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16 ans, grosse & moche!

25 février 2013

LUNDI 25 FEVRIER 13h35 : SUR LE DEPART

Ps de Paola aujourd'hui. Je m'inquiète. Est-elle déjà partie ? Alors je prends mon courage à deux mains et je demande à la fille de la caisse qui est une des 2 ennemies jurées de Paola :
- Elle est où Paola ?
- Tiens elle manque à quelqu'un. Tu lui veux quoi ?
- Ben je veux lui parler !
- Tu fais partie du même club ?
Elle ricane, je vois pas où elle veut en venir. Club des Grosses ? Club des Moches ? Club des Goudous ?
- Tu la trouveras là où elle mérite d'être, à la plonge !

Je sais même pas où c'est la plonge. C'est dans l'arrière-cuisine ? J'ai pas accès. Désespoir. Mais ouf de soulagement, elle est encore là.

Quand je porte mon plateau à la fin du repas sur le tapis, j'entends sa grosse voix ! Elle est à la plonge juste derrière l'orifice de passage du tapis ! Je l'appelle en mettant ma tête dans l'ouverture. Elle m'entend et se ramène toute joyeuse :
- Hey mais c'est toi ! Je suis contente de te voir !
- Comment ça va ?
Notre discussion se fait à travers le passe-plateau, dans le bruit du tapis de mon côté, le grincement des couverts sales et des assiettes empilées ainsi que la vapeur des machines à laver la vaisselle de son côté.
- Moi j'ai la pêche. J'en ai bientôt fini de tous ces cons ! Je finis vendredi ! C'est négocié et je pars avec un petit chèque.
- Mais vous pouvez pas partir comme ça ?
- T'es gentille ! Mais je suis finie ici. Je vais voir si l'herbe est plus verte ailleurs !
- Et on va se payer vos copines les morues à la caisse ?
Elle a pouffé de rire. Jusqu'à ce qu'on soit dérangées : par le bloquage des plateaux de mon côté et des élèves qui se plaignaient, et par le boss de Paola de son côté de cloison qui lui hurlait dessus.
- Bon je m'y remets ! Viens me dire au revoir vendredi !

Et on a été séparées par la cohue de mon côté qui m'a emportée: « mais elle fait quoi la grosse elle bloque les plateaux ? ». Je ne sais pas si on parlait de moi ou de Paola. Bref il fallait dégager.

Lui dire au revoir ? Mais c'est des adieux plutôt ! Je ne la reverrai jamais. Et vendredi où, quand, comment ?

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25 février 2013

LUNDI 25 FÉVRIER 11h15 : RE-CONNECTED !

David m'a offert un petit miracle sur un plateau. Il avait avec lui en arrivant ce matin un gros sac plastique. A la pause de 10h, il me montre le sac, c'est un clavier. Bizarre non ? Un clavier tout seul ? Il sort ensuite une pochette rouge avec élastique : « Bah ouvre ! »

Je touche, ça a l'air solide. Assez léger aussi. Dans la pochette, une tablette !!! Je le regarde, inquiète :
- Me mate pas comme ça ! J'ai pas dévalisé une boutique !
- Mais c'est quoi ?
- C'est pour toi ! En attendant que tu retrouves un équipement digne de ce nom.
- Encore un cadeau ?
- C'est un prêt cette fois !
- C'est à toi ?
- C'est à la famille, surtout à mon père...et en ce moment il s'en sert pas. Je préfère que quelqu'un s'en serve plutôt qu'elle pourrisse dans un coin.
- Mais...
- Ne complique pas ! Tu prends, tu profites. Et le clavier marche en bluetooth si tu veux taper des choses importantes. Puis c'est plus confort que le tactile quand on écrit beaucoup.
Incroyable ! Je n'ai pas osé lui faire une bise en classe devant tout le monde à la pause, surtout devant les Pestes qui nous surveillaient derrière du coin de l'oeil (en ce moment on est au 1er rang).

Mes yeux disaient « merci », les siens disaient « de rien » et ça a duré jusqu'à la reprise du cours.

25 février 2013

LUNDI 25 FÉVRIER 0h10

Je me sens déconnectée du monde. J'étais déjà pas beaucoup connectée mais c'était mieux que rien, non? J'aimerais bien un peu de réconfort de David mais plus de moyen moderne entre nous. Je suis à nu. J'ai ressorti mon cahier pré-blog qui m'a beaucoup servi les premières semaines avant d'avoir l'ordinateur. Retour à l'âge de pierre.

