Je m'ennuie tellement que tout est prétexte à distraction...

Un bruit dans la rue, le ronronnement du réfrigérateur qui m'appelle à l'ouvrir, le Chien qui veut se promener, une voix dans le couloir... et justement, un dialogue mystérieux sur le palier a attiré mon attention :
- Tu crois que ça va la satisfaire ?
- Oui ça va la calmer pendant un petit moment et je te remercie !
- Tu peux toujours compter sur moi...
- C'était sympa non ?
- Je suis pas sûr qu'on était très crédible...
- Tu parles, on a été parfait !

J'ai bien sûr reconnu les voix de mes voisins : Yunso et Marco. Et à mon avis ils reparlaient de leur petite accolade romantique d'hier. Ouf, c'était bidon ! Mais c'était pour qui ce show ???

J'ai comme l'impression que Yunso voulait plus y croire que Marco... Ça va mal finir cette histoire... Croyez-en la longue expérience de Tata Sarah...

Bon pour l'expérience, je repasserai. Mais je crois que Marco est très gay... et Yunso très amoureuse.... Et mes yeux ne me trompent pas !

Ma consolation aujourd'hui, ça a été de me remettre aux Feux de l'amour et d'aller en parler ensuite avec la Mamie au Rialto. Et on a eu une vraie conversation de fond :
- MOI : C'est quand même étrange que les deux bébés aient les mêmes prénoms, non ?
- MAMIE : Oui c'est une drôle de coïncidence.
- MOI : C'est pratique, quand la vraie mère piquera son vrai bébé à la fausse mère.
- MAMIE : Oui mais le bébé d'Ashley il a jamais existé...
- MOI : Pourtant elle est bien mère ! Alors que Sharon a perdu son vrai bébé et vit un faux deuil.
- MAMIE : C'est terrible...
- MOI : C'est l'hallu totale.
- MAMIE : Mais pourquoi donc déjà ?
- MOI : C'est Adam qui veut se venger de Victor...
- MAMIE : Mais je vois pas comment...
Même les Feux de l'amour s'embrument ces derniers temps : c'est comme moi avec mes révisions...

Une discussion ubuesque, certes. Mais la Mamie ne perd pas le fil. Son cerveau marche encore. Tout ce qu'elle me dit sur le bracelet est une vérité à un moment donné, à moi de recoller les morceaux...

Mais pour l'instant il me manque quelques morceaux de puzzle et ça s'emboite difficilement.

J'ai comaté devant la télé toute la journée...

Plus je me sentais coupable de ne rien réviser, plus j'avais envie de rester sur le canapé. Plus je pensais à David, mon ex-meilleur ami (euh mon ex-seul ami), plus j'avais envie de m'enfoncer au plus profond de mon canapé.

Le Chien soupirait de temps à autre à mes pieds me rappelant que j'étais encore dans la réalité et pas de l'autre côté du petit écran.

A un moment je suis tombée sur un reportage sur des trafic d'animaux exotiques en région parisienne. Et ça m'a donné une idée... et l'énergie de me lever pour aller sur mon faux ordinateur-tablette...offert par David.

Mon idée n'a rien donné, mais la pensée de mon ami en train de réviser avec tous ses potes de S et tirant un trait sur moi me rend bien triste. J'étais bien mieux sur mon canapé.

Cette idée que j'ai eue ? Hé bien je me suis imaginé que l'odeur de ma chambre était une odeur d'animal exotique enfermé dans la pièce du fond ! C'est pas inimaginable non ? Mais j'ai rien trouvé de probant sur l'odeur.

Un sursaut inutile...

Je viens de me réveiller, après un long sommeil de 12 heures.

J'ai lu que les gens extravertis avaient un sommeil plus court que les gens introvertis. Pas besoin de me demander dans quelle catégorie je suis...

