Je me suis dit que j'attendrais le signe divin devant la télé. Le divin saura me trouver. Le Chien m'a trouvée en tout cas, il dort la tête dans mon entre-jambe qu'il affectionne tout particulièrement. Ça me gênait au début, plus maintenant. Il me tient chaud, ou l'inverse... même s'il pue.

J'ai demandé au Vieux s'ils avaient de la famille avec qui passer Noël : rien. Ils sont trop vieux, tous les ancêtres sont morts et la fille secrète est restée très « secrète » dans cette conversation. Mais il m'a promis un bon dîner, c'est lui qui cuisine. Ouf je vais éviter le soir de Noël les biscottes light Wasi Wasa de la Vieille et la salade verte sans assaisonnement.

David : alors qu'est ce-que je fais? Esprit de Noël oblige, je vais lui répondre : « Quand tu veux ». Ça fait un peu groupie. Mais au moins ça lui laisse la main selon son ou ses humeurs que je ne veux plus supporter.

Je me suis baladée partout. En espérant un signe du destin, une rencontre, une révélation, rien! Bon la journée n'est pas finie.

Aujourd'hui je décide de me lever tôt. Pour profiter de l'esprit de Noël s'il existe encore. Je voudrais que quelque chose de merveilleux se produise. Et mon imagination galope :
- Je découvre que mes parents sont toujours vivants! Oui ils viennent sonner à la porte pour m'emmener. Je décide d'emmener le Chien avec moi.
- Les Pestes viennent s'excuser d'être aussi méchantes et Alyssa demande à être mon amie (est-ce vraiment un rêve ça?).
- David devient mon meilleur ami, mon complice de tous les instants à qui je peux tout confier. Pas gagné...
- La fille des Vieux revient, elle est super sympa et devient une amie! Mais je me demande si elle est pas morte...
- Je gagne au loto même si j'ai pas le droit de jouer et je me tire au bout du monde, mais je fais quand même une bise à Rondin avant de mettre les voiles.
- Ou bien Paola gagne au loto et dit « au revoir Président » à la cantine le jour de la rentrée... LOL

Comme quoi je ne suis pas si égoïste. Enfin pas trop. On dirait une liste au Père Noël. J'ai longtemps cru qu'il existait et je ne croyais pas les vilains enfants blasés qui me disaient c'était une histoire inventée par les parents. Jusqu'au jour où Rondin, qui a toujours représenté l'autorité et la vérité pour moi, a fait une gaffe. J'avais 7 ans et demi. Oui c'est un peu tard... j'imagine que c'est pour ça que j'ai toujours envie d'y croire.

 Bon qu'est-ce qu'il va m'arriver de merveilleux aujourd'hui? J'ai hâte, je me réjouis!!!

J'ai écouté aux portes toute la soirée : ma porte d'entrée, celle des Jeunes, j'ai failli me faire prendre par les Vieux, par les Jeunes...

Rien d'alarmant a priori... les deux filles sont restées quarante minutes. Il faut que je sache demain.

SMS de David :
« Merci Sarah. Je te demande pardon, je ne le referai pas. On se voit vite? »

Comme si de rien n'était? Est-ce que la priorité est de soigner son égo ou bien de soigner son ami?

J'essayais de m'imprégner de Noël par la fenêtre. Chercher un couple, une famille, des enfants qui se chamailleraient...

Au bout d'un laps de temps assez long d'observation, j'entrevois les deux Pestes qui se rapprochent de mon perron et qui ont une conversation statique. Mmmh ma curiosité l'emporte et j'ouvre la fenêtre en bravant le froid :
- ASHLEY : je suis désolée Alyssa, je le retrouve pas!
- ALYSSA : c'est con ça, il a de la valeur, je l'aimais bien.
- ASHLEY : j'ai cherché partout, je comprends pas...
- ALYSSA : tu l'as perdu où?
- ASHLEY : chez moi j'espère.
- ALYSSA : pas en cours de sport, ou à la Christmas Party de l'autre jour, parce que là c'est foutu!
- ASHLEY : Non, j'ose plus le porter à l'école avec l'autre folle...

