La salle est en train de se remplir, à chaque arrivant ma vessie se remplit un peu plus. Bon voyons, est-ce que j'ai le temps entre chaque chanson d'aller aux toilettes ??? Bingo. Au moins le coup du bac de français ne se reproduira pas...

J'étais beaucoup plus détendue tout à l'heure quand j'écrivais mon dernier post. Là je suis paralysée, je ne connais plus les paroles, ma voix part en cacahuètes, je ne rentre pas dans mon costume, je transpire sous les bras et ça se voit, et le lever de rideau est dans moins d'une heure.

Alyssa pavane. Tant mieux pour elle... mais comment fait-elle pour éviter le trac ??? Parce que Quasimodo a l'air aussi stressé que moi... à quoi je vois ça ? Ben les aisselles, encore les aisselles, toujours les aisselles...

Oh mais qu'est-ce que je sue sous mon costume de Fleur de Lys...

Je tente de me remémorer la 1ère chanson, si j'arrive à en faire une... autant réussir la première. Ah c'est un duo avec Phoebus, je dois le charmer. Pffff
Et après je chante quoi déjà ???
Je sais même plus combien j'ai de chansons...
Je sais même plus comment je m'appelle...
SOS POMPIERS y'a la maison qui brûle...

Je profite d'un moment de pause pour écrire dans mon cahier pré-blog tout ce qui est en train de se passer. Je croyais avoir tout vu avec le bac anticipé... mais c'est puissance mille. Pourtant je n'ai pas encore fait pipi dans ma culotte...

Ce sms de 17h56 était clair : « URGENT SARAH BESOIN DE TOI SUR NOTRE-DAME MICMAC EN COULISSES», message du prof de chant.
Puis à 17h57, appel de la prof d'arts plastoc : « J'ai une bonne nouvelle, c'est toi que nous voulons sur scène. »

Évidemment le point de vue est un peu différent selon le prof : le prof de chant me fait sentir que je suis le dernier choix alors que ma prof préférée me fait sentir que je suis pas le pire choix. Être un second choix c'est déjà pas mal !!!

Évidemment j'ai une réaction en deux temps comme quand j'ai été libérée de la pièce : soulagement puis déception dimanche en fin d'après-midi, angoisse absolue puis excitation ce soir ... à moins que ce soit excitation puis angoisse... Mais ce n'est pas la même sensation que le bac, il y a un truc de positif, le sentiment d'accomplir quelque chose.

J'arrive à 18h18 à l'auditorium où c'est l'effervescence. Mais je suis stupéfaite en voyant Alyssa sur scène !!!! Et en pleine forme... Mais que s'est-il passé ???

Le prof de chant me kidnappe : « Bon Sarah, on a besoin que tu prennes le rôle au pied levé, je sais, ça va pas être évident, on va tenter de sauver les meubles mais bon... » Il a l'air réjoui de faire appel à moi ça fait peur. Mais je l'écoute à moitié, ma curiosité prend le dessus :
- Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Alyssa est là...
- Et bien nous avons eu un petit problème avec Fleur de Lys...
- Elle est malade ?
- C'est pas vraiment ça... elle a eu un comportement inacceptable en coulisses et nous avons dû l'exclure du spectacle. C'est pour ça qu'on en arrive là et c'est pas de gaieté de cœur...
Pas de gaieté de cœur d'avoir dû renvoyer Fleur de Lys ou bien d'avoir dû faire appel à moi ???

La prof d'arts plastoc débarque et envoie balader le prof de chant : « N'écoute pas ce qu'il dit, nous avons fait le meilleur choix, une opportunité s'est présentée et voilà... ». Elle n'est pas aussi loquace que le prof de chant.

Je me demande ce qu'il y a dans le « comportement inacceptable » de Fleur de Lys.

La vérité est au milieu j'imagine.

Heureusement que j'ai répété les derniers jours sinon je n'aurais pas pu avoir le courage... là il y a un mince espoir que ça ne tourne pas à la catastrophe.

Au passage, avant d'arriver dans l'auditorium, j'ai pu voir le résultat de l'exposition artistique, celle qui réunit les croûtes choisies par la prof d'arts plastoc : comme prévu, les absents ont toujours tort et mes œuvres ont été empilées au-dessus des poubelles de tri. Alors que les œuvres du Tatoué sont magnifiquement mises en valeur. Il a gagné, c'est indiscutable. Il suffit d'une pichenette pour que mes œuvres basculent immédiatement dans les poubelles de tri. Au moins ma création est recyclable c'est déjà ça.