Je me pose devant ma fenêtre avec des annales de bac de français qui ne me passionnent pas... Je me dis qu'en jetant un œil dehors de temps à autre j'arriverai à mieux digérer tout ce conformisme qu'on tente de nous rentrer de force dans le cerveau. C'est un carcan vide de sens. C'est ce qui me vient tout de suite à l'esprit quand je pense à toutes ces règles qu'on doit respecter : l'introduction, la thèse, l'antithèse, la synthèse, la conclusion, le tartinage de copie doubles, la prime à la quantité, les genres littéraires et le petit jeu du « quel genre va tomber cette année ? ». On nous teste pour savoir si on peut vraiment obéir, se soumettre à une loi qui n'a aucun sens. Et plus on se soumet aux règles, plus on a une bonne note. Tu sais rentrer dans un moule sans broncher, tu auras ton bon point. C'est pour voir si on pourra rentrer dans le rang plus tard en bon mouton. Et le bac sera un passeport pour la bergerie ! C'est terrible !

Tiens, Yunso passe avec Marco, bras dessus bras dessous.

Ce n'est pas parce que tu es doué pour te fondre dans le moule que tu vas être doué pour la vie ! Parce que le jour où la bergerie s'effondre à cause d'un coup de vent, tu vas où ?

Tiens, ma kiné vient de passer, elle fait un signe de la main à quelqu'un. Elle s'engouffre dans le Rialto. J'ai pas été discrète, je me suis penchée par la fenêtre à m'en couper le souffle.

Je me demande si le bonheur est dans le moule industriel dans lequel on veut nous faire rentrer. Évidemment dans le moule on se sent soutenu par le groupe et son approbation. En dehors du moule, on se sent libre mais seul. Je pense qu'à un moment dans sa vie, il faut choisir une des deux voies : tu suis la voie de la société dans une certaine sérénité ou bien tu la rejettes au nom de ton intégrité au risque de te sentir à ton tour rejeté.

Tiens Marco et Yunso repassent, toujours en se tenant par la main...Saperlipopette, boudiou, nom de Zeus, ils viennent de s'embrasser sur la bouche!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Bon c'était fugace. Mais ils avaient l'air d'être un couple...

Je comprends plus rien ! Une minute plus tard ils se sont décollés l'un de l'autre, et ont retrouvé leur distance. Je suis perplexe... je suis sûre d'avoir vu Marco embrasser Kevin l'ex d'Alyssa sur mon palier une nuit... (cf posts dans la nuit du 31 mars puis révélation du 4 avril).

Alors la question est : à quand cette croisée des chemins entre la vie confortable écrite par d'autres ou la vie pleine de risques et d'incertitude écrite par soi-même ? Aujourd'hui ? Demain ? A dix-huit ans ? Le jour du mariage ? Le jour de la retraite ???

Bon sang, mais le paparazzi est revenu ! Et il est en train de photographier mon immeuble ! Et il a l'air de viser vers moi. Si j'étais une star, je croirais qu'il vient pour moi !

Bon, toute cette activité dans la rue perturbe mon raisonnement. Depuis tout à l'heure j'essaie de réfléchir à un sujet de dissert' que j'ai trouvé dans les annales. Ça parle d'intégration ou d'aliénation au groupe... J'ai tout mélangé : la dissert', le dégoût du bac et les petits événements de la rue. Ça promet le vrai jour du bac.

Ma cervelle part tous azimuts entre surveillance de la rue et l'obédience scolaire tournée vers l'obligation de résultat !

Han comme je me la pète avec tous mes termes intellos ! Faut surtout pas que je prenne la dissert', commentaire de texte ou rien ! Je comprends plus rien à ce que je viens d'écrire, vous avez compris vous ???

Hop les annales à la poubelle, la fenêtre refermée, direction la télé !!!

Je viens de me lever en pleine nuit et la Vieille était en train de regarder sa vieille VHS où on la voit avec sa fille. C'est grave...

Elle me fait peur. J'ai l'impression que c'est obsessionnel. J'ai l'impression qu'il lui manque une case. Je l'observe du couloir, elle est immobile. Puis j'entends un ronflement... qui doit venir de la chambre.