Puis elles sont rentrées dans mon immeuble... Mais de quoi parlaient-elles? Et si la folle c'était MOI? Et si elles parlaient du bracelet? Et si le bracelet appartenait à Alyssa qui l'aurait prêté à Ashley???? Et si elles découvraient que c'est moi qui ai le bracelet?

Comment elles le sauraient... pffff pas d'inquiétude!

Euh mis à part le fait que j'ai envoyé une photo du bracelet ce matin à Yunso. Mis à part le fait que les deux filles vont sûrement chez Marco et ses colocs...

Catastrophe... Et si les deux filles tombaient sur Yunso en train de faire des recherches avec la photo en plein écran??????????????????????????????????????????

Non Sarah, hier la magie de Noël a opéré, elle va se poursuivre... Et si j'avais épuisé tout mon quota de magie.....?

La Vieille n'a rien vu de mon « ravalement ». Mais le Vieux a tilté et n'a pas aimé. Et j'ai eu droit à une sympathique remarque : « Évite ce genre de chose pour aller à l'école. Et même évite certains quartiers... »

J'ai ri, mais il ne riait pas. Et cinq minutes après j'ai compris ce qu'il sous-entendait par les « quartiers ». Oui ok genre Pigalle, rue St Denis, charmant papy!

Je vais aller me coucher, mais il faudrait que je me démaquille avant. Et j'ai rien...

Tiens un sms de David...
« Pardone mi j'é boin de parlé... »
Pas bien compris tout de suite. Mais j'ai l'impression qu'il veut parler? Il a l'air à l'ouest vraiment avec ce sms, bourré ou bien perché...

J'aimerais renouer avec David, mais il tourne mal. Et je suis censée quand même lui faire la gueule. Ma fiereté m'empêche de faire le tout premier pas. On ne se verra pas pendant les fêtes un point c'est tout.

Je réalise que trente minutes viennent de passer depuis le SMS. Et qu'est-ce qu'en j'en ai fait de ces trente minutes ? Et bien que de l'hésitation. Le cerveau en pleine gamberge.

Dans un mélange de colère et d'envie, je lui balance finalement un message!

« Comprends rien à ton message tu veux quoi? »

Silence de mort qui m'angoisse. Ai-je été trop froide?

« A mon tour d'avoir besoin de toi »

Ce message me bouleverse et ma main sur le clavier virtuel prend le dessus sur mon cerveau...

« Sur notre banc maintenant? »

Pas de réponse. Mais je suis complètement folle d'avoir envoyé ce message. Les Vieux vont pas me laisser sortir. Jamais. Et le père de David non plus. Il va me prendre pour une débile, ou une fille amoureuse.

« Dans quinze minutes j'y suis »

Aïe j'ai quinze minutes pour me faire belle. Ah non c'est déjà fait, je ressemble à une pute. Bon et je peux rien y faire. Autre objectif : sortir sans problème. Aucune idée.

Sortir en cachette : mmmh risqué et le banc est sous les fenêtres des Vieux. Non non et non. Et ce chien qui n'arrête pas de me lécher la main et qui m'empêche de me concentrer...il me reste cinq minutes et il va se prendre un lapin. Le pauvre c'est horrible. Et pourquoi je n'ai pas dit demain? Il est encore temps de lui envoyer un SMS? Non il est en route, s'il se prend un vent, c'en est fini de notre amitié. Han et ce chien qui soupire et qui fait des bruits bizarres comme un dernier soupir avant la mort...pour une fois le Chien, tais-toi! Ou aide-moi!

Oui!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! LE CHIEN!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Je réveille le Chien qui commençait à passer l'arme à gauche. Il me reste deux minutes. Mais un cabot pareil à secouer c'est très dur. Alors je le surexcite, et je le chatouille. Il aime mais il ne se relève pas. Il est dans un coma de plaisir. Mince... Je le prends par le collier ce pauvre Chien, il se relève et je lui chuchote un mot à l'oreille : « Le Chien fais moi plaisir, c'est le cadeau de Noël que je te demande, rien d'autre ».

