Et si la fille des Vieux avait été victime d'une malédiction... et si tout recommençait avec moi... Je dois savoir ce qui lui est arrivé.

Je me suis persuadée depuis une semaine que les tarots n'étaient pas pour moi mais pour une autre Sarah. Trop facile non ? De plus j'ai perdu mon objectif de vue : en effet en allant faire du babysitting, okay je cherchais une star, celle qui attire le paparazzi... mais je cherchais aussi, à la base, si ces nouveaux habitants pouvaient héberger une autre Sarah. J'espère dans tous les cas trouver une autre Sarah dans cet immeuble. Je dois demander à Yunso.

Je vais lui envoyer un mail.

Je vis le contre-coup là, je suis en pleine angoisse. C'est vrai que j'ai vécu par le passé quelques moments de stress face à la violence des autres, comme l'agression de Rémy dans mon foyer d'accueil.

Mais là c'est une nouvelle histoire, et assez violente aussi. Si je n'avais été que bousculée... mais là le mec a retroussé mes manches. C'est intrusif non ?

Du coup je perds tout le sens de l'humour que j'avais ce matin. Et je trouve que je collectionne les bizarreries en ce moment.

J'ai l'impression d'être un point convergent ou d'attirer le malheur : le cambriolage de l'appart', les tarots anonymes, et maintenant cette agression...

Si tout n'est qu'un vilain hasard alors c'est rassurant mais déprimant : je suis un aimant à emmerdes.

S'il n'y a pas de hasard alors ça fait froid dans le dos.

Qu'il est étrange de retourner à l'école et de ne pas y retrouver Paola. J'aurais adoré lui raconter mon accident d'hier.

Oui j'ai envie de le raconter à tout le monde. Comme si j'étais fière qu'il me soit arrivé quelque chose.

J'en ai parlé à David qui était bien plus inquiet que moi. Et qui m'a dit que j'avais eu de la chance : « Ils auraient pu te piquer ton bracelet... »

Mais oui c'est vrai ça... enfin vu ce qu'il vaut ils n'auraient pas été déçus !! Mais j'aurais été dégoûtée qu'il finisse à la poubelle... C'est un hasard énorme : le fait de l'avoir donné à Paola l'a sauvé, mon bracelet. J'ai été inspirée en fait !!! Décidément, mon ange gardien est bien là.

Puis David m'a angoissée en m'incitant à aller porter plainte au commissariat. Pour dire quoi ? J'ai été poussée et on m'a retroussé les manches. Et on m'a rien volé. Super ! Ils n'ont que ça à faire de s'occuper de mon cas !!! Et puis j'ai pas vu mon agresseur...

En fait j'ai vu simplement qu'il était tout en noir : survêt noir et sweat à capuche gris, la capuche masquant sa tête et son visage. C'est tout ce qui me revient.

Sûrement un drogué. Il n'y avait personne dans la rue. Je suis mal tombée. Un point c'est tout.

Le jogging s'est mal terminé mais pas pour les raisons attendues...

Alors oui, au bout de dix minutes je crache mes poumons... et en plus David m'emmène à Montmartre par les escaliers...

Alors oui bis, je suis arrivée au bout... en 45 minutes... alors qu'il m'attendait là-haut depuis 30 minutes.

J'aurais dû prendre le funiculaire avec ma carte Imagine'R !!!

A peine arrivée là-haut, je vois David prêt à repartir, surexcité :
- J'en peux plus David, laisse-moi.
- Je vais pas t'abandonner...
- Je suis un boulet là et c'est encore pire pour moi de te freiner comme ça. Continue sans moi !!!
Il était gêné et moi très énervée.

Oui c'est dur d'assumer sa faiblesse comme ça. Devenir sportive ne me fait pas rêver, certes. Mais c'est difficile de se contenter d'être une boule de plomb attachée à la cheville de quelqu'un d'autre. Il a fini par lâcher l'affaire, dépité. Et moi, dégoûtée de ne pas pouvoir partager ça avec lui.

Mais si ce n'était que ça...

Un petit quart d'heure a été nécessaire pour que je retrouve mon souffle et que je me mette debout. Puis, au pied d'un escalier, en tournant sur la gauche, je me fais bousculer violemment et je suis projetée en arrière. Je ne me souviens plus du reste.