Mais il a fallu choisir entre la scène et les œuvres, enfin ai-je vraiment choisi ? C'est la prof d'arts plastoc qui a choisi pour moi (cf post de mardi 25 juin 19h10) puis j'ai été happée par le show... et voilà je n'ai pas pu sauver mes œuvres... Mais à y réfléchir je me demande si j'aurais pas préféré me cacher derrière mes œuvres plutôt que de m'exposer à la vindicte populaire comme je vais le faire ce soir...

Derrière un « fourzitou » de peintures, personne ne sait qui se cache... là je vais pas pouvoir masquer la grossitude et la mochitude qui me caractérisent. Je me console en me disant que la cruchitude n'aura pas duré trop longtemps (cf posts du mardi avec Grégoire le beau maître-nageur) et qu'elle ne se verra pas sur scène.

Ah... on m'appelle pour un « essayage costume » et « il y a du boulot » parait-il... Ben oui Fleur de Lys pesait 40 kg toute mouillée et moi c'est plutôt euh... je le dirai pas.

Je viens de recevoir un sms d'alerte. Puis un appel en urgence. Décidément les rebondissements dont je parlais hier ne sont pas finis ! Coup de stress, course, tout le toutim.

J'envoie un sms à David, je ne vais parler de ça à personne d'autre. Il vaut mieux rester discret que de se prendre la honte de sa vie.

Une de mes plus fidèles lectrices va avoir raison...

A 15h je retrouve ma Mamie au Rialto pour commenter les Feux de l'Amour, un rituel que j'adore désormais, quand je peux me libérer. Et comme j'ai été libérée hier de tout engagement, je peux honorer mon petit rituel qui, je l'espère, durera tout l'été.

La Mamie a l'œil comme d'habitude :
- Sarah, tu as l'air toute triste aujourd'hui ?
- C'est la pression qui retombe...
- Le bac ?
- Non, Notre-Dame de Paris.
Je lui explique de long en large ce qui s'est passé, en oubliant presque que l'objet de ces tourments et rebondissements est sa petite-fille.
- Ah mais bien sûr ! Alyssa joue dans cette pièce aussi...
- Ah ben oui, mais elle a failli ne pas participer...
- Tiens on n'est pas au courant, pour nous la représentation c'est ce soir et Alyssa a le rôle principal.
- J'y serai aussi... parce que j'ai fait les décors.
- Mais c'est magnifique...
- Mmmh vous ne direz pas la même chose en voyant à quoi ça ressemble.
- De toute façon je ne vois plus rien !!!
Ça m'a fait rire.

Nous étions assises à la terrasse du Rialto, mon Chien était sagement à mes pieds. Mais une fois n'est pas coutume, il s'agite à un moment, aboie et s'enfuit... Mais quelle mouche l'a piqué ??????????????? Il a retrouvé la forme, l'animal, pour je ne sais quelle raison. Sauf que maintenant il va falloir que j'aille le chercher dans tout le quartier. Je m'apprête à quitter la Mamie pour me transformer en agent de FBI PORTES DISPARUS quand celle-ci me rassure :
- C'est vrai que je vois plus très bien de près, mais de loin j'ai des longues vues à la place des yeux et je crois que le Chien a retrouvé quelqu'un qu'il connait.
- Je vois rien...
Ah si il est en train de sauter sur quelqu'un au loin... une femme, la soixantaine, asiatique... mais je la connais.... C'EST MA KINE !!!

Je ne comprends pas très bien, mais je vais vers elle alors qu'elle caresse le Chien tout en douceur comme une maman. Kézako ? Mais est-ce qu'il la reconnaît ? Est-ce qu'elle le connaît ? En tout cas elle me reconnaît !
- Hé Sarah... que faites-vous là ? C'est votre quartier ?
- Oui j'habite juste à côté... Vous connaissez ce Chien ?
- Oh que oui le pauvre...
- C'est mon Chien.
- Non c'est pas vrai...je l'ai gardé samedi après-midi.
- Mais...
Pour ceux qui me suivent depuis un petit bout de temps, c'est un vrai scoop. Et pourtant l'idée m'avait déjà traversé l'esprit sauf que le prénom ne collait pas. J'ai fait garder samedi mon Chien par Yunso qui l'a donné à sa mère...
- Vous êtes la mère de ... ?
- Vous êtes la gentille voisine de Mathilde ?
- Mathilde ?
- Oui Mathilde...
- Elle s'appelle Yunso...
La kiné, Mme Phamvan lève les yeux aux ciel, visiblement exaspérée par ce que je viens de dire...
- Voilà une raison de plus de discorde entre nous...
- Elle s'appelle pas vraiment Yunso ?
- Sur sa carte d'identité, il y a bien écrit Mathilde. On va dire que c'est son nom de scène, elle n'assume pas son vrai prénom.

