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16 ans, grosse & moche!

2 octobre 2012

MARDI 2 OCTOBRE 19h45 : NAISSANCE D'UN BLOG

Je suis chez les voisins, je tape sur le clavier, j'éponge les blessures, je réfléchis à l'avenir. Il y a une effervescence dans cet appart'. Ça vient, ça repart. Ils me disent bonjour, me font sentir que je ne les gêne pas même si on ne se parle pas.

Je dois maintenant faire quelque chose de cette tranche d'âme numérique qui ne pèse pas bien lourd en kilo-octet. L'excitation des Pestes sur mon cahier, hier, montre bien qu'elles ne l'ont jamais lu en détail. Mais si elles ont monté de toute pièce cette fleur999, c'est qu'elles ont lu le message anonyme. Et en plus comme elles sont ignobles, elles ne me l'auraient jamais rendu. A moins qu'elles l'aient carrément écrit?? Un pur stratagème pour me faire enrager, orienter ma vie, observer l'impact de leurs actes dans ma vie? Mais quelle perversité! Je suis un rat de laboratoire pour elles?

Je sais que Fleur999@gmail.fr n'existe pas. Mais peut-être que l'auteur du message anonyme existe bien? Il y a bien peut-être quelque part, une autre « grosse et moche » comme moi? Si cette personne me lit et me confirme chaque jour qu'elle me comprend, quel bonheur! C'est pour ça que je dois faire l'effort de partager ma vie avec des inconnus, qu'on se soutienne. Je veux que quelqu'un se reconnaisse en moi, mais je ne veux pas que quelqu'un me reconnaisse. Est-ce que j'y arriverai?

C'est le propre d'un blog anonyme. Je vais l'appeler « grosse_et_moche.quelquechose».

Vite c'est Mentalist. La Vieille est couchée, le Vieux dans son bureau, la télé est à moi! Je veux savoir qui est John le Rouge. Je suis trop fan de cette série. J'aimerais trop que le mentaliste embrasse la fliquette. On en est loin. C'est toujours tellement beau un baiser américain. Ça n'existe que là-bas : ici les adultes ne s'embrassent pas on dirait, et les jeunes se broutent la langue comme des moutons.

Ah House et Cuddy, Nicolas Newman et Sharon, Booth et Bones, Grey et Dr Mamour... c'est tellement beau à voir ces couples qui se cherchent, se perdent, se retrouvent, se volent un baiser... Faut habiter à Hollywood pour faire des beaux baisers et être amoureux. Pas chez nous!

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1 octobre 2012

LUNDI 1er OCTOBRE 21h15 : REINE DU SKATE

Je viens de vivre une fin de journée en montagnes russes.

Je sentais que les deux Pestes lorgnaient depuis quelques temps sur son mon cahier d'écriture. Juste à la sortie du lycée, alors que je réorganisais un peu mon sac et que je tenais provisoirement mon cahier dans la main, un type me bouscule violemment, la cahier vole de trois mètres et tombe dans une flaque d'eau. Les Pestes, toujours au bon endroit et au bon moment, mettent la main dessus et s'enfuient dans la rue. Je repère la direction qu'elles prennent. C'est sûr qu'avec ma graisse je vais pas avancer vite! Je suis pas la reine du marathon. Mais le type qui m'a bousculé vient s'excuser, il a un skate à la main. Avec mes shoes ça ne marchera pas. Je demande au type de me prêter son skate quelques instants en échange de mon pardon. Simultanément, j'enlève mes chaussures et je lui demande de m'attendre avec mon sac et les chaussures.

Dix secondes plus tard me voilà sur le skate, en bas, en pleine vitesse. Et je repère facilement ces deux gourdes qui se dirigeaient dans mon quartier. Alyssa ne sait toujours pas qu'on semble être voisines. Je les vois en train de tourner les pages, dire que j'écris comme un porc qu'on ne comprend rien, et Alyssa se demande « comment ce torchon a pu intéresser quelqu'un ». Comme j'arrive en skate, elles ne me voient pas venir et je fonce tout droit dans leur petit conciliabule :
- Rendez moi ça les pétasses!
- Han mais comment elle a fait pour nous suivre? s'interroge cette idiote d'Ashley
- Mais comment tu nous parles toi! Qui nous dit que c'est à toi ce torchon? réagit Alyssa.
Je lui arrache des mains et elle tombe dans une flaque d'eau. Trois élèves qui passaient par là applaudissent.
Ashley ne sait plus quoi dire.

