J'ai vécu 16 ans d'égoïsme. Alors je me suis dit qu'il fallait varier les plaisirs. Et un acte généreux dans ma vie ne me ferait pas de mal...

A 17h19, le Proviseur est derrière le rideau et s'extasie devant les stars. Et il va traîner. Et il va s'émerveiller. Et il va arriver de notre côté dans pas d'heure ou bien même nous oublier ? A quoi bon...

J'étais de corvée de martelage de clous derrière les toits de Paris et je suis allée voir les geeks :
- J'ai une grosse urgence, dites que je suis partie chez le médecin ou n'importe quoi...
- Mais t'es folle, et le Proviseur ? réagit un des geeks, inquiet...
- Couvrez-moi, please, please...pleaaaaase

J'étais déjà partie par une issue de secours en gambadant alors que je les suppliais encore. J'ai envoyé un SMS à David : « j'arrive ! ».

Ma décision est prise et j'assumerai toutes les conséquences... et vous, qu'en pensez-vous ? Quel choix ai-je fait finalement ?...

Voilà que je recommence avec les « 2 » : 17h02, 17h12...

Et le Proviseur n'est toujours pas là, David a rendez-vous dans 30 mn, j'ai 25 mn de métro+marche... et j'avance pas hyper vite... c'est la catastrophe !!! Il va falloir que je fasse un choix et vite... C'est plus la prof ou David, c'est David ou Moi !

« Bon je compte sur votre motivation aujourd'hui car nous avons la visite surprise du Proviseur ! Il va passer pour voir si ses sous sont bien employés ! Alors tous au boulot, faut que ça ait l'air de travailler. Il sera là dans 5 minutes ».

Mince ! Pour ne pas dire autre chose ! C'est la guigne !

Si le Proviseur voit que je suis absente, il va me donner une vraie punition et va m'envoyer chez le psy. En effet lors de l'entretien c'était un genre de «libération conditionnelle pour bonne conduite future ». Si je respecte pas le marché, c'est la guillotine. (cf post du lundi 3 décembre 2012)

J'ai stressé toute la journée pour mon micmac. En plus David avait un peu arrondi l'heure de son rendez-vous car aujourd'hui il me dit que c'est à 17h45. Il voit sur mon visage que ça me perturbe et se détourne de moi. Alors je le rattrape et je lui promets que je serai là. Sans moi il est capable d'abandonner, je sens bien qu'il a de gros doutes sur la démarche... Et moi aussi !

Mais un truc à l'heure du déjeuner m'a mis la pression : les geeks m'ont dit à table qu'une rumeur annonçait la visite du Proviseur en début d'atelier... Voilà pourquoi la prof voudrait que je sois là au début ? Elle qui a l'air si laxiste d'habitude...

Je crois que la Vieille a arrêté de manger, c'est sa bonne résolution 2013 et elle entend la faire partager à tout son foyer. Au menu ce soir :
- méli mélo de salade verte, vinaigre en option, l'huile n'est pas sur la table.
- jambon sous plastique sans couenne, une tranche par personne.
- wasi wasa fait office de pain.
- yaourt nature (il n'y a plus de sucre)

Il a fallu que je fasse une remarque :
- C'est très light ce soir...
- Le dîner, on doit manger léger.
- Le problème est que le midi je mange léger aussi...
- T'as qu'à prendre un bon petit déj...
- Y'a quoi ?
- Des fruits, des céréales.
- Special K c'est pas très nourrissant.
- De toute façon t'as un peu d'avance et des réserves...

J'ai pas relevé. C'est pas digne d'une bonne-femme qui a un agrément des services sociaux. Avant de partir, j'aimerais bien lui faire sauter, son agrément et sa petite source de revenus... Elle m'a un peu vexée car elle ne va pas souvent sur ce terrain-là avec moi, elle est visiblement dans une phase sombre... et la nourriture est la partie visible de l'iceberg...

Moi qui commençais à avoir pitié... elle n'en vaut pas la peine.

Ça a marché mais ça se complique un peu :

- David a rendez-vous à 18h avec son addicto-machin à 25 mn de l'école, et il a l'air terrifié d'y aller.

- En cours d'arts plastoc j'ai prévenu la prof que j'avais un rendez-vous médical, elle m'a demandé l'heure du rdv, j'ai pas eu la présence d'esprit de mentir et j'ai donné la véritable heure... et du coup elle m'a demandé d'être là en début d'atelier car je suis indispensable... normal je suis toute seule. On ne peut décidément pas la flouer comme ça, celle-là. Et puis c'est flatteur d'être « indispensable ».

Ça va se goupiller parfaitement, j'en suis sûre... Et en plus si je pouvais être dispensée de sport : d'une pierre trois coups ! Je fais plaisir à tout le monde, même à moi-même.