Je m'approche et je fais mine d'aller boire un verre d'eau à la cuisine. Et là je la découvre en train de dormir et de ronfler comme un homme ! Elle s'est endormie devant sa vieille cassette.

C'est comme si cette vieille bande, c'était tout ce qui lui restait d'humanité. (cf post du 23 février)

Tiens, une fois n'est pas coutume pour un samedi, mon Chien ne miaulait pas à mon retour. Pourtant l'appartement était vide. Les Vieux sont partis déjeuner avec une vieille tante en banlieue, sûrement pour lui piquer son héritage !

Bref, je croyais que mon Chien miaulait à cause de la solitude du samedi, mais non.

Un problème de réglé.

Je pense à David et comme il me manque. Comment a-t-on pu en arriver là ? Je me demande toujours ce qu'il a répondu au dernier cours d'hier à la question pour chacun du « meilleur souvenir de l'année ». Sûrement le jour où il s'est acheté Assassin's Creed 3... rien de palpitant quoi.

Je retourne à mes révisions alors que tant de questions restent en suspens...

Vous aurez compris, chers lecteurs, que je broie un peu du noir en ce moment. Je m'en rends compte. Mais j'arrive pas à inverser la tendance. Je le vois, je suis lucide, mais c'est plus fort que moi.

Pas une raison pour sauter mon nouveau rendez-vous hebdo, mon déjeuner au Zenzoo avec Yunso. Elle tente de me remonter le moral... mais elle rame, la pauvre :
- T'as fini les cours, tu devrais être euphorique...
- Y'a le bac !
- Oh en 1ère c'est rien. Moi j'ai eu 14 à l'oral et à l'écrit sans rien faire.
- On n'a pas les mêmes atouts pour l'oral.
Yunso a explosé de rire devant les yeux médusés des serveuses et de nos voisins de table. Suis-je vraiment drôle ?
- C'est quand ton oral de français ?
- 1er juillet !
- Tu peux positiver, moi c'était vers le 10 ! Après tu pars en vacances ?
- Avec qui ? Avec quels sous ?
- Ah oui je suis un peu conne. On pourrait t'emmener avec nous... on va à l'île d'Oléron en juillet.
- Y'a Marco ?
- Oui je suis vraiment stupide ! N'aie pas de regret, si j'avais pu éviter l'île d'Oléron, y'a trop de touristes, c'est tout plat, y'a rien à faire à part la plage, aucun intérêt.
- Je connais pas. A Paris l'été c'est mortel ! Paris-plage, super...
- Ouais t'as un peu raison, je suis maladroite.
Elle ne rame plus, elle coule et je lui mets la tête sous l'eau.

Mais elle va relancer mon intérêt :
- Ah si j'ai un truc qui va te plaire. Mon ami bijoutier, je l'ai appelé. Il se souvenait bien de toi, il m'a posé plein de questions pour savoir si tu avais retrouvé ton bracelet. Il est sympa...
- Ouais...
- Et il m'a promis qu'il nous trouverait un nom d'antiquaire spécialisé. Mais il pense pas qu'il en saura plus que lui.
- Ouais... et dis-moi, tu lui as répondu quoi quand il t'a posé toutes ces questions ?
- Ben je voulais pas qu'il croie qu'on fait des recherches sur un truc qu'on n'a pas. Alors je lui ai dit que tu l'avais retrouvé, ton bracelet. Ça sera plus facile pour qu'il nous introduise auprès d'un antiquaire.
- Ah...
- Oui tu sais, faut les motiver ces gens-là si tu veux obtenir quelque chose, il faut toujours qu'ils croient qu'ils vont avoir quelque chose à gagner.

Pas bête, cette Yunso, elle sait y faire pour manipuler les gens. Elle n'est pas non plus une manipulatrice née comme Alyssa ! C'est juste ce qu'il faut. Je l'envie un peu de savoir aussi bien obtenir ce qu'elle veut. A part en amour où elle n'a pas l'air aussi douée que ça...