Je me suis retrouvée allongée par terre sur le trottoir, observée avec inquiétude par 3 Japonaises. Elles n'osaient pas me toucher et me parlaient dans leur langue. Une fois qu'elles ont été rassurées, elles se sont prosternées devant moi (enfin c'est un peu exagéré mais j'étais dans le coton), puis elles sont parties en souriant et en traînant les pieds.

Je me suis assise sur une marche de l'escalier que j'avais quitté avant la chute. Impossible de savoir combien de temps je suis restée inconsciente : une poignée de secondes, une minute, deux ? J'ai réalisé alors que mes deux manches avaient été retroussées... très étrange ! De toute façon je n'avais rien sur moi, aucun bijou, je n'en porte jamais.

Aucun argent, aucune clé, aucun tel, rien. Bredouille le voleur !

Je n'ai pas de trace de coup, aucune douleur à part la nuque projetée en arrière... ah si j'ai une grosse bosse, mon crâne a dû heurter le sol.

J'imagine que ce sont les risques d'une grande ville.

J'ai très mal au crâne, je vais me coucher dès maintenant, un peu sonnée.

Dernier jour des vacances... j'avoue que je ne cracherais pas sur un peu de tranquillité. Mais David veut que je courre avec lui. Je pourrais lui sortir l'excuse de la cheville, mais je n'y pense plus, la douleur a disparu. Et la kiné m'a dit mardi dernier que tout allait bien et que je pouvais « refaire » du sport.

Refaire ? Là elle n'a pas été extralucide du tout... Faire ou apprendre ou découvrir à la rigueur... Elle croit peut-être que je me suis fait une entorse à une compétition nationale de volley !!!

Mais je me vois pas inventer un mensonge à David. Si j'étais chrétienne pratiquante je dirais que le sac à pêchés est plein et que je suis bonne pour confess'. Je me demande d'où me vient cette éternelle culpabilité ?

J'essaie de devenir indifférente et sans scrupule comme tous mes congénères de 16 ans, vivre la vie sans penser au lendemain et sans penser aux autres...

Mais j'arrête pas d'imaginer ce que pensent de moi les gens que j'aime bien... j'ai tellement pas été habituée à « bien aimer » que j'en deviens parano...

Oui, ok c'est bien beau tout ça. Mais je mentirai pas à David, un point c'est tout. Soit j'y vais, soit je lui dis que j'ai pas envie...Même ça j'ai pas envie lol... Je ne veux pas le décevoir...

Allez Sarah secoue-toi et cours pour un ami !

Qu'auriez-vous fait vous ? Doit-on se forcer pour ne pas déplaire à quelqu'un ? Doit-on s'écouter sans arrêt au risque de déplaire ? Doit-on se choisir soi ou bien les autres ?

Rendez-vous 16h en bas de chez moi, j'ai déjà des courbatures. Enfin... j'ai déjà couru avec lui fin janvier (cf post du 25 janvier) et j'avais été meilleure que lui...

Meilleure qu'un accro à la fumette, c'est glorieux !

Je me suis endormie 5 minutes après mon retour hier soir, mon cœur étant un peu retourné par le stress de la soirée. Je vais aller chercher mes shoes tant aimées !

La mère, the mummy, m'a envoyé un sms : « Sarah encore merci pour votre aide hier soir, je n'en doutais pas. Je ne vais pas hésiter à sortir avec mon mari maintenant que j'ai trouvé la perle rare ! xoxo»

C'est gentil. Pendant quelques minutes je me suis sentie valorisée et utile, c'est rare. Mais ça ne dure pas : j'ai pas vraiment mérité ces cent euros et j'ai frôlé la cata... je me sens presque idiote et coupable maintenant...

Conversation délicate avec le Vieux au téléphone vers 21h45 :
- Sarah tu fais quoi ? Tu rentres ?
- Ben non, les parents sont bloqués...
- J'y crois pas du tout, t'es avec qui ?
- Ben avec Jessica la petite fille, vas-y parle Jessica ! Talk please !
Et là elle qui a bavardé avec elle-même pendant 3h ne dit plus un mot. Le Vieux réagit mal :
- N'importe quoi Sarah...
- Ben si vous me croyez pas, montez au 4ème étage porte gauche.
- C'est ce que je vais faire tout de suite... et je vais te ramener par la peau des fesses...
- Ben faites ça, mais surtout s'il vous plaît, ramenez moi le Chien, c'est une question de vie ou de mort.