Cette cheville n'est pas très confortable, mais je me demande si je vais pas finir par en faire un atout dans mon dilemme de jeudi soir... Évidemment quitte à choisir, je préfère quand même soutenir David. Je vais réfléchir à mon plan...

J'ai un bandage, je mets de la crème, je me déplace lentement mais c'est pas insurmontable. Tout est réuni pour faire pitié tout en gambadant secrètement...

Oui je suis en train d'écrire en cours de sports et la prof pète un plomb devant la nullité ambiante. Elle vient de nous punir à courir non-stop jusqu'à la fin du cours. Mais j'ai rencontré un petit obstacle imprévu...

Trente minutes après le début de la tentative de cours, la prof a grillé son dernier neurone : « Vous êtes une bande de branquignoles. Vous ne ferez jamais rien de votre vie. La gym c'est le plus beau sport qui existe, avec des valeurs magnifiques. Avec vos cerveaux de petits pois vous n'avez rien compris. Il reste quoi une heure de cours. Tous en endurance pendant une heure !!!!! »

Ça a hurlé dans tous les coins ! « C'est un boot camp ce cours et elle c'est Rambo ! ». Très drôle cette remarque de Quentin (jean Diesel, le délégué, victime de ma super-glue) et puis il n'arrêtait plus, voyant son succès : « elle marche aux stéroïdes » « elle a dû avoir une médaille en Allemagne de l'Est »

Réaction de la prof qui sentait bien qu'on se foutait de sa gueule : « la petite fashion victim, cinquante pompes et les autres, au galop !!!! ». Ce qu'elle a dit à Quentin et le ton employé très féminin étaient un peu douteux, un peu homophobes... mais il se foutait tellement de sa gueule. Qui a raison ? Qui a tort ? Peut-on excuser l'homophobie dans ce cas ?

Bref je ne répondrai pas à ça aujourd'hui. Mais j'ai une histoire à raconter !!

Alors qu'on tourne tous en rond et que je me fais lentement mais sûrement rattraper, en tant que dernière, par les premiers, les deux pestes finissent par me rattraper et attirent l'attention sur moi : « madame, madame, y'en a une qui fait semblant de courir ». Ce qui fait bondir la prof : « les tortues courront plus longtemps !».

Les deux Pestes ont ricané en se regardant. Mauvaise idée car quand on se regarde, on ne regarde plus la route... Et comme elles étaient collées provisoirement derrière moi (avec un tour d'avance je précise), il y a eu un petit accident dont je ne suis pas responsable : j'ai eu l'impression que les deux filles se sont emmêlés les pieds l'une l'autre, l'une des deux a perdu l'équilibre avant de se rattraper sur moi et sur mon talon, j'ai à mon tour perdu l'équilibre avant de finir dans le décor, à grand fracas.

Une fois par terre, je me relève et là, impossible de poser ma cheville gauche au sol. La prof me hurle dessus mais voit ma douleur, regarde ma cheville et crie « entorse !».

Et voilà !!! Tel est pris qui croyait prendre. Alors que je me prélasse sur les gradins, les Pestes en sont à leur vingtième tour et me détestent. Je ris mais je souffre en même temps, ma cheville est gonflée.

Soit j'invente une excuse bidon à David, soit j'invente un excuse bidon à la prof d'Arts Plastoc pour l'atelier décors. Je ne peux pas leur dire la vérité même si c'est ce que recommanderaient mes fidèles lecteurs...

« David, plutôt que d'aller avec toi à un rendez-vous qui va te sauver la vie, je dois aller faire joujou avec du papier mâché et transformer Paris en Shanghaï pour mettre en valeur la sublime Alyssa »
« Madame, j'ai un pote complètement drogué qui est d'ailleurs mon voisin de table en classe et je dois lui tenir la main dans la salle d'attente d'un addicto-truc, sinon il va faire une overdose de fumette. »

Et pourtant, je vais devoir planter soit l'un soit l'autre.

Si je fais le bilan de la personne qui m'a le moins déçue :
- Mme Arts Plastoc, toujours encourageante avec moi et je me demande si elle m'a pas sauvé la mise pour la bougie destructrice de Noël...
- David : des déceptions, des changements d'humeur, des montagnes russes, bref zéro fiabilité !

Qui va me plus servir à l'avenir ? (oh horrible question, mais j'ai beau être pas trop méchante, parfois...) Ben la prof ... le bac...

Posons la question différemment. Qui pourrait faire partie de ma vie le plus longtemps possible ? Ben la prof je la vois 3 heures par semaines et dans un an et quatre mois c'est fini. David je le vois huit heures par jours, cinq jours par semaine, parfois plus... et peut-être qu'une amitié ça dure après le lycée...

Oh là là j'ai le cerveau qui fume et les adultes qui me lisent (ceux qui n'ont pas décroché) doivent être navrés...

Ben oui des fois j'ai vraiment 16 ans...