Parfois je me demande si Alyssa ne deviendra pas un peu comme elle en vieillissant. Et inversement peut-être que Yunso était plus peste quand elle était jeune, plus comme Alyssa.

Moi à qui vais-je ressembler plus tard ? Vais-je changer ou rester pareille ?

La salle est comble, et dissipée. Tout le monde a changé de place, David est là mais pas à côté de moi. Je me suis récupérée l'idiote de service, Ashley, qui est toujours en bisbille avec sa sœur presque jumelle, Alyssa.

Dernières consignes de la prof principale pour gérer son stress, son temps, bien arriver en avance, penser à sa convocation et sa pièce d'identité, penser à ramener de l'eau et de la nourriture.

En un instant je me suis téléportée dans quatre jours, et j'ai commencé à suer à grosses gouttes puis à avoir envie d'aller aux toilettes en urgence. En plein cours je m'éclipse, accès de panique. Pipi puis retour, soulagée !

David me regarde, inquiet. Mais j'ai pas envie de lui sourire, il vient de m'abandonner pour aller en S.

La prof demande à chacun de dire un mot et notamment de faire partager son meilleur souvenir de l'année à tous. Panique ! Ai-je vraiment un bon souvenir ?

Le jour où j'ai perdu mon cahier pré-blog avant de le retrouver quelques jours plus tard?
Le jour où Ashley et Alyssa m'ont fait croire qu'une fille virtuelle voulait devenir mon amie avant de me révéler la vérité aux toilettes ?
Le jour où la poubelle de macédoine m'est tombée dessus et où j'ai perdu mon bracelet ?
Tous les cours de volley où je me suis fait insulter en permanence ?
Le jour où je me suis battue dans la boue avec Alyssa parce qu'elle avait révélé à tout le monde que j'étais orpheline ?
Le jour où je me suis retrouvée dans le bureau du Proviseur face à Alyssa et sa mère ?
Le jour où je me suis fait condamner à l' « atelier décors » ?
Le jour où mon chef d'œuvre de Noël en arts plastoc a mis le feu aux autres œuvres créant un incendie mémorable ?
Le jour où j'ai découvert que David était accro au cannabis ?
Le jour où je me suis fait agresser dans la ruelle par les Pestes et Kevin-tête d'ange ?
Le jour où Paola s'est barrée définitivement de la cantine emmenant avec elle toute son énergie ?
Le jour où les Geeks ont magouillé pour qu'on m'entende chanter et que je devienne une doublure malgré moi ?
Le jour où mes collègues de TPE m'ont allumée et détestée sans limite parce que j'ai eu une bonne note et pas eux après avoir été écartée du projet sans aucun scrupule ?
Le jour où David m'a annoncé qu'il partait en Terminale S sans regret ?
Et il y en a eu tellement d'autres...