24 février 2013

DIMANCHE 24 FÉVRIER 18h05 : SOLDE !

Je remontais le chien quand j'ai croisé Kamil qui a haussé les épaules en me voyant. La rupture est consommée. Puis en passant devant leur porte j'ai entendu une bribe de conversation : « Tu verras qu'elle ne rendra jamais rien, c'est une petite roublarde ». C'était la voix de Marco.

Pas besoin qu'on me fasse un dessin. Il est temps de rendre tous les cadeaux. Avant j'ai envoyé un sms à David :
« SOS vais rendre téléphone, ordi, carte sim. Mail et n° tel inactifs, t'inquiète pas »

J'ai effacé mes trois contacts (David, téléphone maison, téléphone Rondin), effacé ma centaine de SMS échangés avec David. Dans l'ordinateur, j'ai effacé l'historique, les cookies, téléchargé la sauvegarde de mon blog sur Skydrive.

Je suis donc en train de m'effacer 6 mois de vie et de me transformer en simple empreinte numérique.

Une fois prête, avec l'ordi et le téléphone sur les bras, je vais sonner à leur porte, toute tremblante. Je suis terrifiée par toute confrontation quelle qu'elle soit. Je réfléchis et c'est un peu faux, je n'ai plus peur, par exemple, de me confronter aux Pestes, je dirais même que j'y trouve un petit plaisir. Mais me confronter à des gens que j'aime bien, c'est terrible.

Drinnnng. Pas de réponse tant mieux. Je laisse ? Je repars avec ? Je vais pas laisser le matériel à la portée de n'importe quel voleur. Alors j'ai une idée hautement lâche. Je retourne dans mon appart' et je colle mes yeux dans le judas et mon oreille à la porte. La Vieille est partie, et le Vieux travaille dans son bureau.

Trente minutes plus tard, j'entends du bruit. Je regarde, je vois une fille inconnue passer... puis Kamil qui rentre avec elle. Mmmh j'imagine qu'il se console de Yunso. Bon c'est le moment.

Je pose sur le paillasson mes objets high-tech, un petit mot. Je sonne. Puis je me précipite dans mon appart'. Mais il ne vient pas ouvrir. Quelle andouille... il doit être très occupé...

Quelques instants plus tard, un barbu passe et s'arrête, circonspect devant le paillasson garni. Il observe, et attrape l'ordinateur, l'ouvre, regarde autour de lui et repart avec, direction les étages supérieurs! Non mais !!! Un voleur parmi nos voisins !

Je ne me démonte pas, et je fais irruption dans le couloir pour lui courir après. A ce moment-là, la porte d'en face s'ouvre enfin : Kamil en short et torse nu apparaît, me regarde d'un air suspicieux, marche sur le téléphone, je mets la main sur ma bouche, d'effroi ! Et je retourne mon regard vers le Barbu qui s'apprête à disparaître : « Hé vous ! L'ordinateur ! ».

Kamil ne comprend rien à ce qui se passe. Le Barbu se fige et redescend les mains vides :
- Qu'est-ce que vous me voulez ?
- L'ordinateur que vous venez de piquer !
- Mais de quoi vous parlez ? Vous êtes timbrée !
Kamil fronce les sourcils, se baisse pour récupérer le téléphone sans voir mon mot sous son pied. Mais je reste concentrée sur le Barbu qui s'apprête à repartir. Je cours vers lui, le bouscule et évidemment sur une marche, vers le palier supérieur, invisible de nos pas de porte, je vois l'ordinateur. Je l'attrape, je fusille du regard le Barbu qui tente de se défendre :
- Je me demandais bien ce que faisait ce machin sur cette marche et je m'apprêtais à le jeter.
- Et mon cul c'est du poulet !
Voilà une expression qui est sortie tout droit de ma bouche sans la contrôler, je ne sais même pas ce que ça veut dire réellement ni d'où ça vient mais c'est un expression qui fait peur !

Le Barbu a mis les voiles en haussant les épaules. J'ai rendu l'ordinateur à Kamil, totalement perplexe. Je m'apprête à lui dire qu'il marche sur mon mot quand le Vieux débarque de l'appartement et tombe nez à nez avec Kamil à poil et moi !
- Qu'est-ce que c'est, ce raffût ? Ben encore vous ? Mais habillez-vous ! Sarah, rentre tout de suite !

Même pas eu le temps de vérifier que Kamil avait vu mon mot. J'ai réussi à me récupérer les foudres du Vieux.