Miracle le Chien se lève, baille, soupire la mort, et semble malgré tout prêt à me suivre. Je vais frapper au bureau du Vieux qui m'ouvre :
- Je dois aller promener le Chien!
- A cette heure? Mais c'est pas son heure!
- Euh...bah...comment dire... (je prends un air dégoûté)... il a des gaz c'est insoutenable!
- Han c'est encore ma femme qui lui a donné un truc à manger, ok vas-y, merci Sarah.

Un Vieux content, une Sarah contente. Et un Chien qui ne comprend rien à ce qui lui arrive. En trente secondes je suis dehors avec le Chien en laisse qui est complètement déboussolé. Mais il n'a aucune envie de faire ses besoins.

Je me retourne vers la fenêtre du Vieux. Il agite sa main, je hausse les épaules en regardant le Chien. Il ferme ses rideaux, rassuré.

Vingt minutes depuis notre dernier échange. La gourde c'est moi. Il ne viendra pas. Une larme monte et je fais un câlin au Chien. « Allez on remonte ».

Quelqu'un vient s'asseoir sur le banc, je prends peur, le Chien se met à grogner. Ouf c'est David, le Chien sent mon calme et s'assied sur le trottoir. David a les yeux boursoufflés. Moi qui m'y connaîs en glande lacrymale, je pense qu'il a pleuré, beaucoup.

Il pleuviotte comme toute la journée aujourd'hui dans la Capitale. David n'a pas envie de parler en fait. Mais il a pris la même place que la fois d'avant. Je reprends la mienne, collée à lui. Les minutes passent et on ne se parle pas. Mais je sens qu'on est bien. David ouvre la bouche :
- Je savais pas si tu voudrais me parler.
- J'étais pas sûre.
- Je me sens pas bien, tu l'as vu?
- Ben oui je t'en ai parlé...
- Je me souviens même pas, je fume trop...
- Pourquoi?
- Pourquoi quoi?
- A toi de me le dire...

Et on échange un regard vif, un mélange d'interrogation, de colère, de rancœur, de tendresse. Tout ça mêlé. Quelques secondes de silence passent. David sort de sa torpeur :
- C'est une date anniversaire trop difficile pour moi.
- Ta maman?
- Oui comment... ah oui je t'en ai un peu parlé c'est vrai. Elle est morte et elle me manque. Et mon père déraille complètement...

Il n'avait plus besoin de parler, on a communiqué du regard pendant quelques secondes avant de regarder droit devant nous, sans gêne. Le silence faisant son travail. De longues minutes s'écoulaient naturellement. On était bien, sous la pluie, trempés.

- Je peux te poser une question Sarah?
- Oui? dis-je intriguée et presque inquiète.
- Qu'est-ce que t'as fait à ton visage?

Pendant un instant je fronce les sourcils, je suis circonspecte. Je touche mes joues, mes doigts sont noirs...le maquillage de Yunso a coulé! On ne m'y reprendra pas lol, je suis ridicule, je ris de moi-même, et il rit de moi. Il m'embrasse sur la joue et disparaît.

Je me relève et là j'aperçois le Vieux très suspicieux par sa fenêtre. La moutarde est en train de lui monter au nez. Je suis partie pour passer à la casserole. Et là le Chien tire la laisse vers le caniveau et sort une énorme et dégoûtante crotte. Je regarde le Vieux et je lui montre du doigt le Chien et son horrible crotte. Le Vieux acquiesce et ferme le rideau. Aucun commentaire une fois dans l'appart'.

J'embrasse le Chien qui m'a fait le plus beau des cadeaux. Une crotte.

Ici l'ambiance est meilleure. Les trois sont là. Il y a un faux sapin en plastique qui a été sorti de la cave et qui pue « la cave ». Je leur demande pourquoi ils n'ont pas de vrai sapin:
- KAMIL : ah moi c'est pas de ma faute et pourtant je suis pas catho!
- YUNSO : quel gâchis tous ces sapins jetés le 26 décembre, ça me fend le cœur.
- MARCO : Et puis on est un peu écolo ici.
- KAMIL, énervé : qu'est ce qu'y sont barbants ces deux là je me tire.

