il te plaît.

Finalement, je m'en suis bien sortie... mais avec une collection de mensonges. Je ne suis même pas sûre que le Vieux puisse appeler la mère Rondin lundi.

Mon mensonge le plus surprenant ? Mes plus fidèles le savent bien... Sûrement une erreur de correction !!! En plus l'oral n'a pas contredit l'écrit... Je n'en parle pas, j'ai peur que ça me porte malheur... et puis surtout, depuis que le Proviseur sait, il me met une pression d'enfer. La pression ça suffit !

Heureusement qu'il y a eu le changement d'heure dimanche dernier. Il faisait encore bien jour quand Mme Rondin est passé. Une heure plus tard, à l'heure où j'écris, il fait sombre. Mme Rondin n'aurait pas compris qu'on n'allume pas la lumière et qu'on reste dans le noir... Oh j'aurais pu lui faire croire que j'étais devenue juive ;-). Sérieusement, on a frôlé la cata, encore une fois...

Je me suis levée avec une angoisse terrible sur moi : comment payer cette note d'électricité ?

Il y a 100 euros sur mon compte, la Mamie ne se souvient pas du code de sa carte bancaire. Alors elle pourrait faire un chèque peut-être ? On tente le coup ! Même si je pense que ses comptes sont bloqués... Je pourrais aller dans une agence porter le chèque, mais ça serait le meilleur moyen de se faire repérer (« mais vous êtes qui ? », « c'est un chèque volé... »). Donc je vais l'envoyer par la poste, mais on n'est pas près de retrouver notre électricité, à ce rythme-là.

La Mamie est, quant à elle, beaucoup plus stressée qu'hier par l'absence de courant : « Mais comment je vais faire pour les Feux de l'Amour ? Je pourrai pas te raconter ce soir... c'est terrible. Mais on est vraiment dans une société pourrie aujourd'hui. Couper l'électricité à une vieille dame comme moi c'est honteux ! Mais comment tu vas faire sans ton résumé des Feux ? Nom de nom...»

Je n'ose pas lui dire que je m'en fous des Feux, mais c'est vrai que j'aime l'écouter me résumer l'épisode du jour, critiquer l'invraisemblance des intrigues, le changement intempestif des comédiens pour un même personnage, les décors intérieurs au goût douteux. J'aime la voir aussi vivante et passionnée... C'est ce qui nous a liées au début...

Voilà l'état d'esprit dans lequel j'étais en partant ce matin. Je regarde tous les élèves qui composent ma classe. Et je me dis que personne n'a les mêmes soucis que moi. Personne ne s'est levé ce matin sans électricité à la maison. Personne n'a la responsabilité d'une douce petite Mamie qui est devenue le centre de mon monde en quelques semaines. Personne n'a eu à affronter ce mystérieux couple de Vieux qui sont loin d'avoir livré tous leurs secrets.

Oui personne n'est orphelin ici. Finalement toutes mes péripéties partent de là.

Il y a encore deux ans, je me disais que j'avais la vie la plus ennuyeuse du monde. Et je rêvais d'avoir la vie d'une héroïne des Feux de l'Amour !

Mais depuis quelques mois, je me demande si je n'ai pas été exaucée, et j'aimerais retrouver une vie ennuyeuse. Oui, il est temps de calmer un peu les flammes des « Feux » même si ce sont loin d'être ceux de l'Amour...

Quand je suis rentrée, la Mamie lisait tranquillement son télé 7 jours collée à une fenêtre... Je me suis étonnée de ne pas la voir regarder la télévision...

« Le courant a sauté, les plombs ont sauté... et je ne sais pas les remettre en route, j'attendais que tu rentres... et ça m'a fait rater les Feux de l'Amour », m'annonce-t-elle avec un profond désarroi.

Je me précipite sur le tableau, et me voilà partie à appuyer sur tous les boutons, ceux que je connais un peu et ceux que je ne connais pas du tout... Aucun signe de lumière...