Peut-être que mon mot s'envolera dans le néant, je ne saurai jamais. Sur ce mot était écrit : « Je suis désolée d'avoir dit ça, que vous ayez entendu ça. Merci pour l'accueil incroyable que vous m'avez fait, je n'oublierai pas. Je ne peux pas garder tout ça dans ces conditions. Sarah »

Et voilà encore des catastrophes en cascade. Je pleure discrètement à ma fenêtre. Ce sont des larmes d'adieu. Dans l'obscurité, je distingue un type en train de mitrailler mon immeuble avec un télé-objectif. Bizarre. Je ferme ma fenêtre et mes rideaux et je mets ma tronche sous un oreiller pendant que le Chien grimpe sur mon lit.

23 février 2013

SAMEDI 23 FEVRIER 12h10 : VIEILLE BANDE VHS

Alors que j'allume la télé vers 11h comme un petit rituel habituel de mon week-end, je tombe sur les images d'une K7 vidéo qui ne s'est pas arrêtée et qui a l'air de tourner en boucle. C'est la fameuse cassette que la Vieille regarde la nuit, en cachette de tous.

La fille est jeune, elle a quoi... 16 ans ? Mince, belle, heureuse... elle a tout pour elle. Et elle parle à une copine, non, trop âgée. Une tante ? Une cousine ? Quelqu'un qui me dit quelque chose, quelqu'un de joyeux, de lumineux... une intonation puis un geste qui me rappelle quelque chose.

Non c'est pas possible. Believe it or not, le rayon de soleil à côté de la jeune fille...c'est sa mère, c'est la Vieille !

Il m'aura fallu cinq bonnes minutes pour la reconnaître. Elle a été passée au lave-linge ou quoi ? Elle a perdu toutes ses couleurs au lavage, et toute son épaisseur. C'est un linge terne et rapeux maintenant.

Mais que lui est-il arrivé ? Elle a l'air douce et aimante sur cette cassette. Mais la bande s'est abimée, comme elle... et elle est prête à claquer du jour au lendemain comme la bande... elles grésillent, elles sautent, elles se détendent, se retendent...

Je ne l'aime pas du tout cette Vieille, mais il y a une trace d'humanité quelque part, perdue sur cette bande magnétique. Et qui disparaîtra avec la mise au rebut du magnétoscope.

Je suis intriguée. Elle a l'air d'aimer tellement sa fille, et réciproquement. Qu'est ce qui a brisé ce bonheur ? Quelle bombe a ravagé cet appart' en désert ? Est-ce qu'il ne reste pas quelque part des traces radioactives qui nous rongent tous de l'intérieur... ?

Le mystère d'Émilie reste entier. Comme ces pièces dans lesquelles je n'ai jamais mis un pied alors que je vis ici depuis 6 mois. Comme l'odeur dans ma chambre qui n'a jamais été aussi forte... Je ne suis vraiment qu'une étrangère ici.

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22 février 2013

VENDREDI 22 FÉVRIER 20h10

Le petit rituel de la course avec David a bien eu lieu. Musique en simultané pour le coureur et la feignasse attablée au bar du coin. La Mamie me fait un signe, mais je n'ose plus lui parler. Marco a dû faire un portrait terrible de la Grosse voisine de 16 ans qui en veut à sa sœur.

Pourtant elle a pas l'air de m'en vouloir. Faut dire que la mère a déjà dû me descendre auprès de la Mamie. Donc le travail de sape est déjà fait. Pourquoi elle m'en veut pas alors... ? Peut-être qu'elle est un peu sénile déjà non ?

La musique est rythmée et ne va pas avec mon état d'esprit. Je change de playlist et je tombe sur un morceau que j'avais téléchargé : Sia - Don't Bring Me Down.

Je ne vois pas le temps passer et quand David me retrouve avec son boum-boum sur les oreilles il ne comprend pas pourquoi mon visage est dégoulinant de larmes. J'ai pleuré sans m'en rendre compte. J'essuie vite mes larmes, mais la Mamie m'a vue et me transperce de son regard que je n'arrive pas à soutenir.

Une fois dehors, David s'étonne que je pleure sur SA musique. Et me confirme qu'il n'est pas très en forme comparé à « avant »... décidément tout est de ma faute ! Je n'arrive pas à me connecter sur lui comme il voudrait...

22 février 2013

VENDREDI 22 FÉVRIER 13h45 : FRANC OU DIPLOMATE ?