Effectivement Marco et Yunso semblent avoir retrouvé une certaine sérénité qui a du coup l'air d'exclure Kamil.

« Tu veux nous aider à décorer le sapin? » me lance Marco. J'ai intérêt à en profiter avant qu'il ne découvre que sa garce de sœur est ma pire ennemie. Je deviendrai alors la paria de l'étage. Mais Alyssa semble déterminée à garder quelques petits secrets...

Me voilà assistante de guirlandes électriques « made in china ». Puis assistante cheveux d'ange. J'adore! Je m'éclate comme une folle. Ce sapin était tellement horrible à la base et avec tout ce maquillage il est devenu tout à fait acceptable. Bon il a fallu 2h de ravalement de façade et j'ai complètement oublié le déjeuner. Bof un tête à tête avec la Vieille avec une salade verte et du jambon...

Et toute cette parure du sapin qui a eu droit un relooking extrême, me fait penser à moi. Peut-être que si je me maquillais, je pourrais rehausser le tout non? Les vêtements ont quand même déjà joué en ma faveur. Les blousons m'ont un peu cachée du regard des autres. Un blouson et hop on m'a fichu la paix. Alors pourquoi pas plus? Mais avec une telle façade, comme la mienne, le ravalement prendrait toute la journée chaque jour, si bien qu'une fois prête il faudrait aller se coucher.

Je prends des photos du sapin, et Yunso me félicite. Elle est gentille, je n'ai servi à rien, mais ça part d'une bonne intention.

L'avantage d'être seule c'est qu'il n'y a pas de cadeau à faire. Mais la contrepartie c'est qu'on n'en reçoit pas. Je tenterai de m'incruster autour de ce sapin le 24 au soir ou le 25 pour les voir ouvrir quelques cadeaux. Encore un petit bout de plaisir par procuration.

Une fois Marco parti dans un autre coin de l'appart', je demande à Yunso si elle a pu regarder pour mon bracelet : « Ah oui, c'est vrai...mais tu sais, je peux pas faire grand chose si je l'ai pas sous les yeux, tu veux pas me le laisser? »

Je suis partagée entre les risques et l'aide qu'elle pourrait m'apporter. Et je regarde autour de moi pour trouver une idée ou une excuse... le sapin...que j'ai décoré... que j'ai photographié...PHOTO!!!!!!

- Je peux t'envoyer une photo ça te va?
- Ça serait parfait.

Je suis fière de moi. J'ai eu une bonne idée rapide et ça c'est pas mon genre habituellement. Et du coup je me suis sentie pousser des ailes, la magie de Noël revenant sur moi...

« Dis Yunso t'as pas un truc à manger? »
« Dis Yunso...tu voudrais pas me maquiller une fois? »

Je suis repartie le ventre plein et le visage tout plein de cosmétiques puants et gras.

Au programme farniente et dodo les premiers jours. A partir du 26 je me mets au boulot. Mais pas avant.
Je vais aller au ciné, voir tous les films de famille de Noël. Tout. Il faut bien vivre par procuration.

La Vieille a vraiment un comportement bizarre. Elle ne fait plus attention à moi et sort régulièrement de la chambre de sa fille disparue. Voilà un mystère que j'aimerais bien résoudre. Peut-être qu'elle y passe tout son temps pour pleurer. Mince, elle a une âme?

Et le Vieux passe tout son temps dehors. L'esprit de fêtes n'existe pas ici. Ni guirlande, ni sapin, ni être humain. Y'a que le Chien qui m'aime ici. Mais sa conversation n'est pas très riche. Je vais aller chez les Jeunes un peu. J'entends du boucan joyeux là-bas.

J'ai prié pour que cette fête de fin d'année à 16h30 au lycée soit un échec... je ne veux pas que l'atelier « Alyssa et moi en train de construire des faux toits de Paris » devienne l'association la plus riche de l'école. Et comme c'est la fête qui va renflouer les caisses...

16h45 : Je me résous à aller jeter un œil à la Christmas Party. Chouette, il y a peu de gâteaux et peu de gens. A 0,50€ la part, on va pas aller loin. Un demi vitrail et une tour de Notre-Dame en micro, pas plus.