Alors que je remonte sur le skate, le courroux d'Alyssa se transforme en orage :
- Décidément, t'as pas compris à qui t'avais affaire. On va te faire la misère. Tu regretteras de t'attaquer à nous. T'es qu'une truie, grosse et moche!
- Je le sais déjà, t'inquiète et je vis très bien avec (ce qui est bien sûr totalement faux)
- On ne s'acharne pas sur nous en toute impunité! renchérit la gourde Ashley
- C'est l'hôpital qui se fout de la charité!
- Mais de quel hôpital elle parle? répond cette idiote!
Alyssa donne une tape méprisante à Ashley, soulignant bien le rapport de force et le déséquilibre du duo : Alyssa est le cerveau, Ashley son bras exécutif au QI en dessous du niveau de la mer.

Je mets les voiles. Au loin j'entends une remarque que je suis pieds nus sur le skate. Dès que je passe l'angle de la rue et que je deviens invisible aux yeux des deux filles, mon skate dérape, je tombe sur le côté, je file le bas noir que m'avait refilé Yun So, je m'écorche.

Dix minutes plus tard, le type du skate qui m'avait attendu me voit revenir et se fiche de moi : « faut pas en faire quand on sait pas, et puis c'est pas pour tout le monde! ». J'apprécie la remarque. Je le remercie quand même. Et de tout ça je suis fière, même je ne suis pas sûre que ça redore mon blason.

En arrivant dans l'immeuble je vais frapper chez les 3 coloc'. Kamil ouvre et constate que je me suis bien amochée. Et il s'occupe de moi : eau oxygénée et pansement sur le genou.
La conversation s'engage :
- Tu pourras dire à Yun So que j'ai filé ses bas?
- T'inquiète pas, elle n'en a pas besoin, elle adore montrer ses jambes. (sous entendu que moi j'ai intérêt à les cacher)
- Yun So m'a dit que je pouvais utiliser son PC quand elle était pas là.
- Fais comme chez toi!

A partir de là, j'ai commencé à retranscrire tout mon cahier dans un fichier, et j'ai arraché chaque page qui était finalisée de sorte que mon cahier ne porte plus que les traces du jour lorsque je suis au bahut.

Je tape comme une secrétaire, mais avec deux doigts. J'avance pas vite, mais petit à petit le cahier se réduit. C'est comme une nouvelle vie qui commence, une ancienne qui s'efface. Si ça pouvait être vrai.

Le fait de l'avoir écrit, tapé puis arraché c'est comme un soulagement, une page qu'on tourne définitivement et presque sereinement.

J'ai caché le fichier au milieu des documents de Yun So, j'ai mis un mot de passe.

Toute cette effervescence m'a fait oublier l'heure du dîner chez les Vieux. Je me suis fait passer un savon par la Vieille qui ne cherchait qu'une excuse pour se déchaîner sur moi. Le Vieux lui n'était pas là. : « Tu te crois à l'hôtel? Tu vas voir quand tu seras au foyer si c'est un hôtel. J'ai bien compris moi ta situation, c'est ça ou rien! Personne ne veut de toi. Je te vois te pavaner là avec ton accoutrement qui ne ressemble à rien. Et ce blouson là tu le déshonores! Tu comprends? Fais gaffe à toi qu'il ne t'arrive pas la même chose que la personne qui le portait »

Comment ressortir intacte de ce déballage? Alors que je me sentais libérée aujourd'hui de mon carcan, la Vieille me ramène à mes vieux démons.

Une heure après le dîner, l'angoisse revient : l'abandon, la solitude, le danger qui rôde. Mon cœur bat la chamade, je mourrai sûrement à 20 ans, je suis trop angoissée.

A la fin de la semaine, mon cahier sera vierge, ma vie aussi?

1 octobre 2012

LUNDI 1er OCTOBRE 15h50

Les lentilles restées collées dans mes cheveux semblent avoir excité les bavardages de mes voisins arrière cet après-midi. C'est vrai qu'avec l'armure de cuir, j'ai aussi remodelé la serpillère qui me sert de chevelure donnant ainsi plus de prise et d'accroche aux lentilles volantes. Ce qui m'inquiétait surtout, c'est le retour des Pestes sur l'obsession de mon journal. Elles disent à tout le monde que j'ai un journal intime : « C'est Secret Girl... mon cher journal » avec un ton bébé!