Paola s'en est violemment prise à ses deux collègues. Je ne sais pas qui avait commencé mais j'étais contente de voir qu'elle reprenait du poil de la bête. J'ai entendu quelques bribes de conversation :
- T'es ignoble, t'es vraiment méchante, regarde tu l'as fait pleurer, on t'a rien fait nous...
- Tu parles, oui, vous me vomissez dessus toute la journée dans mon dos, j'ai des preuves...
- Pfff quelle preuve ?
- La goudou t'emmerde !!!
- Quoi ça veut dire quoi ?

Quelle hypocrite la fille... je suis bien contente que Paola les ait surprises en train de bavasser sur elle comme ça. Et toc les pétasses !

Mais je viens de penser à un truc : est-ce bien ou mal de parler dans le dos de quelqu'un ? Vous voyez où je veux en venir... Dans le cas des pétasses je trouve que c'est mal et dans mon cas alors ? Jamais je n'aurais pensé que je faisais quelque chose de mal quand je bavais sur Alyssa avec David au fond de la ruelle. Le destin est en train de me punir...

Mais finalement baver dans le dos de quelqu'un, n'est-ce pas salutaire ? Un moyen d'éviter l'affrontement direct et inutile ? On n'est pas des sauvages non plus... On nous répète que la franchise est la valeur absolue... quitte à faire mal ? Est-ce qu'il ne vaut mieux pas mentir pour éviter d'envenimer ? Est-ce que la diplomatie ne serait pas un signe de maturité ? Et la franchise à tout prix une bêtise d'adolescents et de débiles de la télé-réalité qui adorent se donner en spectacle ?

Ben si j'avais écrit des choses aussi intelligentes dans mon bac blanc, j'aurais peut-être eu l'espoir d'avoir la moyenne...

Finalement, la pétasse qui discutait avec Paola s'est mise à pleurer, ou faire semblant et a appelé le boss. De toute façon Paola n'a plus rien à perdre. Alors rentre-leur dans le lard si ça te fait du bien. Et en disant ça toute ma dissertation ci-dessus s'effondre...

Ah qu'il est dur d'être cohérente... je suis pétrie de contradictions et je ne me comprends pas moi-même.

22 février 2013

VENDREDI 22 FEVRIER 13h05 : RETOUR A L'ENVOYEUR

Comment je vais faire pour rendre tout ça ? Le téléphone, l'ordinateur... et il y a encore ce fichu bracelet des Pestes qui me pèse...

Comment rendre un truc quand on a honte... il faut être anonyme. Mais un téléphone et un ordinateur je peux pas les rendre par la Poste. Je peux sonner et les déposer sur le paillasson et m'enfuir avant qu'on ouvre. C'est ridicule et lâche, mais je me vois pas affronter Marco qui m'a généreusement offert tout ça. Et pour le bracelet je me suis déjà imaginée le glisser dans une boîte aux lettres mais les empreintes au secours... j'ai vu des milliers d'épisodes des EXPERTS et je vais me faire coincer et finir dans une prison haute sécurité pour délinquantes !

J'ai quand même avancé hier soir : j'ai nettoyé de fond en comble le bracelet des Pestes sans le retoucher, donc avec des gants, puis je l'ai protégé dans un mouchoir et caché sous mon matelas. Prête à le dégainer le moment venu...

La Vieille m'a prise sur le fait en train d'astiquer le bracelet avec des gants : elle a levé les yeux au ciel et marmonné dans sa barbe ensuite. Pas la première fois qu'elle me prend pour une folle. Et vice versa !

Et pour conclure, j'ai magnifiquement foiré mon épreuve de Français, j'avais le cerveau ailleurs.

Dans une semaine les vacances... je vais faire le ménage dans mes idées à ce moment-là et tenter de remonter la pente. Très glissante ces derniers jours.

22 février 2013

VENDREDI 22 FÉVRIER 0h05

Décidément tous mes petits repères s'effondrent en ce moment : le Monstre, les Jeunes... tout est en train de se volatiliser.

Je relis notre conversation de cet après-midi. Je ne comprends ni comment ni pourquoi elle m'a analysée comme ça. Finalement elle m'a dit mille fois plus de choses que je lui en ai dites. Elle doit m'imaginer un peu comme elle voudrait qu'une ado soit ou bien elle se projette en arrière avec moi.

Et un truc me trotte encore dans la tête... pourquoi a-t-elle parlé d'écrit... elle m'a jamais écrit... elle déraillait un peu. C'est normal. Mais qu'est ce que je peux faire pour elle... ?

