« C'est moi... » ai-je annoncé laconiquement à l'interphone.

Il a dû reconnaître ma voix tout de suite, il a débloqué la porte. Je m'y suis engouffrée, avant de me demander à quels étage et porte je devais aller.

La preuve que nous étions un peu troublés, lui et moi.

Des choses à se reprocher, David ???

Bon je suis retournée à l'entrée pour sonner...

- MOI : T'es où ?
- DAVID PAR INTERPHONE : Ah... tu sais pas ? Euh enfin oui, c'est normal...

1 minute plus tard, j'arrive devant sa porte déjà ouverte. Il m'accueille avec un sourire. Son appartement minuscule est encombré de livres de maths, de physique, de chimie. Des trucs que je ne lirai jamais.

Je regarde un peu partout. Il y a un lit en mezzanine et un petit canapé dessous. Aucune trace de Ash en tout cas.

Mais surtout aucune odeur douteuse de cigarette, et encore moins de celle qui fait rire (ou pleurer plutôt).

On a dû mal à engager la conversation. Il sent que je décortique son appartement.
- DAVID : C'est pas aussi luxueux que chez toi...
- MOI : Je sais que j'ai de la chance.
- DAVID : Comment t'as retrouvé mon adresse ? Personne la connaît... Ah si... C'est Ashley qui te l'a donnée, non ?
- MOI : Non c'est pas Ash, mais bon c'est tout comme... En fait je la cherche.
- DAVID : Ah...

Il a l'air gêné. Ou peut-être déçu ?
- MOI : Elle est partie avec ma connexion Internet...
- DAVID : Ah...
- MOI : Tu as l'air bien ici...
- DAVID : Oui je vis dans mes livres et mon ordi. Et... j'ai fumé qu'une fois ces derniers mois, et pas ici.

Je suis surprise qu'il me balance ça comme ça. Mais je ne me détourne pas de mon objectif premier.
- MOI : Tu sais où je peux la trouver ? Chez toi, c'est la dernière adresse qu'elle a laissée...
- DAVID : Ben c'est tout simple. T'aurais dû essayer là-bas avant de venir ici...
- MOI : Qu'est-ce qui peut être aussi simple ? J'ai tout essayé... Elle est restée ici ?
- DAVID : Oui, une dizaine de jours, je pense. Tu la connais, elle s'est encore mise dans une situation à dormir debout. Elle peut pas s'empêcher d'être hypnotisée par les hommes riches. Sauf que celui-là, il avait pas complètement quitté sa femme. T'imagines même pas quand l'épouse est revenue au bercail.

Ça m'a fait rire. Puis lui aussi. En moins d'une minute, notre complicité a rejailli.

Il m'a sorti un pot de Nutella du placard avec une brioche industrielle, et on s'est gavés !

« Désolé j'ai qu'une cuillère ici ». Nous l'avons partagée !

- DAVID : Et toi ça va ?
- MOI : Ben j'ai un peu raté mes partiels. Mais je me suis trouvé un petit boulot qui me ressemble plus que le poulet frit.
- DAVID : T'as vu, ils vont interdire les fontaines à soda illimitées.
- MOI : Ah bon ils font ça dans les fast-foods ?
- DAVID : Ben oui, dans les KFC. C'est pour ça que j'y vais 3 fois par semaine, à Barbès.
- MOI : J'y vais plus, moi, ça me donne des boutons.

Une fois le pot et la brioche terminés et les babines redessinées aux traces de chocolat...
- DAVID : T'as retrouvé des colocataires ?
- MOI : J'ai pas cherché.
- DAVID : Avec ton petit boulot, t'as pas besoin...
- MOI : Ça me rapporte pas grand chose, y'a de la concurrence, tu sais.

Après ces retrouvailles accélérées, une nouvelle gêne s'est réinstallée entre nous. Après avoir éclusé les sujets les plus joyeux, il ne restait que les points de discorde auxquels nous n'avons pas osé nous attaquer.

Du coup, j'ai fini par conclure en revenant à l'origine de ma visite...
- MOI : Je suis même passée chez ton père pour la retrouver. Allez dis-moi où elle se cache, la peste !
- DAVID : Ben le plus évident...
- MOI : Dis-moi !
- DAVID : Chez sa mère !!!
- MOI : Chez sa mère ??? J'y suis passée il y a une semaine...
- DAVID : Vous vous êtes croisées alors...

Alors ça...

Tout ce manège pour revenir au début !!! Un beau pied de nez du destin ! Et une sympathique petite expédition sur plusieurs épisodes durant une semaine !

Ne me restait plus alors qu'à aller pêcher l'Arlésienne chez sa mère... C'était vendredi dernier.