J'ai peur qu'elles arrivent à me le piquer, encore une fois! Mais l'ont-elle lu finalement? Car elles auraient pu rebondir sur certains éléments pas glorieux à leur propos. Je dois apprendre à me méfier de mes conclusions hâtives et des faux-semblants, j'imagine trop vite des choses.

1 octobre 2012

LUNDI 1er OCTOBRE 13h25 : NOUVEAU LOOK NOUVELLE VIE

Changement de mois, changement de look, changement d'ambiance.

Hier soir en me voyant Yun So a pensé à un petit quelque chose pour moi. Elle est étudiante en stylisme m'a-t-elle dit. Ça existe ce genre d'études? Elle a tout de suite trouvé ce qui manquait. Des bas noirs et la jupette grise qui me trottait dans la tête. Et une babiole à mettre autour du cou. On en était scotchées toutes les deux. Elle s'extasiait et je riais.

Mince c'est la première fois que je ris en 2012.

Ce matin la Vieille a fait une syncope. Elle m'a fusillé du regard en voyant mon nouvel accoutrement dont la star est le blouson Perfecto qui lui fait si mal. Elle m'a laissée seule au ptit déj et est partie s'enfermer dans sa chambre, furieuse, sous l'œil réjoui du Vieux qui sortait de son bureau. Il est venu se goinfrer avec moi et m'a trouvée superbe. Le chien était anormalement surexcité comme s'il sentait l'électricité dans l'air. Ou bien c'est la sortie du blouson qui le réveille??? Un mystère de plus?

En arrivant sur le parvis du lycée, j'ai fait sensation. Bon pas d'enthousiasme mais de la sidération, ceux-là me découvraient. J'ai même entendu un type dire : « mais elle est nouvelle la grosse gothique? » Et dans la classe à 8h27, syncope de ceux qui étaient déjà là : cris de terreur, rires nerveux, rires moqueurs, chuchotements.

Même David en est resté bouche bée, il ne contrôlait plus son regard, il bloquait sur moi, décomposé. Évidemment les Pestes qui arrivent toujours en retard ne m'ont pas vue, mais elles en ont été informées par radio-bruissement.

Lors de l'intercours, elle se sont positionnées à l'entrée de la classe et ne m'ont pas lâchée du regard, me décryptant de la tête aux pieds. Je lisais sur leurs lèvres : « mauvais genre », « pute », « horreur ». Derrière leur apparat de star de l'école qui masque toute perturbation, elles s'inquiétaient, elles fomentaient, elles adoptaient une attitude défensive, reconsidérant leur premier fichage tyrannique de mon identité profonde.

Mais j'ai vite compris que j'étais loin d'une quelconque victoire, ni d'une minuscule ascension sociale. Vers 11h, je reçois un mot sur mon bureau :
« C'est Carnaval ?»
Je ne réponds pas. Puis les quolibets continuent, à l'oral.
« C'est Scream 5? Scary Movie 12? »
« Famille Addams, sors de ce corps »

Tous ces messages très fins venaient probablement du fond, antre des Pestes maudites. Mais au passage, les autres débiles lisaient, écoutaient et se marraient.

Réaction surprise de David qui s'est retourné et a fait « chut » ce qui a déclenché des « Oh l'autre! », « l'autiste se réveille », « mais c'est la pleine lune ou quoi? ».

A la sortie du cours elles me sont passées devant, et face à leurs yeux méprisants, je n'ai trouvé comme réponse que de leur tirer la langue bruyamment. C'est récurrent chez moi comme défense. On aurait dit un pet. Et là, évidemment...:
- Ah bah ça, c'est pas surprenant
- On a changé l'emballage...
- mais pas le cerveau!
- Toujours la même greluche!
Gloussements humiliants.

J'ai décidé d'accélérer, et là ce fut le drame. Mon pied, désormais chaussé de Newrock de guerre, a malencontreusement écrabouillé le pied d'Alyssa. Elle a hurlé de douleur (mon poids + les shoes, une tonne), Ashley s'est inquiétée gravement pour son amie (qui serait sûrement condamnée à une amputation), et m'a menacée d'un magnifique doigt d'honneur.