Entretemps la mère appelle aussi juste derrière et me rassure : la ligne de métro est débloquée, les pompiers sont venus, elle n'a pas bien compris pourquoi...bref elle arrive dans dix minutes maximum.

Ding dong : c'est le carillon de la porte d'entrée. C'est le Vieux, de très mauvaise humeur... mais il a le Chien ! Jessica se jette sur le pauvre bougre et le caresse tout en lui faisant un câlin. Il a l'air d'aimer ça et tire la langue...

Le Vieux est surpris d'avoir tort et lâche le Chien qui rentre dans l'appartement comme chez lui et va jouer avec la petite fille... Le Chien a l'air soudainement tout excité et renifle partout pendant que Jessica lui tire la queue puis tente de le coiffer avec un peigne de Barbie. Berk ! Le Vieux se calme mais à moitié :
- Bon d'accord... il y a bien une petite fille. Ses parents sont inconscients ! Bon rentre vite, je te laisse le Chien. Ramène-le vivant s'il te plaît.
- Oui oui je fais au plus vite...

Le Chien saute sur le canapé puis redescend, Jessica est aux anges... et fait des bisous au Chien sur la bouche berk ! Je panique comme le chat qui est allé se cacher sous le canapé, j'ai envie de faire pareil. La mère va me massacrer en rentrant... Et elle me paiera pas... Tout ça pour rien... Je teste mon autorité avec quelques « STOP ! » mais rien n'y fait. Jessica vit le plus beau moment de sa journée. Ou de sa vie.
La gamine emmène ensuite le Chien dans sa chambre... et là j'entends la clé dans la porte d'entrée. Mummy is back et Sarah is dead !!!!

- Well Sarah... tout s'est bien passé ?
- Euh non...
- Ah elle a mangé c'est déjà ça... elle est où ?
- Ben je sais plus trop...
- Comment ça ? Mmmh il y a une drôle d'odeur ici...
Oui ça sent le Chien. Mummy va voir dans la chambre et là je me fais pipi dessus (au sens figuré quand même quoi...). Je n'ose même pas la suivre.

« Oh God ! There's a dog... »

Je vais mourir.

« Sarah, you're a genius. J'ai tellement de difficultés à la coucher et là she sleeps like a small baby »

Je vais voir et oui... : une fois le Chien avec elle dans la chambre elle s'est couchée et ça sent même le dentifrice ici... Le Chien est sage au pied du lit.

« It's a miracle... Sarah vous êtes parfaite... et en plus vous m'avez pas parlé d'argent, c'est la preuve que c'est pas ça qui vous intéresse ! Je vous adore !»

Alors ça je suis sur le cul ! C'est vraiment pas mérité mais bon... décidément ce Chien est un cadeau... et je me le dis de plus en plus. C'est lui mon ange gardien...

Avant de repartir, la mère m'a donné une liasse de billets alors que je m'attendais à repartir bredouille. Et dans l'escalier je recompte, elle a dû se tromper : il y a cinq billets...de vingt euros !!! Elle doit pas avoir la notion de l'euro...

J'ai jamais tenu autant d'argent dans ma main. Chouette mes shoes... la vie n'est qu'une succession de surprises, il ne vaut mieux rien prévoir !!!

A 21 heures la mère a appelé sur mon portable! Je sors alors de ma torpeur : catastrophe, je n'ai rien fait de ce que la mère m'avait demandé... même le chat n'a pas eu droit à ses croquettes... !
- Ah Sarah, est-ce que tout est okay ?
- Oui parfait... parfait...
- Jess est au lit ?
Je peux pas mentir, elle est en train de hurler avec ses poupées : Ken aurait trompé Barbie !
- Non mais c'est pour bientôt...
- Bon ne t'inquiète pas Sarah, on rentre bientôt... mais on est bloqués là, dans le métro, il y a eu un incident voyageur, je sais pas trop ce que c'est...
- Ah oui je sais... euh... bref... vous inquiétez pas, je m'occupe de tout !

