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16 ans, grosse & moche!
10 juillet 2014

JEUDI 10 JUILLET 2014 17H : SARA N...

Oui c'est bien moi que le Proviseur a appelée avec tous ces superlatifs.

La salle entière se retourne dans la direction du regard du Proviseur. Je suis rouge comme une tomate. Je n'arrive pas à bouger.

Tina, Fatima, Ash sont collées à moi, éberluées. Elles finissent par se cacher derrière moi.

Un élève hurle : « On a trouvé Conchita Wurst ! ». La salle se met à applaudir avec ferveur. Je vois des sourires partout. Des sourires inconnus. Je vois Cécile la secrétaire du Proviseur, des étoiles dans les yeux, se tenant debout à ses côtés. Je vois le Proviseur qui me fait signe de le rejoindre. Je vois les 3 Pestes se disputer. Je vois David la main sur la bouche, me faire un petit signe plein d'émotion. A-t-il assisté au spectacle hier soir ?

Je commence ma lente descente vers l'estrade toujours sous les applaudissements... Je me demande s'ils applaudissent Conchita la femme à barbe, ou la bachelière avec mention.

J'avoue que ce moment est violent, moi qui ai toujours eu l'envie de me cacher et de ne jamais me prendre au sérieux. Je devrais savourer une forme de revanche... mais ce n'est pas ça du tout. Je me répète sur le chemin de l'estrade que j'ai eu de la chance, je sais qu'il n'y a pas que ça, mais je n'arrive pas à me raisonner complètement. Et puis il y a eu un événement juste avant le bac qui m'a secouée, qui m'a portée aussi, c'est la disparition du Chien. C'est bête mais ce petit être qui vivait pour moi a beaucoup compté. Alors je pense à lui et je le remercie, il ne m'a pas « attendue » comme l'espérait une de mes chères bloguées. Mais il m'a protégée durant toute cette semaine d'épreuve, j'en suis persuadée.

Quand j'arrive sur l'estrade, j'affronte cette foule qui a l'air surprise, étonnée et bienveillante. Les trois morues continuent de se chamailler dans un coin. David me fixe, il me brandit son poing en guise de victoire. Je lui souris.

Ash, Tina et Fatima sont restées dans les gradins, je crois qu'elles pleurent... C'est très très touchant pour moi... Je crois que je ne contrôle plus les larmes. Cécile me prend dans ses bras puis le Proviseur, qui m'entoure de nombreux « Bravo Sarah ! Bravo ! ».

Au premier rang, je vois des professeurs bouche bée qui me découvrent totalement alors que moi je les connais parfaitement. Je vois le CPE qui se gratte la tête, sûrement très circonspect. Il parle avec la prof de sport, certainement aussi perplexe. Si, dans cette seconde, je l'avoue, j'ai un petit goût de revanche face à ces deux-là.

« Chers lycéens, chers futurs étudiants... »

Dans un coin de l'auditorium, mon œil de lynx remarque la présence totalement inattendue de Yunso. Elle tient le bras d'une dame... qui se cache derrière des lunettes et un châle... On dirait une vieille star hollywoodienne... Oh non... C'est bien Elle... Elle est venue... Quelle plus belle récompense de partager ça avec Elle. S'est-elle échappée ???

« ... je vous souhaite une très très très belle vie, pleine d'ambitions assouvies et d'accomplissements personnels et professionnels. Je souhaite laisser le dernier mot à notre meilleure bachelière... Sarah ?»

Que dire face à tous ces gens que je ne connais presque pas ? Et qui me découvrent plus ou moins aujourd'hui ?

J'ai une pensée pour la fille qui était assise à côté de moi en salle d'examen, qui n'a pas été admise et qui a créé cette confusion sur le panneau d'affichage, me faisant perdre quelques jours de joie... Mais cette joie n'en est que meilleure aujourd'hui.

« Bonjour... »
Le micro siffle évidemment. Ça n'arrivera toujours qu'à moi.
« Je remercie mes amis, je pense à 4 personnes, ils se reconnaîtront ».
Fatima et Tina se mouchent bruyamment, Ash les prend par le cou et leur intime de se taire.
« Je remercie les gens qui m'ont poussée à bout, ils se reconnaîtront aussi. »
Les 3 morues tirent une gueule pitoyable d'aigreur dans leur coin.
« Et puis bah j'ai une pensée pour Sara Nicolaï... »

Quelle meilleure fin que celle que personne ne peut comprendre, à part moi et mes pires ennemies. Une fin décalée comme moi !

Un moment qui restera gravé en moi à jamais. Un moment rien qu'à moi, rien que pour moi. Un moment sur lequel me reposer désormais et qui me donnera confiance à chaque instant de la vie. Un cadeau inestimable dont je prendrai soin jusqu'à la fin de la belle vie, jusque là cachée, qui m'attend...

Oui, elle va être belle, ma vie.

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