C'est pas de ma faute, c'est mon pied gauche qui s'est exprimé! Attiré comme un pied de la chance vers une salutaire crotte de chien!

J'ai mis les voiles, direction la cantine. A la caisse, mes deux canettes de Coca non light que j'avais maladroitement empilées sont tombées dans la saucisse-lentilles du jour éclaboussant au passage le Monstre, revenu de sa punition à sa place habituelle. Sans me regarder, elle s'apprêtait à me hurler dessus. Mais son œil a bloqué net, et elle m'a demandé si j'étais nouvelle ici? Est-ce qu'elle était sérieuse?

Mon look est un des sujets n°1 à la cantine aujourd'hui, et ceci malgré l'absence des Pestes (qui préfèrent aller manger une salade au McDo, c'est plus chic qu'une vulgaire cantoche)

Et bizarrement je repense à David, ce petit être chétif, moribond qui a réagi aujourd'hui. Comme si mon déguisement lui avait donné la force de sortir de sa coquille.

Je ferme mon cahier, une bataille de lentilles se prépare!

30 septembre 2012

DIMANCHE 30 SEPTEMBRE 21h25

Soirée houleuse. La Vieille et le Vieux se sont encore engueulés à propos du blouson. J'ai cru entendre que ça lui faisait trop de mal, que ça remuait des souvenirs douloureux et qu'elle ne pouvait pas autoriser ça. Et il jette de l'huile sur le feu, ce blouson est devenu son arme pour la provoquer. Soit ils s'indiffèrent l'un l'autre, soit ils se détestent. Belle image du couple. C'est vraiment un concept bidon qui ne sert à rien.

Je sors de l'appartement pour me promener dehors quelques minutes avec mon cahier. Et je tombe sur l'horrible Alyssa qui arrive au coin de la rue. J'ai l'impression qu'elle ne me voit pas, je prends la fuite! C'est peut-être grâce à mes godasses de compétition! Qu'est ce que ça va être avec le blouson!

Et sur le retour, Yun So qui descend les poubelles dans le local et qui peste contre ses coloc' qui ne font rien. Et elle tilte sur mes shoes!!! Et elle m'annonce qu'elle a quelque chose pour moi...

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30 septembre 2012

DIMANCHE 30 SEPTEMBRE 18h50

Bilan de ces 3 semaines : tout mon bahut me croit lesbienne alors que moi-même je n'en sais rien. J'avais déjà une image de looseuse pas aidée par son physique! Je cumule. En cours, je suis perturbée par ces événements et la concentration est en berne, je vais me planter en beauté si ça continue! Je n'ai pas d'ami(e)s. J'ai au moins 2 ennemies. Ma famille d'accueil est strange et mystérieuse.

L'école est devenue un tel cauchemar que j'attends avec impatience les vacances de la Toussaint. C'est dans quatre semaines. Survivrai-je jusque là?

J'ai décidé de ne pas m'apitoyer sur mon sort. Pas trop.

Samedi j'étais une loque broyée par la méchanceté de l'humanité toute entière. La Vieille avait décidé de faire le ménage dans ma chambre. Je ne pouvais pas me vider de toutes mes larmes tranquille. Je suis donc allée me cacher dans la cage d'escalier, où un des voisins, Marco, m'avait déjà parlée. Et vlan je me suis faite choper par cette hypocrite de Yun So de retour de courses. A trois ils sont partout. Et rien ne l'arrête cette Yun So:
- Mais qu'est-ce qui t'arrive Sarah? Est-ce que c'est ta famille d'accueil qui te fait de la peine comme ça?
- C'est un tout, même vous! (Comprenne qui pourra)
- Qui te donne envie de pleurer?
- Tous des faux-culs! (C'est valable aussi pour toi)
- Bon passe nous voir quand ça ira mieux, c'est sincère. (Pourquoi elle s'acharne?)

Puis j'ai réfléchi : ils peuvent se moquer de mon physique, mais bien m'aimer quand même. On peut détester le physique et aimer l'âme? Boostée par cette attention même hypocrite, je l'ai aidée à monter ses sacs de courses sans lui demander son avis. Elle a souri. Une fois dans l'appartement, j'ai vu qu'elle avait un ordinateur, mes yeux m'ont trahi, YunSo a réagi : « Si tu as besoin de t'en servir et que je ne travaille pas dessus », a-t-elle lancé en désignant la machine du regard.

