DIMANCHE 5 MAI 21h25 :THE PLACE TO BE...
Depuis quelques jours je prends l'ascenseur pour monter. Avec ou sans Chien ! Ben là, en cette fin d'après-midi, j'avais le Chien et je me suis précipitée sur l'ascenseur car quelqu'un s'apprêtait à partir sans moi...
Je ne regarde pas sa tête. J'appuie sur le bouton 3. La porte se ferme. J'entends soupirer puis une voix familière :
- Il pue ton clebs ! Comme toi !
Argh, Alyssa est à 20 centimètres de moi ! On n'a jamais été aussi proches physiquement à part le jour où on s'est battues en cours de sport dans la boue.
Heureusement que ce moment d'extrême proximité va durer moins d'une minute. Je n'ai rien à lui dire, et elle n'a que des vacheries...
Une minute vraiment ? On entend un gros boum de mécanisme et notre ascenseur s'immobilise entre le 2ème et le 3ème étage. Alyssa appuie sur tous les boutons des étages, il ne se passe rien. Puis la lumière de la cabine s'éteint.
Alyssa appuie sur le bouton d'aide. Le téléphone sonne, mais aucune réponse ! Elle appuie sur les boutons, à nouveau aucune réaction. Elle commence à s'énerver : « J'ai pas que ça à foutre de passer quinze minutes avec une grosse et son chien puant ».
Je reste calme comme mon Chien qui s'est allongé sur les pieds d'Alyssa, qui réagit immédiatement : « Dégage le clebs ! ». Mais il s'en fout. Elle s'apprête alors à lui donner un coup de pied, je lui attrape le poignet :
- Calme-toi, il t'a rien fait ! Prends-en toi à moi, ok mais pas à lui.
- Ah tu veux que je m'en prenne à toi morue !
- Mmmh charmant ! Hé bien vas-y, je suis toute ouïe.
- Tu pues la loose et je fréquente pas les losers comme toi.
- Tu m'apprends rien, on n'est pas dans la même catégorie sociale au lycée. Et alors ?
- Bah alors ! M'approche pas !
- Je vais te contaminer c'est ça ? Là j'ai pas le choix...
- T'es ringarde, tu ressembles à rien. T'es pas fréquentable.
- Et alors ? T'aurais pu me laisser dans mon coin et jamais me parler...
- Et toi t'aurais pu éviter de me parler aussi...
- C'est toi qu'as commencé idiote !
- Parler avec toi ? Dans tes rêves...
- Tu m'as tout de suite attaquée, dès le premier jour...
- Ah c'est pas « parler » ça...
- Non mais c'est « vanner ».
- Hé ben ? C'est pas parce que je te vanne que t'es obligée de répondre !
- Faut bien que je me défende...
- Ouais en me tirant les cheveux au cours du sport...
- T'as rien à te reprocher toi ? Tu te sens coupable de rien ?
- Coupable de quoi ? T'es rien, t'es pas humaine, t'es un cachalot échoué dans ma classe.
- Toi t'es une petite vaniteuse que tout le monde déteste !
- Hein ? C'est toi que tout le monde déteste depuis que t'as sabordé ton groupe de TPE. Et tout le monde le sait que t'es une petite vicieuse.
- J'ai rien fait pour les couler, je me suis défendue. Il faudrait que vous m'écrasiez tous comme un ver de terre et que je me laisse faire sans broncher ?
- Ben ouais t'as pas la trempe...t'es qu'un chewing-gum !
- Le chewing-gum il a la sagesse de pas te raconter tout ce qu'il sait sur les gens que tu connais...
Ça y est elle m'a poussée à bout, j'arrive sur un terrain glissant :
- Qu'est-ce que tu racontes ? Si c'est pour me dire que Ashley habite St-Ouen, super la révélation !
- Ça avait pas l'air de te plaire tant que ça quand j'ai balancé l'info. Mais j'ai bien pire...
- T'es une petite fouinasse mais t'as rien, t'es qu'un moucheron...
- Si tu savais... et si je te parlais de ton petit chéri...
- Lequel ?
- Kevin ça te dit quelque chose ?