J'ai dû en oublier la moitié... Le temps de réfléchir, le petit jeu avait déjà commencé et ça volait pas très haut. Voici quelques extraits :
- Alyssa : « Moi c'est le jour où on m'a dit que je serais la star de la comédie musicale »
- Quentin : « Moi c'est le jour où vous m'avez élu délégué, car c'est important pour moi de vous représenter »
- Alyssa qui répond : « bla bla bla », lol !
- La prof : « On enchaîne, merci ! »
- Sonia : « Moi, c'est le jour où j'ai découvert que j'avais plein de points communs avec Alyssa, c'est bon de pouvoir compter sur quelqu'un »
Ridicule. C'est quoi leur point commun, me détester ? Ça a provoqué quelques gloussements et Ashley a grogné. Puis m'a chuchoté plein de choses en quête de réconfort :
- ASHLEY : Tu vois comment elle est. C'est une mante religieuse. Elle, son meilleur souvenir, bah c'est elle-même. Par contre elle arrive à faire croire aux autres qu'elle est leur meilleur souvenir !
- MOI : C'est pas con ce que tu viens de dire...
- ASHLEY : Tu te fous de ma gueule !
- MOI : Non je suis étonnée...
J'entends que c'est au tour de David, mais à ce moment-là, Ashley recommence à se confier :
- ASHLEY : Tu comprends ce que je vis ! Elle m'a sucé le sang avant de me jeter.
- MOI : T'as peut-être des trucs à te reprocher non ?
- ASHLEY : Mais elle aussi tu sais, elle est pas tendre...
David est en train de parler, mais j'entends rien, l'autre s'épanche comme l'eau d'une gourde percée :
- ASHLEY : Et puis quand je lui dis ça, elle me répond pas, qu'est-ce qu'elle imagine ?
- MOI : Tu peux te taire un instant ?
- ASHLEY : Parce que faut pas pousser mémé dans les orties !
- MOI : Chuuuut !
- LA PROF : Merci David, à qui le tour ?
Ce qu'il a dit a provoqué quelques sifflements, j'ai rien entendu et j'en veux à mon inutile voisine. Je me demande ce qu'il a dit.
- MOI : T'as entendu le souvenir de David ?
- ASHLEY : De qui ?
- MOI : De David...
- ASHLEY : Ben non, faut dire que ça m'intéressait pas trop.
Décidément, elle critique Alyssa, mais elle est pareille, rien ne l'intéresse à part elle-même !

Malheureusement mon tour arrive et je suis au bord de l'évanouissement, j'ai l'impression de me jeter dans le vide... : « Ben euh... je sais pas... euh...je pense que... ». J'ai fini par me taire car tout le monde bavardait et s'en fichait et la prof a enchaîné : « Sarah merci, à qui le tour ? ».

Elle n'avait pas l'air d'être ironique. Même elle s'en fiche de mes bons souvenirs ! Au tour d'Ashley :
- ASHLEY : Moi c'est quand j'ai ouvert les yeux sur la bêtise qui m'entoure, l'égoïsme...
- ALYSSA : Et sur la paix dans le monde !
Éclats de rire dans toute la classe. Ashley tente de reprendre le pouvoir dans un brouhaha énorme :
- ASHLEY : J'ai ouvert les yeux sur la méchanceté et la trahison...
Même moi, juste à côté d'elle, je n'ai pas entendu la suite.

Durant les dernières minutes, je n'en pouvais plus, il a fallu que j'aille aux toilettes encore une fois. Et quand je suis revenue, le cours était terminé et la salle presque vide.

Ben voilà, j'ai raté la fin, j'ai raté David. Pas mal.

Si ça continue comme ça je vais rater ma vie !

La macédoine était au rendez-vous, m'évoquant des souvenirs forts et pas si mauvais (cf posts du 15 et 16 novembre). Ça sentait le légume en boîte avant même de mettre un pied dans le réfectoire.

Je commence à remplir mon plateau comme jamais. Et quelqu'un vient me pincer le bourrelet par derrière ! Je me retourne en grognant, et qui vois-je ? Incroyable, mon amie Paola, le Monstre de la cantine qui a fait le service jusqu'aux vacances de février. J'ai écrit d'innombrables posts sur elle, pour elle...

- Mais qu'est-ce que vous faites là Paola ?
- Je suis venue foutre la merde pour le dernier jour !
- Génial ! Y'a vos pétasses qui se tournent les pouces !
- Sérieusement, je suis venue déjeuner avec toi.
- Pfff vous plaisantez !
- Oublie pas que je te lis régulièrement.
- Vous avez eu pitié...
- Ferme-là, on va bien s'amuser et surtout se régaler.

Comme c'est « portes ouvertes », la cantine est ouverte sur l'extérieur aujourd'hui et Paola a le droit d'être « invitée » par moi. Quand ses anciennes collègues l'ont vue débarquer, elles sont devenues livides. Quand Paola leur a parlé, elles se sont décomposées : « Vous me servirez bien mes chéries, j'ai un appétit d'ogre »

Mmmmmmh, je sais à qui elle me fait penser, au coach Beiste de Glee. J'espère qu'elle ne le prendra pas mal quand elle me lira...