Là mon sang ne fait qu'un tour. C'est une occasion rêvée, même si mes voisins me cassent par derrière.

Du coup je ne les comprends pas vraiment mes voisins. Que pensent-ils de moi? Ont-ils pitié à ce point là? Peut-être qu'ils m'aiment bien.

La Vieille me cherchait alors partout : elle hurlait mon prénom sur le palier

Et puis un truc dans la conversation m'a fait naître le doute.
- Ils t'en font voir de toutes les couleurs, non?
- Un peu...
- On en parlait tous les trois l'autre jour après ton départ, c'est pas facile de vivre avec eux.

Je n'ai pas répondu mais je voyais très bien à quelle conversation elle pouvait faire allusion. Et je re-cite ici les phrases dont je me souviens :
- Marco : la pauvre, elle me fait pitié
- YS : c'est vrai qu'elle est pas gâtée
- Kamil : oui et de toute façon ça ne pourra pas s'améliorer.

Et si finalement ils parlaient de ma famille d'accueil et pas de mon physique? Ça pourrait se tenir!

C'est un déclic, soudainement j'ai pris conscience que les choses autour de moi avait la couleur que je voulais bien leur donner.

Dimanche j'ai réfléchi toute la journée à mon armure vestimentaire, il manque quelque chose. Je suis allée chercher le blouson dans le placard, discrètement, et j'ai mis les bottes. Je me suis admirée dans le miroir. Il faut un truc un plus. Un petit gilet gris, une jupette colorée? Mais comment je vais trouver ça? Sans un rond en poche?

28 septembre 2012

VENDREDI 28 SEPTEMBRE 19h : AU FOND DU FOND

Un calvaire que cette fin de journée. Je suis lessivée. Les deux pestes m'ont sauté dessus dès la pause en m'insultant : « garce, mammifère marin, veau ». Tout y est passé. Le mec d'Alyssa qui m'avait balancé de la purée à la cantine est intervenu pour les calmer et leur demander de passer à autre chose.

Puis à la cantine, Ashley a renversé mon plateau volontairement. Tandis que l'autre fouillait dans mon sac à la recherche de mon cahier-blog. Elle a vidé mon sac par terre. Deux harpies en furie. Mais elles ont fait chou gras!

Heureusement que j'avais eu la bonne idée de le cacher aux toilettes, dans la cuve, enrobé dans un sac plastique.

Le Monstre qui fermait sa caisse a vu la scène. Elle est venue m'aider à ramasser mes affaires. Je l'ai remercié. Puis je me suis enfuie dans la honte d'être devenue une telle victime. Une pauvre merde donnée en pâture à deux sorcières en rut.

La pression retombe et je n'arrête pas de pleurer. Mon corps se vide de tout son liquide, je me dessèche comme un désert. Dans quelques heures je ne serai plus que du sable. Ces deux pestes ont sucé toute ma sensibilité, toute mon humanité.

Et en plus Alyssa me poursuit : dans la rue je la vois, elle continue d'être énervée, et son mec lui roule un patin mouillé pour tenter de la calmer. Si elle découvre que j'habite ici, ça va être l'enfer, je n'aurai plus qu'à faire mon baluchon.

Si quelque part un ange gardien, un dieu existe pour moi, qu'il m'aide à affronter cette guerre des nerfs! Dois-je être offensive? Ou me cacher le temps que la tempête s'estompe?

A quoi bon écrire si ça se retourne si terriblement contre moi? Mes mécanismes de défense deviennent des armes contre moi.

Mais pourquoi je ne suis pas une fille comme tout le monde ? Avec des parents et un foyer bien à moi? Un physique sympa qui pourrait s'améliorer avec le temps, et qui ne générerait aucun commentaire. Qu'il est dur d'être grosse et moche à 16 ans...

S'il vous plaît, transportez-moi ailleurs, une autre galaxie, un univers lointain... je n'appartiens pas à cette planète...

La Vieille vient de hurler ! « A taaaaaaaaaaaaaaable! » puis elle a ajouté : « ras le bol de cuisiner pour des ingrats comme vous ».

28 septembre 2012

VENDREDI 28 SEPTEMBRE 11h15 : DES TRACES

J'écris en classe, c'est vital.