Yunso s'appelle Mathilde, c'est vrai que c'est pas aussi glamour. Je revois et je relis quelques posts qui auraient dû me mettre sur la voie :
- post du 24 mai
- post du 27 juin
Mais si on réunit leur vision respective de l'une envers l'autre, ça ne ressemble pas du tout à ce que je connais d'elles. Donc c'est normal que ça m'ait pas sauté aux yeux non plus.

J'avoue que j'ai longtemps envié d'avoir une maman comme la kiné, Mme Phamvan et une sœur comme Yunso. Et elles sont justement mère et fille... Mais elles ne peuvent pas se sentir, quel gâchis !

La conversation se poursuit :
- Sarah, votre Chien était vraiment mal en point...
- Quelqu'un lui a fait du mal... mais il va beaucoup mieux depuis... qu'il vous a vue !
- Oui j'ai senti qu'il allait très mal, et je lui ai parlé tout l'après-midi.
- Vous parlez avec les animaux ? (on se croirait dans Secret Story!!!)
- Oui et non mais ce sont mes petits secrets. Je l'ai massé...
- Je comprends mieux, vous avez fait des miracles sur lui comme vous avez fait sur moi...
Elle s'interrompt un instant, le temps d'un petit sourire gêné, elle n'aime pas les compliments. Puis elle reprend :
- Sarah vous vivez juste en face de ma fille ?
- Oui...
- Je m'inquiète pour elle, je peux vous poser quelques questions... ?
Elle va vouloir que j'espionne sa fille ??? Mais on n'a pas eu le temps de poursuivre cette conversation : il y a d'abord eu un bruit de dispute très violente qui venait de mon appart' et qui nous a déconcentrées. Le Vieux et la Vieille en pleine explication annuelle, comme un ménage de printemps !!! PuisYunso a finalement débarqué et est restée circonspecte en nous voyant toutes les deux :

- YUNSO : vous avez fait connaissance ?
- MOI : Je connaissais déjà ta maman, c'est ma kiné !
- MME PHAMVAN : Le destin est incroyable, c'est le Chien qui nous a réunies toutes les deux comme si nous devions nous retrouver inévitablement et je découvre que la petite jeune fille dont tu m'as parlé est ma patiente préférée... Le destin est fascinant.
Alors que je suis touchée par les petits mots gentils de la kiné, Yunso lève les yeux au ciel :
- YUNSO : Je crois pas à toutes ces bêtises, maman...
- MME PHAMVAN : Mathilde, arrête !
A l'énonciation de son vrai prénom, Yunso rougit et comprend que son petit secret a été trahi !!! Un prénom c'est pas grand chose, mais ça renforce l'impression que j'avais d'elle, une grande coquette !

Décidément ces deux femmes que j'aime beaucoup pour des raisons très différentes ne se comprennent pas du tout. Quel gâchis ! Je ne crois pas trop à ce « destin » mais je me dis que si je me retrouve au milieu d'elles sans le savoir jusqu'à aujourd'hui, c'est qu'il y a une raison. Celui qui tire les ficelles de ma vie doit le savoir, lui ???

Mme PhamVan a repris et conclu notre petit conciliabule :
- C'est fou qu'on ne se soit jamais rencontrées ici, mon mari et moi possédons l'herboristerie là, juste à côté...
- Mais tu n'es jamais là, maman, c'est papa qui s'en occupe.
- C'est vrai que j'ai à cœur mon indépendance, avec mon activité de kiné. Bon Sarah ça me fera plaisir de vous voir avec ma fille un de ces jours.
Yunso a (re) levé les yeux au ciel, et j'ai failli rire. Un déjeuner à trois, ça serait tellement drôle !!!

Il y a quelques semaines, j'avais fait un pari avec moi-même (ou contre moi-même?) dans mon blog que je ne continuerais pas l'année prochaine si je ne dépassais pas 3000 visites au 30 juin. Et bien hier soir à minuit, le compteur a tranché : 3386 visites depuis le 1er septembre 2012.

Je repense à tous mes fidèles lecteurs : ceux qui sont là depuis longtemps, ceux qui sont venus puis repartis et qui me manquent, ceux qui viennent d'arriver. Je vous remercie chaleureusement de rendre ce bout de texte numérique un peu vivant et un peu réel.

Je me dis que celui qui tire les ficelles de ma vie doit être satisfait. Il ne fait pas ça pour rien.

Décidément « Notre-Dame-de-Paris » est truffé de rebondissements.

Entraînement tout cet après-midi avec la sensation de progresser un peu et de prendre confiance en moi mais devant un comité très restreint. Les Geeks, un peu coupables, sont aux petits soins : ils m'apportent à boire, à manger, règlent ma technique en priorité.