Les anciennes collègues de Paola n'ont pas très envie de se laisser faire :
- T'es venue chercher la merde ou quoi ?
- Prends pas tes désirs pour la réalité la crevette, je suis venue déjeuner avec une vraie copine.
- T'as une copine toi ?
- J'en ai même plusieurs... BOUUUUUUHHHHHHH !!!
En poussant ce cri, les petites serveuses ont sursauté et l'une a fait tomber sa louche dans la macédoine qui a explosé tout autour d'elle, et surtout sur elle.

LOL, ça commençait bien.

Puis elle a vu son ancien boss à la caisse qui a gentiment engagé la conversation :
- Alors tu viens faire la paix ?
- Tu me vois là ? Tu me vois ? Moi je te vois pas.
- N'importe quoi.
Encore une fois mdr et méga lol.

En arrivant dans la salle, elle s'est permis de bouger des tables pour reconstituer mon ancien havre de paix à côté du tapis roulant. Et nous avons mangé toutes les deux, en copines !

Le peu de gens qu'il y avait nous dévisageait... et on s'en fichait !
- C'est toujours aussi dégueulasse ici..., commente-t-elle.
- Moi je trouve que c'est pire depuis ton départ !
- Ouais j'avais mes petits secrets pour rendre cette tambouille plus savoureuse.
Et ça ricane, on dirait deux gamines.

Je suis profondément touchée de sa présence, de son soutien.

Avant de se quitter, on a un dernier échange :
- Sarah, comme tu enquêtes sur ton bracelet, je peux te le rendre...
- Ça va pas ! C'est un cadeau... et puis j'enquête surtout sur l'autre bracelet qui a disparu.
- Ok ok ok, prends soin de toi !
- Je vous remercie pour la carte sim... je vous dois...
- Rien du tout, 2€ par mois c'est ma contribution pour te lire chaque jour. C'est pas cher pour un abonnement...
Elle a de la répartie le Monstre !

Direction le dernier cours où la salle se remplit...

Voilà c'est fini.

« Voilà c'est fini
On tant ressassé
Les mêmes théories
On a tellement tiré
Chacun de notre côté

Que voilà, c'est fini
Trouve un autre rocher
Petite huître perlée
Ne laisse pas trop couler
De temps, sous ton p'tit nez

Car c'est fini-c'est fini »

Ce sont les derniers cours. Et les rangs sont clairsemés. Alyssa et David sont aux abonnés absents, par exemple. Du coup Ashley qui est là, est nettement moins agréable qu'hier. Évidemment elle avait des bonnes raisons hier, à savoir faire enrager son ex-meilleure amie. Aujourd'hui elle en a beaucoup moins, elle n'est même pas venue s'asseoir à côté de moi, elle a préféré la compagnie de Quentin le délégué.

Je me demande si je serai là l'année prochaine. Dans mon passé scolaire, je n'ai pas arrêté de changer au gré des familles d'accueil, je dirais surtout des familles de « mauvais accueil ». Mais peut-être qu'il vaudrait mieux changer non ? Si David ne veut plus me parler, si Marco me hait, si la mère Lawson m'en veut à mort, si je passe mon temps à me sentir coupable...

Dernier cours de français et de littérature, dernier cours d'anglais, d'espagnol. Dernier cours de sciences. Dernières recommandations avant le bac de la semaine prochaine. Ça me rentre dans une oreille et ça me ressort par l'autre.

Je me demande encore si je vais prendre le commentaire de texte ou la dissert' en français, si je vais piger quelque chose à l'épreuve de sciences.

Je me dis que je vais finir en beauté, je vais manger toute seule à la cantine comme toute la semaine. Une fin de saison bien molle, bien creuse. Je vais prendre trois canettes de coca pour la peine.