Je remercie donc cet « incident voyageur » qui va la bloquer au moins trente minutes. Je nourris le chat. Je tente de nourrir Jessica, elle s'en fout : une solution, manger la soupe à sa place ! Hop c'est fait même si je risque de faire une overdose de lettres A. Bon au lit maintenant...

Pas moi, Jessica ! Mais non elle s'en moque : Barbie tente de se réconcilier avec Ken... Du coup j'accélère l'histoire : je prends la Barbie et je prends la parole :
- I pardonne you Ken, I love you.
- No too fast...
Grrrr elle perd pas le nord celle-là... elle en fera baver aux hommes. Et en plus je sais pas dire pardonner en anglais. Jess reprend le sketch en attrapant la Barbie:
- I'm hurt...
Je décide de reprendre le rôle de Ken
- Yes yes I know, I am stupid man, I am only a man, but I love you forever, will you marry me Barbie...
- No no no, wicked Ken who makes me cry...
- I will do what you want Barbie to catch your heart
Elle adore et se prend au jeu :
- Ok, I want a doggy...
- What ???
- I want your doggy !
- Ken doesn't have any dog...
- But you have, you, the nice fat girl...

Mince elle veut mon Chien !!! Et là patatras le Vieux appelle, je marche sur des œufs. Je range le blog !

Je suis arrivée à l'heure. L'appartement au 4ème étage est superbe. La configuration est un peu la même que le mien mais il y a une cloison en moins, la déco est magnifique. La télévision c'est un écran plat géant. Je vais me régaler.

Le petite fille me reconnaît et se jette sur moi. La maman discute avec elle en anglais :
- Uh you see Jess, she came, the nice girl...
- Yeah, mummy, I'm happy !
- Be a nice little princess, ok ? Don't scare her ok ? If you want her to come back...
- I like her, the fat girl, the fatty !
La mère ne relève pas... voilà une conversation comme si j'étais pas là, comme si elles pensaient que je ne comprenais pas l'anglais... Peut-être qu'aux États-Unis, à mon âge, on ne sait pas du tout parler une autre langue... Mais là c'est gênant... Elle est censée me faire peur en plus, ça me rassure pas... et elle me trouve « fat » et bing, prends-ça dans ta tronche ! Pourtant si elle est américaine, elle doit être habituée aux méga bibendums élevés au gras.

En plus il y a pas mal de choses à faire : nourrir Jessica, lui parler français tout le temps, nourrir le chat, coucher Jessica à 20h après lui avoir lu une histoire en français et après l'avoir forcée à se laver les dents. Ouf elle a pas de bain à prendre, elle est déjà en pyjama ! Mais c'est déjà pas mal tout ça...

La mère a l'air détendue. Elle est inconsciente de me laisser sa fille ! A une pauvre débutante comme moi ! Et elle a pas l'air de se rendre compte que je suis paniquée. Je n'ai pas l'honneur de rencontrer son mari ? Non elle le retrouve « là-bas » et va rentrer vers 21h...

Et hop en dix minutes elle a disparu et je me retrouve seule avec Jessica. Argh... Et je sais toujours pas combien je vais être payée alors qu'il y a que ça qui m'intéresse...
Non parce que franchement passer 2 heures à torcher Jessica ça ne m'enchante pas... et gratuitement encore moins !!!!

Il est 20 heures passées, et elle n'est toujours pas couchée... et elle n'a pas dîné... elle n'en fait qu'à sa tête. Elle joue avec ses poupées, se construit des histoires...n'a pas faim... J'essaie de lui donner des ordres mais elle n'a pas l'air de comprendre ni en français... ni en anglais... ni gentiment, ni en grognant...

Du coup je finis par goûter à sa soupe avec des nouilles en forme de lettres dedans... mmmh c'est sucré berk, on dirait une soupe au ketchup...je me demande combien il y a de lettres A dans cette soupe...

N'importe quoi on dirait que je régresse ! J'allume la télé, c'est fabuleux, c'est une autre définition que la vieille cathodique des Vieux... et des chaînes y'en a partout...

Jessica est prise par une histoire entre Ken et Barbie et moi je suis prise par une autre histoire à la télé.