La prof d'arts plastoc est un ange même si elle prend soin de ne jamais prononcer mon prénom afin d'éviter toute confusion. Le prof de chant se soucie surtout des autres, ça veut dire que je ne suis plus trop un souci pour lui.

Petit à petit tout se met en place...

C'était trop beau. Une heure avant la fin des répétitions, on entend quelqu'un qui pousse des vocalises puissantes dans les gradins, de quoi déranger tout le monde : « Pa peu pi poh pu »

Puis une voix très reconnaissable sort du néant : « Je vous l'avais bien dit que tout reviendrait en ordre ! Allez tout le monde reprend sa place... » Bien sûr, Alyssa.

Et elle fait une démonstration vocale impressionnante comme si rien ne s'était passé. Le prof de chant la félicite : « Ouf tu nous avais manqué... »

Merci pour sa psychologie... et sa finesse. La grosse moche au placard, ouf ! J'ai bien compris...

Mon premier sentiment a été le soulagement : j'ai été exaucée. Puis un sentiment de déception prend le dessus : tout ça pour ça... Et surtout c'est la victoire d'Alyssa contre le reste du monde.

La prof d'arts plastoc montre une certaine neutralité dans ce changement de dernière minute. Mais les Geeks sont dégoûtés et la plus virulente c'est l'ex-Fleur de Lys devenue Esmeralda devenue ex-Esmeralda avec retour à la case départ. Elle est hystérique dans les coulisses et ne mâche pas ses mots : « Elle aura pas le dernier mot », répète-t-elle à tout-va.

Je ne suis pas mécontente d'avoir lâché ce barnum. Mais personne n'est venu me remercier. Et j'ai l'impression d'être un peu lâche. J'ai esquivé la difficulté. Pourtant c'est pas de ma faute...

Ah je suis pleine de contradiction, mais j'avais peut-être pris goût à quelque chose. Pas grave. J'aurais massacré le spectacle, tout le monde le pensait.

Je me lève difficilement. Je n'arrive toujours pas à réaliser que je vais passer à la casserole demain soir ! Pire que l'oral de français : le jugement acerbe et sans indulgence de mille ados baveux...

Évidemment mes rêves cette nuit ont trahi mes peurs : un spot qui tombe, mes paroles que j'oublie, les sifflements dans la salle. Bref, ce ne sont pas des rêves, mais plutôt une anticipation de la réalité. Au même titre que je ne suis pas douée avec un ballon, je risque de ne pas être douée avec un micro, même s'il est solidement attaché à mon crâne.

Mais je serai peut-être contente quand j'aurai dépassé ce moment. Une satisfaction de soi que je connais peu...

Le Chien reste avec le Vieux aujourd'hui, la Vieille a ses habitudes « paroissiales » le dimanche. Sûrement beaucoup de choses à confesser...

Je me suis dit : on va y aller discrètement, ils n'y verront que du feu.

J'ouvre la porte en douceur... mais le Chien la force et pénètre tout joyeux dans l'appartement en sautant partout, en allant dans tous les coins. Zéro discrétion. Le Chien a rajeuni ou quoi ?

Je suis alors obligée d'improviser :
- MOI : Oh regardez qui j'ai trouvé dans le couloir de l'immeuble, il s'était échappé le vilain.
Oh comme elle ment mal, oh comme elle joue à l'innocente naïve...
- LA VIEILLE : Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire...
- LE VIEUX : Mais tu l'as laissé s'échapper, c'est ça ?
- LA VIEILLE : Elle est pas capable de prendre soin d'un chien, on peut pas lui faire confiance...
- LE VIEUX : Faut que tu sois plus vigilante Sarah, c'est pas un objet, c'est un vieil animal et il a besoin qu'on le surveille ok ?
J'étais bouche bée.

Incapable de réagir face à cette profonde injustice. S'il savait... Si elle savait que je sais...

Je préfère aller me coucher. De toute façon je suis crevée...

Je retrouve Yunso dans le hall du rez-de-chaussée et j'ai raté sa mère ! Mince... Tout ça parce que le Vieux s'est mis en tête à 21h pile de me poser des questions sur le bac et comment ça s'était passé, etc... Il n'arrêtait plus...

Puis, question fatidique et inattendue :
- Mais t'as vu où est le chien ? Je l'ai pas vu en rentrant.
- Il était dans ma chambre à un moment...

Comment faire pour que les Vieux ne me voient pas revenir avec le Chien...

Bref. En tout cas, mon Toutou était en forme quand je l'ai retrouvé dans le hall d'entrée avec Yunso : beaucoup plus vif, presque comme neuf. Il n'arrêtait pas de mettre son museau entre mes jambes... c'est un signe ça, tout va bien !!!

Mais quelle histoire je vais encore inventer... Et dégoûtée de pas avoir vu la tête de la mère de Yunso...