Et là je suis prise d'une angoisse... Et si EDF avait coupé l'électricité suite à tous nos impayés...

Patatras...

J'appelle David pour qu'il me donne des astuces sur le compteur, mais rien n'y fait. Il propose de se déplacer : NOOOOOOONN, RESTE CHEZ TOI ! Enfin je lui dis ça plus poliment.

Je vais voir dans la boîte aux lettres et là, confirmation... ERDF a laissé un message...

Au menu gastronomique ce soir : boîte de conserve froide, fromage chaud, yaourt tourné... Pas de télé, pas de recharge de ma tablette ni de mon téléphone... La dèche !

La Mamie a tenté de me rassurer : « Tu sais quand j'étais petite, c'était la guerre et il y avait souvent des coupures d'électricité, on peut très bien vivre sans électricité. Et puis tout le monde n'avait pas d'électricité... Moi par exemple en Italie... »

Elle s'est alors arrêtée net, et est partie faire autre chose. Ouh la la...

Mais finalement cette soirée à la bougie a été très supportable : j'ai lu pendant qu'elle faisait des mots croisés. La télé nous réunit mais nous rend silencieuces. Là c'est le silence qui nous a réunies et qui nous a rendues bien plus bavardes...

C'était rigolo et ludique... Mais ce n'est pas viable... la vie n'est pas qu'un jeu!

Je croyais en avoir fini une bonne fois pour toutes de cette comédie musicale qui ne veut pas de moi, ben non.

Alors c'est pas pour me proposer un rôle. Fallait pas rêver.

Mais pour faire les choristes en coulisses... Ça c'est vraiment un job valorisant qui signifie...
« Vous avez un physique de coulisses »
« Votre voix est juste bonne à soutenir les autres »

J'apprécie la proposition que j'aimerais bien décliner... le bac d'abord ! Mais j'avoue que j'aimerais bien être une petite souris pour voir la suite de l'histoire, les crêpages de chignon, les extinctions de voix, les peaux de banane...

Une petite humiliation, certes, mais pour un petit plaisir hebdomadaire...

Ce ne sont pas mes blogués qui diront non...

Un truc m'inquiète depuis quelques jours, plus précisément depuis lundi... Cette conversation que j'ai surprise au Rialto... (cf post du LUNDI 31 MARS 2014 18H05 : L'AFFICHE)

J'ai fait des recherches sur la maladie d'Alzheimer... Effectivement les symptômes décrits sur Internet pourraient ressembler à ce que je vois au jour le jour avec la Mamie... Elle oublie des choses du quotidien, des choses à très court terme. Comme l'autre jour quand elle sortie des toilettes alors qu'elle devait y rester cachée... ou quand elle s'est échappée de la cave vers le parking...ou quand elle est sortie dans la rue et s'est fait repérer. Elle est assez incontrôlable, je l'avoue. Mais quel danger y a-t-il vraiment à ça ? A part celui de se faire prendre ?