17h15 : Aïe. Il y a des milliards de gâteaux qui partent comme des petits pains, et une cohue surexcitée démentielle. C'est foutu. Je suis bonne pour turbiner jusqu'en juin et reconstruire tout Paris en décor, seule avec la prof et Alyssa... enfin seule tout-court. La magie ne prend pas pour moi, je me sens seule au monde. Pourtant j'étais si enjouée à l'heure du déjeuner. Alors pourquoi ça ne prend plus? La magie ne fonctionnerait qu'avec les gens qu'on aime bien? Ou qui nous intéressent? Et la trêve de Noël alors? Ils ont tous l'air de faire partie d'une grande communauté, sans moi. Tout le monde se goinfre, et moi la gourmande je ne mange rien. Est-ce que cette fête pourrie va moisir tout mon esprit de Noël? Je me fais bousculer dans tous les sens, ma sacoche change de côté à chaque instant comme une partie de ping-pong. Je ne contrôle plus rien, le bruit me fait tourner la tête...

17h35 : Je deviens folle et je dois me frayer un chemin parmi tous ces sauvages. Et je me transforme en taureau qui pousse tout sur son passage. L'instinct de survie. Aurais-je peur de la foule? Je découvre le mot « agoraphobie »!

17h40 : Me voilà hors du troupeau assoiffé. Les joues rouges et la tête encore retournée. J'étais au bord du malaise. Je pense à David que je ne vois pas et qui me manque. Je pense à Noël que je vais passer seule. Et au loin je vois Paola, qui bouffe tous les gâteaux sans payer, et semble dévorée par la masse. Elle, au moins, ne se laisse pas abattre, et semble apprécier ce bordel inhumain. Pourquoi y arrive-t-elle et pas moi?

Je la fixe, elle m'amuse, elle s'en fout terriblement, écrase des pieds et gobe tout discrètement... ou pas. Qui oserait lui dire quoi que ce soit...Elle me prend sur le fait en plein espionnage au loin, et me fait un clin d'œil puis un sourire. Et j'agite la main bêtement. Puis elle disparaît, digérée par les vagues gargantuesques de foule et de nourriture.

Enfin comme prévu je vois la mère d'Alyssa avec ses tartes qui ont un immense succès! A partir de là plus rien ne m'intéresse. Je quitte ce lieu de perdition, cette orgie indigeste de Noël qui m'a presque dégoûtée. Et je me retrouve dans la rue sombre, seule. J'entends la foule du lycée foisonner et je m'enfuis dans les frissons de la nuit.

Je suis en vacances et ça ne me rend même pas heureuse. Tiens, ça devait pas être la fin du monde aujourd'hui? Ça aurait été intéressant, dommage...

Décidément depuis son retour, Paola, la caissière de la cantine, n'est plus que l'ombre d'elle-même. J'en viens à regretter ses coups de gueule. Je n'ai plus rien à raconter sur mon déjeuner. Même la période euphorique de Noël ne semble pas la toucher positivement.
Depuis la macédoine il y a quand même un petit quelque chose entre nous. J'ai droit à des petits clins d'œil.

Je l'imagine seule, avec deux enfants, abandonnée par un horrible mari. La vie n'a pas été tendre avec elle et son agressivité était sa réponse à l'agressivité de la vie. Et Noël est un poids de plus pour elle : Paola doit tenter par tous les moyens de donner un Noël convenable à ses enfants en se sacrifiant. Fiction ou réalité?

Aujourd'hui, j'étais tellement triste pour elle que je lui ai dit un mot à la caisse, un discret « joyeux Noël ». Elle m'a regardée, désemparée, déboussolée et j'ai senti qu'elle n'arrivait pas à sortir une réponse. De ma table solitaire, je l'observais comme si j'essayais de percer son âme et son histoire.

Peut-être qu'elle n'est pas touchée par l'aura de Noël mais moi si! Je viens juste de m'en rendre compte... en écrivant. Je souhaiterais pouvoir partager la magie de Noël avec quelqu'un...