Quand je suis arrivée dans la salle ce matin, Ashley montrait un truc sur son téléphone portable à d'autres filles qui gloussaient au bout de quelques secondes. C'est sûr, elle montre mon chef d'œuvre dramatique d'hier soir. Je suis la risée c'est définitif. Même mon voisin David me regarde avec dédain. J'ai l'impression qu'il me méprise lui aussi.

Un mot vient juste d'arriver sur ma table : « keske t'écris encore? Tes malheurs? Pov sara! ». Puis un deuxième : « j'aimerais lire ta dissert', c'est sur ta vie? Tu parles de nous ?». Là j'ai renvoyé ma réponse par derrière « Tu pe crever ».
Réponse instantanée : « Dis le que tm alyssa! Chaudasse ». Ma réaction manuscrite : « bande de tarées décérébrées » avec un petit dessin d'une tête et une cervelle qui fuit.
Et là les pestes ont vociféré : « mais pour qui elle se prend celle-là? Comment qu'elle nous traite! La pourriture ».
Ce bruissement a réveillé le prof de sa torpeur monotone. Il s'est levé, est venu voir les deux pestes, est tombé sur le mot. J'ai rougi de terreur. Il a commencé à lire le mot à voix basse avant de de se taire, il a eu une réaction de désespoir : « Ça vole haut par ici, allez les deux filles, deux heures de colle»

Silence de Alyssa, réaction débile de Ashley :
- Putain, c'est pas juste monsieur. C'est la fille devant qui a écrit le mot
- Je veux pas le savoir, c'est vous qui m'avez dérangé, assène le prof
- Mais dis le toi devant!

Évidemment j'ai fait la morte innocente. Et le prof, exaspéré lui a donné une heure de colle supplémentaire! Alyssa a ordonné à Ashley de la fermer.

Ça sonne, j'ai peur des représailles.

27 septembre 2012

JEUDI 27 SEPTEMBRE 21h : COUP DE MASSUE

J'espère que jamais personne ne lira ce que je vais retranscrire ici.

Finalement sur un coup de tête j'y suis allée, je suis arrivée avec cinq minutes de retard. J'ai fait semblant d'aller aux toilettes. Il n'y avait personne mais une porte était fermée. Je me suis enfermée dans les toilettes d'à côté puis j'ai attendu. Quelques filles ont passées puis reparties. Je me suis décidée à abandonner : soit elle était venue et n'avait pas attendu ou pire avait jeté l'éponge. C'était trop beau. Mais je me sentais aussi soulagée.

En sortant je me suis mise de l'eau sur la figure, j'ai entendu un bruit dans le couloir. Puis un chuchotement venant de la porte fermée : « c'est toi? Tu es là? »

Je me suis demandé si j'allais répondre ou m'enfuir, cette situation me paraissant être le comble du chelou.

Mais elle insistait :
- T'en va pas! J'ai besoin qu'on parle
- Tu es sûre que c'est à moi que tu veux parler? jouant l'incrédule
- Oui on avait rendez-vous, mais j'ai peur de me montrer...
- Pourquoi tu as peur?
- Je suis vraiment moche, et toi tu es très belle
- Hein, moi? Mais personne n'est plus moche que moi!
- J'entends des sanglots qui pourraient ressembler à des rires.
- Tu pleures?
- Oui je suis triste moi aussi et toi seule peux me comprendre!
- Qu'est-ce qui va pas?
- Je suis malheureuse, je suis amoureuse et j'ai peur que ce soit pas réciproque.
- Mais tu as l'air géniale...
- Tu penses que quelqu'un peut m'aimer? Demande-t-elle naïvement.
- Je penses que tu es belle intérieurement.
- C'est vrai tu le penses vraiment?
- Je le sens...
- Est-ce que toi tu pourrais m'aimer?
- Je te connais pas...
- Si! tu me regardes tout le temps...
- Non je...
- Je t'excite? Tu me désires?
- Hein? Mais tu m'as lue non? Et ça t'a plu...
- J'ai adoré tes mots d'amour
- C'était pas des mots d'amour mais c'était sincère
- Tu m'aimes, avoue-le! Insiste-t-elle avec un ton agressif.
-Tu es bizarre, montre-toi s'il te plaît
- Dis-moi que tu m'aimes ou on se parlera plus jamais et tu ne sauras jamais qui je suis!
- Mais..mais oui...je t'aime ... mais comme une amie virtuelle
- A nouveau des sanglots douteux sortent des WC. Et je commence à paniquer :
- Sors de là s'il te plaît, tu me fais peur

