Je suis arrivée en sport avec un seul espoir, revoir mon beau maître-nageur, Grégoire. Mon rayon de lumière de la semaine. (Je suis devenue une cruche et je m'en fous. Après la grossitude, et la mochitude, c'est la cruchitude, voilà ma nouvelle posture).
Au moment de l'appel, pas de surprise. Alyssa répond présente à la place de Ashley. Ni vue ni connue.
La prof annonce des changements dans les groupes : « Alyssa a demandé à réviser les bases, direction le petit bassin »
Mince la pétasse arrive dans mon groupe.
« Mouvement inverse. Sarah, Grégoire trouve que tu as bien progressé et que tu peux te défendre du côté des nageurs. »
Alors c'est ça c'est un couteau dans le dos !!!!! Ou plutôt dans le cœur...
Et la prof fait un commentaire à voix basse à elle-même : « Je me demande s'il s'est pas trompé de personne...».
Alors là je boude. Après la cruchitude m'attend la ragitude !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Compétition de brasse. La prof nous hurle dessus. Je sais pas plonger, je saute, je me fais mal. Puis ensuite je ne peux m'empêcher d'observer au loin ce qui se trame chez les « bébés nageurs ». Grégoire est aussi attentionné que d'habitude...
A chaque aller dans le grand bain, je ralentis face au petit bassin. A chaque retour, le dos au petit bassin, je mets le turbo pour vite revenir en sens inverse.
« Sarah, c'est quoi ces changements de rythme ? »
M'en fous.
La Peste, Alyssa, semble sortir le grand jeu à Grégoire : elle a l'air de lui poser plein de questions, il lui sourit, elle rit, il blague, elle s'étouffe de rire. Il lui montre un mouvement de nage, elle acquiesce avec admiration. C'est pas innocent tout ça. Elle l'a repéré, elle a sans aucun doute demandé à changer de groupe. Elle le veut, elle l'aura. En plus elle est célibataire, son appétit n'a donc plus de limite.
Grégoire est un beau naïf, il va tomber dans ses griffes.
« Sarah tu nages pas droit ! Ouvre les yeux ! »
Mais ils sont grand-ouverts, mais dans une autre direction.
Il l'effleure, elle le dévore des yeux. La toile d'araignée est en marche. La mante religieuse est prête à lui bouffer la tête.
Aïe !!!! Je viens de m'accrocher avec quelqu'un, j'ai hyper mal au genou. Et un mec a mal au bras, il est prêt à pleurer. Moi aussi. Mais pas pour les mêmes raisons.
J'arrive plus à nager avec mon genou, je panique, je mets la tête sous l'eau, je n'arrive plus à sortir la tête de l'eau, je me débats, je vais me noyer. Je regarde le fond de la piscine, ma derrière vision. Pas glamour, du bleu, des jambes qui nagent, des lignes noires au fond. Adieu...
Je sens alors une présence forte et solide, des bras pleins de muscles qui m'enveloppent.
Je me retrouve sur le rebord de la piscine en un instant. Je prie pour que ce ne soit pas l'horrible prof de sport qui m'ait sauvé la vie : elle est un peu masculine. Mmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmh c'est le beau Grégoire qui m'a sauvé d'une mort certaine. Il me sourit et me rassure : « C'était peut-être un peu trop tôt... ». J'acquiesce vigoureusement. Je n'ai pas le souvenir d'avoir eu droit à un bouche-à-bouche.
Bon j'en ai peut-être un peu trop fait. Mais quand j'ai vu le mec qui pleurait et qui jouait la comédie pour me faire passer pour la méchante, alors moi aussi je me suis dit que je pouvais jouer, un peu. Et pleurer est devenu pour moi une vraie spécialité.
J'ai pas eu à me forcer, j'avais mal au genou.
« Je te la rends, Grégoire », dit la prof. J'adore être un objet comme ça. Quand c'est pour la bonne cause. Mais en fait j'ai vraiment mal au genou et je m'étale à moitié en me remettant debout. « Faudra peut-être voir un médecin, hop à l'infirmerie, le danger public ! » ordonne la prof.
Ben non... et mon cours de bébé nageur ? Et ma surveillance étroite de la mante religieuse? Il va se passer quelque chose et je ne pourrai rien voir... Et ma leçon de natation pour me transformer en dauphin?
J'ai tout fait pour traîner... mais la prof me lance des éclairs comme si elle avait un taser... Je suis obligée d'abandonner ma vigie.
Zut, sacrebleu, mille milliards de mille sabords... pour ne pas dire autre chose. Je suis remontée !!!
L'infirmière me prend rendez-vous avec un médecin.
- J'ai plus mal madame !
- Ben c'est tout gonflé là...
- Ah bon ?
M'en fous, je rentre réviser, déconfite.