- M'en fous, on a rompu, t'es pas à la page...
- Et si je te disais que je sais pourquoi il a rompu avec toi...
- Hein mais qu'est-ce que tu baragouines là, connasse ?
- Ah ah ça t'intéresse maintenant ! Je sais que ça te rongeait ces derniers temps...
- De quoi je me mêle ! Et accouche la grosse ! Vite fait !
- Mmmh je sais plus... j'ai oublié !
- Parle !!!!!!!
- Tu me donnes quoi en échange ?
- Tu sais rien, grosse truie !
- Pétasse, t'es aussi conne et naïve que ta copine... mmmh le beau Kevin... hé hé...
Elle pète les plombs et m'attrape une mèche de cheveux, je hurle de douleur, le Chien se relève et se met à aboyer pour me défendre mais le haut-parleur de l'ascenseur se met à grésiller :
- Oui bonjour Sonia de SOS ASCENSEUR ? Que puis-je pour vous ?
Alyssa se précipite sur le haut-parleur et me lâche :
- On est bloquées depuis longtemps, sortez-nous de là...
- Y-a-t-il de l'électricité dans votre cabine ?
- NON !!!!!, disons-nous à l'unisson.
- Ah ? Y a-t-il eu un bruit à un moment ?
- Un énorme bruit métallique..., dis-je essoufflée et paniquée.
- Oui un énorme bruit de métal, assourdissant..., surenchérit Alyssa.
- Ah je peux vous proposer que notre technicien passe dans les trente minutes. Ah pardon, je vois que votre immeuble n'est pas à jour de ses cotisations de contrat de maintenance...
- Ben oui, il est toujours en panne ! dis-je, horripilée.
- Oui bon bah je peux pas vous mettre en priorité alors. Vous pouvez attendre jusqu'à demain lundi ?
- Non mais elle a pas compris : on est deux avec un chien dans la cabine de 3 cm², et il va falloir venir nous sortir de là maintenant !!!!, se met à hurler Alyssa.
- Ah d'accord ! Gardez votre calme Madame. Je vous dis simplement que votre immeuble est débiteur et donc vous ne pouvez pas bénéficier de notre service prioritaire. Quelqu'un va passer mais pas en priorité...
- Il faudra attendre combien de temps ? dis-je, inquiète...
- Ben ça je peux pas trop vous dire, il y a déjà deux ascenseurs en panne sur la liste, et le réparateur de garde supplémentaire ne répond pas... Je vous recontacte dans quelques minutes, bon courage !
Nous sommes toutes les deux choquées par l'attitude désinvolte de Sonia :
- ALYSSA : Mais pour qui elle se prend ? « Vous êtes pas prioritaire ». C'est pas de ma faute moi, je vis pas ici, ils avaient qu'à payer tes parents adoptifs...
- MOI : Ils paient pas, y'a pas de bouton 2...
- ALYSSA : Ben c'est vrai ça, pourquoi tu le prends l'ascenseur si t'habites pas au 3ème ?
- MOI : Et toi ? Ton frère il habite au 2ème que je sache...
- ALYSSA : Ben ça te regarde pas...
- MOI : Non c'est vrai ta vie me regarde pas, mais tout vient toujours se planter devant mes yeux alors que j'ai rien demandé...
- ALYSSA : Je veux que tu me dises ce que tu sais !
Comme la tension a baissé d'un cran, je ne veux plus dévoiler ce que je sais... et je me terre dans le silence.
- ALYSSA : Que de la gueule !
Puis le silence nous gagne, la fatigue, la lassitude. Le Chien bouge de temps en temps, marche sur nous. Alyssa se laisse faire désormais, résignée.
Et là je me dis que c'est un coup du destin. Je me suis calmée, j'ai retrouvé mes esprits. Et c'est une occasion de soulager ma conscience... moi qui ne savais pas comment faire. Le destin m'apporte une solution sur un plateau. Je vais me débarrasser de ma culpabilité. Mais j'ai peur des conséquences.
Et là je tombe de sommeil en écrivant ces mots, pourtant la suite vaut le coup...Demain promis ! Tout reste intact dans ma mémoire.