Et là la porte s'ouvre violemment. C'est une vision d'horreur qui s'offre à moi. Derrière la porte se cache... Alyssa!!!!!
- Mais c'est pas toi? Non c'est pas possible! dis-je complètement abasourdie de la supercherie
- Si c'est moi, gourdasse...
- Non c'est pas toi qui a lu mon journal...
- Mais de quoi tu parles... Fleur999 ça te dit quelque chose?
A ce moment là, j'entends des gloussements sur ma gauche et j'aperçois la présence d'Ashley qui filme tout avec son téléphone, cachée dans un recoin. Celle-ci a dû entrer dans la pièce au cours de la conversation sans que j'y prête attention. J'étais trop absorbée par ce moment intense et bizarre. Les deux rient comme des démons et je vis un cauchemar. Je mets ma main sur la bouche pour masquer les tremblements, les larmes me montent. Et tout s'éclaircit!

- Ça te plait qu'une fille te drague?
- Tu les mates toutes! renchérit Ashley.
- Mais qu'est ce que ça veut dire? réponds-je dans un dernier élan d'incompréhension
- T'es vraiment naïve! sort l'une des pestes.
- Mais pourquoi?
- Parce que c'est drôle! Et qu'on n'aime pas ton regard lubrique de lesbienne ! sort l'autre peste.
- et qu'on s'est fait punir par la prof de sport à cause de toi! Conclut Alyssa

Je suis figée par la honte, par tant de méchanceté gratuite envers moi. Mais une dernière menace vient semer le doute :
- Donne-nous ton cahier de l'autre jour, on aimerait bien le lire...

Et là je m'enfuis en courant. Je comprends que Fleur999 est un piège grossier. Cette copine potentielle n'existe pas, elle n'est que dans mes rêves, et ces deux pestes ont créé un leurre. Mais dans quel but? S'amuser tout simplement? Et se venger d'une broutille en cours de sport? Et pourquoi me demandent-elles mon cahier si elles l'ont lu? Pourquoi l'ont-elles ramené au secrétariat ?

Et je comprends enfin un truc. Tous ces regards méfiants en sport, toutes ces allusions étranges, le mot balancé en classe à David ramènent à mon orientation sexuelle qu'elles pensent avoir décodée. Mais ont-elle raison? Je n'en sais rien : ni les garçons ni les filles ne m'attirent. Je ne suis ni hétéro, ni homo, je ne suis rien pour le moment. Mais même si elles avaient mis le doigt sur une vérité, ce n'est pas ça qui me fait honte.

J'ai honte d'y avoir cru, d'avoir pensé un instant trouver une amie, quelqu'un comme moi. Mais non, personne n'a lu mon journal à part elles deux, et elles ont monté tout ce stratagème par pur plaisir sadique, puis le cour de sport a tout accéléré. Il vaut mieux que la déception arrive maintenant plutôt que dans un mois.

Mais le pire est qu'elles ont tout filmé. Ça y est c'est officiel je suis un bouc émissaire. Qui va faire le buzz.

27 septembre 2012

JEUDI 27 SEPTEMBRE 13h20 : IRA, IRA PAS

Je ne sais toujours pas si je vais aller à ce rendez-vous incongru entre deux moches et grosses. Je préférerais rester dans l'ombre. Et ce dilemme me coupe encore une fois l'appétit. Le monstre, encore punie, m'a vu songeuse et est venue vers moi : « tu vas pas encore tout jeter, qu'est ce qui t'arrive? ». Puis elle est partie nettoyer des tables.

C'est bizarre, c'est comme si elle m'avait repérée. Elle a l'air de se souvenir que je bouffe comme quatre le midi et surtout que je ne mange plus rien depuis deux jours. D'habitude personne ne fait attention à moi. Elle ne doit avoir que ça à faire, de contrôler les assiettes. Tellement elle s'ennuie dans sa punition. Vivement qu'elle retourne à la caisse! Oups non ça c'est pas une bonne idée.

Non je pense que je vais pas y aller. Je ne sens pas tout ça. Trop mal à l'aise.

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