Je décide quand même d'aborder le sujet tout en délicatesse – vous me connaissez, baleine jusqu'au bout des ongles - . La Mamie est en train de fouiner dans un tiroir et regarde des photos :
- MOI : Vous savez ce que c'est la maladie d'Alzheimer ?
- MAMIE : C'est quand on perd la mémoire et qu'on finit par tout oublier. Pourquoi tu veux savoir ça ?
Elle me regarde et je respire la gêne...
- MAMIE : Ne me dis pas que tu crois que j'ai Alzheimer...
- MOI : Je dis rien moi... je crois rien.
- MAMIE : Qui dit ça alors ?
- MOI : Ben j'ai entendu votre belle-fille...
- MAMIE : La garce, tout ça parce que je me suis trompée de prénom une ou deux fois... Je vais aller lui dire !!! Elle va voir de quel bois je me chauffe...
- MOI : Oh non surtout pas, elle sait pas que vous habitez ici...
- MAMIE : Ah oui c'est vrai... Bon je te l'accorde j'ai des absences... Mais le médecin m'a confirmé que c'était pas ça... Et puis j'ai encore une excellente mémoire, mais elle est sélective c'est tout , elle ne se rappelle que ce qui l'intéresse... Tiens pour preuve, là, la dame en photo...
- MOI : Oui c'est la Vieille... euh la dame de la famille d'accueil...
- MAMIE : Elle a vieilli, elle avait une fille charmante, ça je m'en souviens, une fille un peu comme toi...
- MOI : Vous voulez dire grosse et moche ?
- MAMIE : Mais de quoi tu parles, t'es pas... Elle était très mince, la peau sur les os, ça c'est vrai... Mais surtout, elle était adorable comme toi, avec moi... Un jour elle a disparu, on n'a jamais su pourquoi...
- MOI : Vous pensez qu'elle est morte ?
- MAMIE : Pourquoi veux-tu qu'elle soit morte ?
- MOI : C'est ce que m'a dit le Vieux, ou plutôt ce que j'ai compris...
- MAMIE : Y'a un truc qui me revient, elle est femme de ménage cette dame là ? Celle que tu appelles la Vieille...
- MOI : Euh, non je crois pas...
- MAMIE : Je me souviens d'un jour, il y a peut-être quelques années, où elle nettoyait le tapis ici dans l'immeuble...
- MOI : Ah bon ? Elle aurait été gardienne ici par exemple?
- MAMIE : C'est un jour où j'étais allée voir Marco, mon petit-fils chéri... Oh comme il me manque...
- MOI : C'était y'a pas si longtemps alors ?
- MAMIE : De quoi ?
- MOI : La Vieille, la dame en photo, qui nettoyait le tapis...
- MAMIE : C'était sur un palier, elle avait un seau rouge, elle frottait, frottait, frottait encore... le tapis rouge !

Beaucoup d'infos, mais je ne sais pas si c'est bien utile... En tout cas, elle a des souvenirs, plein de souvenirs... et des souvenirs précis. N'est-ce pas contradictoire avec Alzheimer ? Et si elle ne l'a pas, les propos de sa belle-fille prennent un nouveau sens...

Sacrebleu : je devrais profiter de sa présence pour lui montrer le bracelet. C'est ce que je voulais faire avant qu'elle parte en maison de retraite il y a quelques mois... Et puis j'ai oublié, ça m'est sorti du cerveau... Il faut dire que j'ai rééchelonné mes priorités ! Est-ce encore vraiment important ?

L'important est de profiter du peu de temps qui nous reste...

A la pause de l'après-midi, en pleins Arts Plastoc, je retrouve les deux Cailleras paniquées dans les couloirs :
- MOI : Ça a pas l'air d'aller...
- TINA : C'est une cata...
- FATIMA : C'est la fin du monde, zi end of ze world
- MOI : Vous m'inquiétez...
- TINA : C'est sur Alyssa...
- MOI : Ah bah c'est pas grave alors... On s'en fout de celle-là !
- FATIMA : On l'a vue...
- TINA : Oui on est tombées sur elle à la sortie du McDo...
- MOI : Honte à vous d'aller manger au McDo tous les midis...
- FATIMA : On s'en fout ! Ben Alyssa, elle sort avec le nageur...
- TINA : Avec Grégoire... Berk !!!!!!!!!!!!!!

Je me décompose...
- MOI : Où ça précisément ? Comment ? Ils faisaient quoi ? Vous êtes sûres ? Vous avez vu quoi ? Ils avaient vraiment l'air d'être ensemble ? Leurs regards, ils disaient quoi ? Ils se dévoraient des yeux ?
- TINA ET FATIMA en choeur : Poisson d'avril !!!!
- MOI : Bande de grosses morues, il est tout pourri votre poisson !
- TINA : On avait que ça au congèl...

Elles ricanent bêtement, et finissent par me faire rire.