Ce qui m'amuse c'est qu'elle aussi a ses « Pestes », ses deux collègues qui parlent dans son dos et qui la surnomment goudou.

Au lit, demain bac blanc de Français.

21 février 2013

JEUDI 21 FEVRIER 15h05 : LE DEPART ANNONCE

Je suis en cours, je n'écoute rien. J'écris pour exorciser. Urgence, une mauvaise nouvelle de plus.

A la cantine, Paola boudait et ses deux ennemies les pétasses lui donnaient des ordres : « va nous chercher les louches, va remplir la cartouche à moutarde, fais ci fais ça » Bref elle a été dégradée, c'est sûr. Elle ne m'a pas vue. Pendant le repas je l'observais du coin de l'œil et à un moment elle a fondu en larmes.

J'ai fini par laisser mon plateau et mes deux canettes de coca, pour aller la retrouver. Elle s'était réfugiée aux toilettes... des garçons. Bizarre non ? Je rentre, je tombe sur un type qui me regarde outré comme si je le voyais tout nu. Il n'y a personne mais j'entends des reniflements, comme un aspirateur bouché, en fin de vie. Oui c'est elle, ça ne fait aucun doute. Alors je prends sur moi et j'ouvre la bouche :
- Paola ? Vous êtes là ?
- Ah m'emmerdez pas... C'est qui ?
- C'est Sarah...
- Qu'est-ce que tu veux Sarah... laisse moi pleurer en paix...
- Qu'est-ce qui va pas... ?
Elle sanglote. Je m'affirme :
- Je sais pas quoi dire... mais je suis de votre côté contre vos deux collègues...
- Je m'en bats les couilles de ces deux connasses...
- Ben je voudrais vous dire de pas abandonner comme vous me l'avez dit plusieurs fois...
Ça la fait réagir au milieu des reniflements distingués, du nez jusqu'en fond de gorge :
- C'est vrai ça...oui c'est vrai, je te l'ai répété, à l'oral, à l'écrit... et je suis pas foutue de l'appliquer à moi-même... Mais je suis dans la merde... je suis virée !
Qu'est-ce que je suis conne, j'aurais dû m'en douter, tous les drames de ces derniers jours autour d'elle, le fait qu'elle ne gère plus la caisse, qu'elle n'en ait plus rien à faire, qu'elle collectionne les bêtises. Là elle me coupe la chique, la Paola. On entend plus que nos respirations. Un mec passe et me dévisage, puis me fait un petit mouvement de langue très classe. Du coup ça me donne une idée pour reprendre la conversation :
- Pourquoi vous êtes aux toilettes des garçons ?
- Comme ça je suis sûre de pas croiser mes collègues ! Et ici on me fiche une paix royale.
- Ah bon je devrais essayer aussi...Mais vous allez vous défendre non ? Vous pouvez pas partir comme ça ?
- J'en ai plein le cul de me battre, tu comprends, C'est une bande de cons. Et tous ces morveux sans respect, mal élevés...
- Ben ils sont pas tous comme ça...
- Pfff tous des petits cons et des petites connes...
- Mais c'est pas possible, on peut pas virer les gens comme ça...
- Ben si, surtout un caractère comme le mien...
Je sais pas comment lui dire que j'adore son caractère, qu'elle se défend vachement bien , qu'elle a du cœur.
- Ben moi j'aime votre caractère... j'aimerais avoir le même... !
- T'es bien plus forte que tu crois ma fille, tu le démontres chaque jour, j'ai jamais vu ça, une fille comme toi, t'es bien plus combative que moi.
- Ah bon...
Je me demande là si elle me confond pas avec une autre :
- Vous parlez bien de moi ?
- T'as le cerveau d'une adulte dans le corps d'une ado.
- Hein ?
Là elle ouvre la porte, ou plutôt la défonce, elle a le visage déformé par la colère et les larmes. Elle ose pas me regarder, et me parle sur un ton autoritaire:
- Va siroter tes deux canettes avant qu'on te les pique.

Elle me laisse pantoise. Elle va disparaître de mon quotidien. Ça me bouleverse. Je crois que je me suis attachée, profondément, à ce bouledogue au grand cœur qui a été la première à me montrer que les apparences ne sont que des mauvaises pistes.

Je ne réalise pas. Non elle ne peut pas partir... Qui va me faire passer deux desserts en cachette ?

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